monuments aux morts - Roland Narboux - Bourges encyclopédie

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LES MONUMENTS AUX MORTS DE BOURGES
Par Roland NARBOUX

Bourges est une cité qui possède plusieurs monuments aux morts, ce qui est assez curieux, mais s'explique par l'Histoire.

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Version 2009

 

Bourges possède la plus belle cathédrale du monde ou peu s'en faut, mais un fait est moins connu, elle a sans doute le plus grand nombre de monuments aux morts de notre hexagone. Pourquoi ce poids de l'histoire est il si présent ? Pourquoi ces édifices en nombre ? Quelle fut leur Histoire.

LES MONUMENTS AUX MORTS DE BOURGES sont représentatifs de cette cité qui vit beaucoup sur son Histoire et sur le passé, ce qui peut parfois poser quelques problèmes. Ils sont particulièrement nombreux et chaque conflit a le sine, on a même une stèle pour la guerre contre les Anglais en 1436.

Sans remonter à la stèle qui commémore la " victoire " des berrichons sur les anglais dans les faubourgs d'Auron en 1436, la cité de Jacques Cœur possède 4 monuments aux morts correspondants aux derniers grands conflits, sans compter les innombrables stèles de ce Berry, région ho combien pacifiste, qui fêtent la gloire des " anciens " ou les pleurent.

- le monument aux morts de la guerre de 1870, c'est une sculpture de l'Homme Taureau, dont l'inauguration a posé pas mal de problèmes. Il faut dire que cette guerre a laissé des traces avec en particulier avec les combats de Juranville.

- le monument aux morts de la Grande Guerre, place Verdun, c'est le "grand monument de la ville".

- le monument aux morts de la Résistance, dont l'inauguration fera l'objet de difficultés majeures entre les forces politiques.

- le monument aux morts de la guerre d'Algérie, qui est situé proche des Pré Fichaux, il a été fait par Jean Marie Nunez.


La visite commencera par le monument aux morts de la guerre de 1870, c'est une sculpture représentant un gaulois debout et puissant, dont l'inauguration a posé pas mal de problèmes. Puis, le monument aux morts de la Grande Guerre, place Verdun, c'est le "grand monument de la ville". Ensuite, le monument aux morts de la Résistance, dont l'inauguration fera l'objet de difficultés majeures entre les forces politiques de l'époque, et enfin le monument aux morts des combattants d'Afrique du Nord érigé en 1998.

le monument aux morts de la guerre de 1870

Le fait de se présenter comme une cité militaire implique pour Bourges, la commémoration des grands événements de guerre du passé. Ce sera le cas du monument dressé pour le souvenir des combats des soldats berrichons de la guerre de 1870. Ce fait d'arme du régiment berrichon du 19e des Mobiles du Cher, évoque les combats contre les Prussiens à Juranville, au cours desquels le commandant Martin sera tué. Et ce monument deviendra l'objet d'un scandale !
Comme souvent en Berry, le manque de crédit ne permet pas de dresser un édifice aussi grandiose que l'auraient voulu les initiateurs du projet, une composition avec de multiples personnages, se réduit à une seule statue que certains appelleront " l'Espoir " et d'autres " l'homme taureau ". Elle est inaugurée devant la place Séraucourt le 2 juin 1907.

