Ces lignes proviennent
des recherches d'un spécialiste Suisse de l'horlogerie,
monsieur Bernard Vuilliomenet, qui a travaillé plusieurs
années sur ce personnage que l'on va découvrir
: Louis Moinet.
Portrait de Louis Moinet
Né à Bourges
Louis Moinet est un inconnu pour tous les
Berruyers.
Ce savant du XVIII ième siècle est né à
Bourges, le 7 décembre 1768.
Son père se nomme François Moinet et sa mère
Anne Thomas, tous deux domestiques, et le tout petit Louis a
été baptisé le même jour à
Bourges, dans la paroisse Notre Dame de Fourchault.
De solides études à
Bourges
Louis Moinet passe ses premières
années d'études au collège de Bourges, il
est spécialement attiré par les arts. C'est pourtant
comme étudiant en droit qu'on le trouve dans une donation
que lui fait sa marraine. Il demeure alors chez elle, avec ses
parents, rue de la Monnaie.
Au collège de Bourges, il se fait
remarquer par une grande facilité et remporte tous les
premiers prix lors des concours. Encore écolier, il a
déjà une passion, l'horlogerie, et passe tout son
temps libre chez un maître-horloger. Un peintre italien
lui sert également de maître de dessin privé.
Par la suite, Louis Moinet, devient étudiant en première
année de droit avec le professeur Trotier en 1785, on
le retrouve plus tard en 1787 en seconde année de droit
avec le professeur Halay, et en troisième année
de droit avec les professeurs Augier et Salé, c'est en
1788.
On note encore son nom à Bourges en 1789 dans une liste
des étudiants en droit.
Il passe donc les 20 premières années
de sa vie à Bourges.
L'Italie, Rome et Florence
Juste avant la Révolution Française,
il fait le voyage d'Italie et il étudie à Rome,
sous Jean Pikler, la gravure en camée. Il reste à
Rome, poursuivant ses études jusqu'en 1793, c'est à
dire pendant 5 ans, il étudie l'architecture, la sculpture
et la peinture. Il fait la connaissance des membres de l'Académie
de France, qui regroupe les plus grands artistes de l'époque.
De Rome, il va à Florence et s'initie à la gravure
artistique de pierres fines, avant de revenir en France.
Retour à Paris
Arrivant de l'étranger, en 1794,
Moinet est considéré comme suspect, il va se sortir
du doute qui le concerne comme d'autres artistes en adhérant
à la Société Populaire et Républicaine
des arts du Louvre
Il semble que Moinet poursuive dans les premières années
de son retour ses études à Paris car il indiquera
s'y être rendu pour augmenter ses connaissance auprès
des plus habiles professeurs.
Et c'est ainsi qu'il est nommé Professeur
à l'Académie des Beaux-Arts, au Louvre. Il devient
membre de plusieurs sociétés savantes et artistiques,
et collabore avec d'éminents artistes, tels l'astronome
Lalande, le bronzier Thomire et Robert-Houdin, l'habile constructeur
d'automates qui est considéré comme " le rénovateur
de l'art magique ".
Retour a Bourges comme professeur
En 1795 sont créées les écoles
centrales et lorsque le représentant du peuple Lakanal
organise l'école centrale du Cher à Bourges, en
mai 1795, Moinet lui fait passer quelques ouvrages afin d'attirer
son attention.
C'est aussi la date de l'inauguration de cette école,
et comme il manque des chaires, Louis Moinet est nommé
professeur à la chaire vacante des Arts de Dessin dans
sa ville natale.
En 1797, Louis Moinet est noté graveur
en pierre et professeur de l'école centrale du département
du Cher, il signe ses uvres " artiste du département
du Cher ". Il se lie avec Sigaud de Fafond.
Il épouse le 10 février 1798,
à Bourges, sa cousine germaine, Catherine Guillemet, le
contrat de mariage qualifie Louis Moinet de professeur de dessin
aux écoles centrales au département du Cher, demeurant
section de Bourbounoux.
Le lieu où va habiter Louis Moinet
à cette période a été retrouvé,
il s'agit des deux immeubles situés au haut de la rue
Moyenne, où se situait l'ex Chambre des Métiers,
jouxtant l'impasse appelé Jeanne d'Arc et qui n'a plus
de nom.
La Haute Horlogerie
C'est donc au départ un artiste,
mais en parallèle, il se livre à l'étude
théorique et pratique de l'horlogerie, cet art qu'il aime
déjà passionnément.
Dès 1800, l'horlogerie réclame
tout son temps. Il passe de longs séjours en Suisse, des
Montagnes du Jura à la Vallée de Joux. Il y rencontre
d'illustres horlogers, dont Jacques-Frédéric Houriet,
et acquiert ses instruments et outils d'horlogerie.
Louis Moinet est reconnu par ses pairs.
Il est nommé Président de la Société
Chronométrique de Paris, qui regroupe certains des plus
grands talents de l'époque, et dont le but est "
le développement et l'encouragement de l'horlogerie, l'une
des plus belles sciences de l'esprit humain ". Dans ce cadre,
il entretient des rapports fréquents avec ses confrères.
Les écoles centrales sont supprimées
et sont remplacées par des lycées, financés
par l'Etat. Celle de Bourges est donc remplacée par un
lycée.
