La poste de Bourges - Roland Narboux - Bourges Encyclopédie -

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LA POSTE (PTT) DE BOURGES
Par Roland NARBOUX

Bourges, avec un magnifique monument, c'est du néo-gothique, c'est l'Hôtel des Postes, c'est à dire des PTT, il date des années 1930

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Version 2009

 

poste de Bourges .

L'HÔTEL DES POSTES est du au travail de la municipalité Laudier qui va se lancer, en plus des Prés-Fichaux, dans d'autres travaux ; ce sera le cas pour l'Hôtel des Postes. Ce bâtiment administratif avait été commencé quelques mois avant la guerre, mais le chantier fut abandonné à la mi-1914, il y avait d'autres priorités. Laudier et son architecte Tarlier vont se battre contre le Ministère afin de faire réviser le marché : les conditions financières d'avant 14 n'étaient plus les mêmes dans les années 1920

 

 

La ville de Bourges avait cédé gratuitement à l'Etat un terrain de 1764 mètres carrés, limité par la cour de la bibliothèque, la rue de la Monnaie, la rue Moyenne, la rue Michel de Bourges, et le plan est en date du 17 octobre 1912. Par la suite, la Ville avait accepté de participer à l'opération de construction pour une somme de 30 000 francs, le tout devant être payé en 1914, 1915 et 1916. Dans l'article 3 de l'accord, il était écrit :
"Sur le terrain cédé, l'Etat fera construire à ses frais, un Hôtel destiné aux services de la Poste, du Télégraphe et du Téléphone. Les constructions seront édifiées selon les plans du 20 avril 1913".

Mais nous sommes en 1920 et le Sous-Secrétariat d'Etat des Postes et des Télégraphes, après avoir ouvert à nouveau le dossier, demande une modification de l'édifice, ce que Laudier ne veut pas ; mais surtout, il demande que la contribution de la ville de Bourges passe à 390 000 francs, afin de poursuivre les travaux. Cette dernière exigence est tout aussi inacceptable pour la Municipalité. Laudier fait alors voter un texte par son conseil municipal, compte tenu du refus du Ministère de poursuivre les travaux tant que la ville de Bourges n'aura pas accepté l'augmentation de sa participation. Ce vote s'effectue sur le texte suivant :
" La ville de Bourges, respectant les termes de la convention sus-visée, refuse toute nouvelle participation pour la construction de l'Hôtel des Postes de Bourges, avant qu'une conférence ait été tenue entre les représentants de la Ville et de l'Etat..."
Suivent les mots courants à cette époque comme aujourd'hui : "Le Ministre des Finances serre les cordons de la bourse et impose à ses contrôleurs de n'autoriser aucun engagement de la part de l'Etat." Le Conseil adopte ce point de vue à l'unanimité.
Il faudra attendre l'automne, et très précisément le 26 septembre 1921 pour que Laudier reçoive une lettre signée du Ministre des finances, Paul Doumer. Ce futur Président de la République explique qu'un nouvel examen a été fait avec l'administration des postes et "dans ces conditions, je n'insiste pas, écrit le ministre, pour obtenir un supplément de subvention de la part de la ville." Mais il poursuit avec une phrase équivoque : " je me plais toutefois à espérer que la municipalité acceptera de plein gré de prendre sa part dans le surcroît de charges que la hausse des prix née de la guerre a occasionné à l'Etat".

Chacun pouvait espérer que les travaux allaient être menés avec célérité. Il n'en fut rien. Le 28 avril 1922, le maire écrit à M. le Sous-Secrétaire d'Etat des P.T.T. une lettre très offensive, dans laquelle il souligne : "Je ne comprends pas le retard systématique apporté par votre administration.... depuis un an, la maçonnerie est terminée, elle attend sa charpente et sa couverture". Et Laudier fait dans l'humour, avec ces mots délicieux : "Je ne voudrais pas être désobligeant pour ceux de vos collaborateurs mieux abrités rue de Grenelle, mais vous reconnaîtrez que je suis autorisé à dire qu'ils ont peu de considération pour ceux de leurs collègues moins fortunés".
Le conseil municipal est unanime derrière son maire, et chacun de considérer que l'administration locale des P.T.T. ne peut pas continuer à travailler dans les baraquements de bois dans lesquels ils sont hébergés.

On retrouve cette constante dans les rapports entre le pouvoir local et celui de Paris. Laudier sera toujours plus enclin à travailler sur le terrain berruyer que de pavaner à Paris ; c'est aussi une des raisons pour laquelle il ne sera jamais ministre, ce n'est toutefois pas la seule......