L'opposition entre les Berrichons se fait au travers des journaux locaux. "La Dépêche du Berry" est foncièrement contre le monument, peut être plus pour combattre le sculpteur qui est qualifié parfois de nationaliste et dont l'extrémisme est teinté d'antisémitisme. Un journaliste écrira : "Le malheur est qu'aucune municipalité, autre que la municipalité Ducrot, ne pourra tolérer une pareille verrue sur la place Séraucourt, et qu'après avoir dépensé de l'argent pour élever un piédestal à cet endroit, il faudra en dépenser encore pour le transporter ailleurs ou pour rentrer la statue au grenier". A l'opposé "Le Journal du Cher" sera un chaud partisan de la statue de Jean Baffier. On pourra lire que "Le monument des enfants du Cher est le monument du vrai patriotisme français. Aucun de ceux qui en furent témoins n'oublieront le spectacle unique qui se déroula esplanade Marceau, noire de monde... les vieux soldats avaient tenu à exprimer leur admiration. Quel frisson parmi les assistants quand se sont avancés ces vieux, hâves, la poitrine constellée de médailles...".
Ainsi commence la " guerre " des statues qui dure encore aujourd'hui.
En effet, sans trop que l'on sache pourquoi, la querelle va rebondir en… 2006. Un journal sur Internet composé d'informations locales, " l'Agitateur ", conçu par de jeunes gens, parfois turbulents, découvrent que l'auteur de la sculpture, Jean Baffier est un personnage peu recommandable, régionaliste et un peut réactionnaire. Et ils lancent une campagne pour détruire le monument ! Ils étaient passé des milliers de fois au pied de la statues placée sur le chemin du Printemps de Bourges et ne savaient rien….. Alors la querelle est réanimée avec quelques erreurs de dates :

mercredi 14 juin 2006
Faut-il déboulonner L'homme-taureau ? par Jean-Michel Pinon
Sculpteur de la fin du 19ème siècle Jean Baffier est considéré comme un illustre berruyer. Une rue porte son nom. Et sa statue de " L'homme taureau " est fleurie chaque année, le 11 novembre, pour rendre hommage aux combattants de la guerre 1914-1918. La mémoire collective locale semble avoir oublié que Jean Baffier consacra l'essentiel de son œuvre à l'exaltation du nationalisme……

Et oui, Baffier était un personnage situé à ce que l'on appelle " l'extrême droite ".

Le second monument est inévitable, c'est celui que toutes les communes de France ou presque ont édifié dans les années 1920 et suivantes…. La commémoration des morts de la Guerre de 14, ces valeureux Poilus qui se sont ou ont été sacrifiés.

Le monument aux morts de la guerre de 1914- 1918

Dès 1919, un comité se forme pour l'érection d'un Monument. Le Président en est Jean Foucrier, il pleure son fils unique. Ce dernier est tombé quelques jours avant la Victoire. Ce comité est chargé de recueillir de l'argent. En cette période, pour honorer leurs morts, les Berruyers ne se font pas prier, ni le conseil municipal qui vote, sous l'impulsion de Laudier, une subvention d'une valeur de 500 000 francs.
La recherche d'un sculpteur ne sera pas facile, mais un homme se détache ; c'est un artiste né à Saint-Amand ; il commence à avoir plusieurs commandes de la part des communes du Cher pour ce type de composition, et cet homme, Emile Popineau est choisi.

Le monument est important, en pierre taillée, il représente des "Poilus", dont l'un, placé à droite, semble "satisfaire un besoin naturel", Popineau était-il un grand réaliste ou un humoriste ? nul ne sait. Le choix du lieu ne posera aucun problème... dans un premier temps, l'oeuvre est placée en face de l'Abbaye Saint-Ambroix, juste devant ce qui deviendra dix ans plus tard, le Jardin des Prés-Fichaux. A cet emplacement, aujourd'hui, a été placée une table d'orientation.
L'inauguration du Monument aux Morts va se dérouler dans toute la solennité due aux victimes de la guerre, le 29 mars 1925. L'ensemble de la population sera présente.
Depuis cette date, le Monument de Popineau a été déplacé, car le sol était mouvant, compte tenu de la proximité des marais; et la pierre, c'est lourd ! Mauvais présage diront certains. En final c'est pierre par pierre que les poilus de pierre seront déplacés de 50 mètres dans ce qui est aujourd'hui le prolongement de l'avenue Henri Laudier, face à la gare.
Et après ce monument essentiel, avec la fin de la seconde Guerre mondiale se profile une nouvelle composition.

Le monuments aux morts de la Résistance

La Place du 8 Mai 45, est située à l'entrée Sud de Bourges, à deux pas de la Maison de la Culture. Sur le rond point de cette Place, se dresse un monument intitulé " La France rompant ses chaînes". C'est la dernière oeuvre du sculpteur "officiel" de la Ville de Bourges de cette époque : Emile Popineau. Celui du monument au mort de 14/18.

Dans l'après-guerre, Popineau, le sculpteur de Saint Amand vivait et travaillait principalement à Paris. Il va gagner le concours entre plusieurs artistes, pour l'érection de ce monument commémorant la Résistance.
A l'origine, il s'agissait d'une initiative de la Ville de Bourges, et des Comités locaux de la Résistance qui voulaient honorer les Résistants, ainsi que les victimes du nazisme. Le Monument prévu devant être le pendant sur le sud, de celui des poilus situé au nord et.... lui aussi de Popineau.
La maquette de Popineau représente une femme, un peu lourde, mais au regard dur et énergique, elle a le masque des souffrances endurées. Derrière la statue, deux grandes ailes s'élancent vers le ciel.
Avec cette dernière oeuvre, et de manière bien involontaire, Emile Popineau va déclencher une belle polémique. En effet, derrière la statue principale, il y a une croix de Lorraine, elle symbolise la Résistance. Mais nous sommes en 1949, cette croix est encore acceptée par tous.
Deux ans plus tard, cette même croix est devenue le symbole d'un parti politique, le RPF. Certains mouvements de Résistance ne se reconnaissent pas dans ce symbole, en particulier ceux d'obédience communiste. Ces derniers vont boycotter l'inauguration officielle du Monument, le 8 mai 1951, en présence d'un ministre, Monsieur Louis Jacquinot. Des forces de l'ordre s'interposent entre les bélligérants…..
La querelle sera dure, parfois odieuse. Un conseiller Municipal ne dira-t-il pas: " On ne peut même pas retirer la Croix de Lorraine sculptée, le sculpteur est mort... ". C'était vrai, Emile Popineau s'était éteint 5 semaines auparavant, à Paris, victime de la silicose, cette maladie des sculpteurs.

Dernier grand monuments aux morts de Bourges, après 1970, 1914, 1939… c'est la guerre l'Algérie qui a le sien où plutôt, des morts dans les conflits d'Afrique du Nord.

le monument aux morts de la guerre d'Algérie

Depuis de longues années, les associations d'anciens combattants de la guerre d'Algérie demandaient à la ville d'ériger un monument à la mémoire des anciens qui s'étaient battus et furent tués dans ce qui s'appelaient à l'époque " les événements d'Algérie ".
C'est avec une souscription départementale et l'aide des pouvoirs publics que fut érigée en 1998, ce monument réalisé en granit noir d'Afrique par l'entreprise Blavier-Deslandes suivant une conception de l'architecte et pied-noir devenu berrichon Jean Marie Nunez.

Un symbole fort qu'explique avec beaucoup de fougue, M. Nunez :

" c'est la représentation de la Tunisie, du Maroc et de l'Algérie avec trois blocs de granit noir, posé sur du sable symbolisant le Sahara. Puis, deux colonnes, l'une en granit noir, l'autre en granit blanc pour symboliser les deux parties de la Méditerranée, et elles sont surmontée de deux mains, pour le rapprochement et la paix. "

Et devant une troisième colonne, gallo-romaine retrouvée dans le Cher, et symbolisant le les migrations vers l'Europe et l'Afrique. Et le concepteur poursuit ses explications, sur ce monument de la paix, dédié en fin de compte à " la mémoire des enfants du Cher morts pour la France en Afrique du Nord de 1952 à 1962 ".

Ainsi ce termine cette ballade dans l'Histoire nationale et locale en souhaitant que ces monuments soient les derniers de ce type !

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