C'est à cette même époque que se construit d'une manière beaucoup plus originale, la Bourse du Travail. Les syndicalistes d'alors décident d'ériger dans la cour de la place Malus un bâtiment qui servirait de lieu de réunion et de rencontre pour le monde ouvrier. En 27 jours, du 2 au 29 septembre 1923, la Bourse du Travail de Bourges est érigée ; ce sont les militants communistes et syndicaux qui se sont chargés, soir après soir, d'édifier les murs, la charpente et les intérieurs : après leur journée de travail en usine, ils venaient, à titre bénévole construire "leur" Maison.


Le 29 septembre, l'inauguration se déroule avec la présence de Venise Gosnat et de Pierre Hervier qui fut le fondateur de la première Bourse du Travail en 1897. Ce jour-là, ils sont plus de 2000 militants à venir admirer l'oeuvre, sous les accents d'un spectacle donné par "la Prolétarienne". Quelques jours plus tard, se déroulera à Bourges le premier Congrès de la C.G.T.U., il sera placé sous le signe de l'Unité ; et parmi les congressistes, se trouvera un jeune délégué des mineurs du Nord, il s'exprime pour la première fois devant ce type d'assemblée, son nom : Maurice Thorez.

 

L'HÔTEL DES POSTES

Il ne fait aucun doute que parmi les bâtisses construites sous le mandat d'Henri Laudier, celle qui lui donnera le plus de mal est bien l'Hôtel des Postes. L'histoire récente de cet immeuble remonte à 1897. A cette époque, la municipalité désirait installer les Postes et les services financiers de l'Etat dans la caserne Condé, ainsi que ses services municipaux. Ceci nécessitait une entente avec le ministère de la Guerre.

Ce projet ne va pas aboutir et finalement, en 1912, une convention est signée entre l'Etat et la Ville pour construire un Hôtel des Postes rue Moyenne (en réalité rue de la Monnaie), et en février 1914 les travaux sont adjugés. La guerre survient et les travaux furent stoppés pour ne reprendre que vers 1919. Par la suite, ce seront des années de palabres, de discussions stériles, d'accords partiels... et c'est ainsi que la construction va durer 12 ans.

L'inauguration de l'Hôtel des Postes se déroulera le 30 juin 1926, pour la clôture de la VIIe Foire Exposition. Le cortège qui avait procédé à la visite de la Foire, avec la présence de M. Drouets, Directeur de la Propriété Industrielle se retrouva Salle du Duc Jean pour un banquet dans le plus pur style de la 3e République. Le Menu de ce banquet préparé par le Berrichon Vatet comprenait :

Les Gondoles à la Condé
Le Saumon de Loire à la Néva
Les Gigots d'Agneau du Berry
Le Chevreuil à la Grand Veneur
Les Poulardes roties au diamant
La Salade de coeur de laitue Charles VII
Les Petits Pois du Jardin à l'étuvée
Entremets
Parfait Agnès Sorel
Gaufres de la Maison de Jacques Coeur
Fruits
Mignardises et friandises

Les vins seront en Carafe, du Sancerre et du Chavignol, puis du Pommard et enfin le banquet se terminait par du Champagne, du café et des liqueurs. Il fallait une sacrée santé à cette époque pour honorer ces banquets.

Après les discours d'usage, le cortège va se reformer et se rendre à pied, au son des vielles et cornemuses, par la rue Mayet-Génetry vers le nouvel Hôtel des Postes. La foule est considérable et les autorités sont reçues par Monsieur Taillemitte, le Directeur départemental des PTT, le receveur des Postes étant Monsieur Sages. Le premier discours de M. Taillemitte est descriptif :

"... Bourges va se doter d'un nouveau monument qui ne déparera pas ses joyaux : la Cathédrale, Jacques Coeur, l'Hôtel Lallemand, la Maison de Cujas.
Aujourd'hui, cet Hôtel des Postes ne sera pas seulement un autre fleuron artistique, mais à un point de vue utilitaire, il remplira le but que doit atteindre un moderne Hôtel des Postes. Il procurera au public toutes les commodités que celui-ci est en droit d'exiger des services postaux, télégraphiques et téléphoniques."

Puis ce fonctionnaire décrit la salle d'attente, spacieuse et bien éclairée, avec les nombreux guichets, il insiste sur le confort pour les employés, et l'utilisation d'outillages neufs. En particulier, il évoque le service téléphonique muni d'un "multiple à batterie centrale".

A l'issue de ce premier discours, c'est Henri Laudier qui prend la parole. Il revient sur les douze dernières années de lutte, mais il remercie le gouvernement pour avoir donné à la ville un monument digne d'elle.
Aujourd'hui encore, le touriste pressé et peu documenté, en passant devant "La Poste de Bourges", est souvent persuadé de se trouver face à un monument datant de la période de Jacques Coeur, c'est à dire du XVe siècle !
 

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