Le couple Moinet-Guillemet semble n'avoir eu qu'un enfant, une
fille, Anaïs, née en 1804 à Bourges. François
Moinet, grand-père et Louis Moinet, père, professeur
de dessin, déclarent la naissance. .
Il habite encore à Bourges en 1811.
L'uvre de Louis Moinet
Louis Moinet collabore étroitement
avec le grand horloger Abraham-Louis Breguet, et ceci durant
de nombreuses années. Il en est l'ami proche, le confident
et conseiller intime. Les deux hommes partagent la même
passion de l'art horloger.
Durant sa vie, Louis Moinet a créé
d'extraordinaires pendules pour les personnages importants de
son temps : Napoléon Bonaparte ; les Présidents
américains Thomas Jefferson et James Monroe ; le Roi d'Angleterre
George IV ; la Reine Marie-Amélie de Bourbon-Siciles ;
le Maréchal Murat, Roi de Naples ; le Maréchal
Ney ainsi que de nombreuses têtes couronnées à
travers l'Europe entière.
Ces
pendules, réalisées en collaboration avec le célèbre
bronzier Thomire, révèlent d'extraordinaires histoires
: pour celle de Thomas Jefferson, signataire de la Déclaration
d'Indépendance, il élabore trois critères
pour la création de son uvre d'art, la beauté,
la durabilité et l'utilité. On peut imaginer que
Jefferson a fort apprécié sa pendule, qui l'a accompagné
durant ses deux mandats à la Maison-Blanche et jusqu'à
la fin de sa vie.
Quant à la pendule Napoléon,
elle a été réalisée en 1806. Equipée
d'un mouvement de huit jours, elle donne les heures, les minutes
et la date. Sa grande originalité lui vient d'un exceptionnel
mécanisme indiquant la phase de lune à l'intérieur
de l'aiguille des jours, et ceci à l'aide d'une minuscule
bille en ivoire. En outre, Napoléon et l'Impératrice
Joséphine se voient couronnés dès que la
boîte à musique est mise en marche. Pour cela, un
ingénieux automatisme vient placer la couronne impériale
sur leurs têtes.
Les inventions de Louis Moinet
En tant que fabricant d'instruments de
précision, Louis Moinet a pratiqué l'horlogerie
marine, astronomique et civile. Ingénieux, il en améliore
la technique, et devient l'auteur de plusieurs perfectionnements
importants.
Le plus important
est bien sûr l'exécution en 1816 de son "compteur
de tierces", qui fait de Louis Moinet l'inventeur du chronographe.
Cette pièce extraordinaire, baptisée "compteur
de tierces" car le mot chronographe n'existait pas encore,
mesure le 60ème de seconde, bat à 216,000 vibrations
heure et est munie d'un retour à zéro. En créant
un objet d'une telle complexité, Louis Moinet se pose
en pionnier de la haute fréquence, avec une avance de
100 ans sur les développements ultérieurs dans
les mêmes domaines.
Les produits de Louis Moinet ont été
exposés lors de deux Expositions Universelles. La première
fois en 1851, à Londres. Fidèle à ses habitudes,
Louis Moinet y présente un chronomètre donnant
plusieurs indications inédites, dont le quantième
annuel et les jours de la semaine. Puis après sa mort,
à Paris, en 1900, où la pendule Napoléon
est exposée lors de cette importante manifestation au
pied de la Tour Eiffel.
L'uvre de Louis Moinet compte également la création
de montres à réveil, de régulateurs et de
montres astronomiques. Inventeur de concepts inédits,
il élabore des mécanismes étonnants.
" Il s'agit par exemple de différents
calibres de montres de poche d'une distribution particulière.
Il invente un ressort de barillet denté qui améliore
la marche de la montre. Un ressort qu'il décrit poétiquement
de couleur " rouge cerise demi-mûre " lorsqu'il
est passé au fourneau. Il met également au point
un nouveau coq, qui facilite le remontage. Fruit d'inlassables
efforts, il établit une construction dont le but est de
mouvoir le piton du spiral pour équilibrer l'échappement,
sans ne devoir rien démonter. Enfin, il fend, arrondi
et termine à la main les rouages de ses horloges marines,
pour en assurer l'exactitude, et selon les principes de calculs
qu'il expose dans son Traité d'Horlogerie".
Amateur d'excellence d'une grande modestie,
l'ambition de Louis Moinet est l'avancement de son Art plutôt
que l'avantage commercial. C'est ainsi qu'il partage librement
ses idées ingénieuses avec les autres horlogers
de l'époque.
Le fameux Traité d'Horlogerie
Louis
Moinet est notamment et enfin célèbre pour son
fameux Traité d'Horlogerie, de 1839, publié en
1848, qui a la réputation d'être le plus beau livre
d'horlogerie de son siècle. Il y décrit les meilleures
techniques horlogères, et a été apprécié
des grands horlogers de l'époque, tels Frodsham, Perrelet,
Saunier et Winnerl, ainsi que de plusieurs savants et amateurs,
comme Son Altesse Alexandre, Prince d'Orange, qui figurent tous
parmi les nombreux souscripteurs. La diffusion de cet ouvrage
réédité à trois reprises s'est étendue
jusqu'à la Russie.
Louis Moinet a consacré vingt ans
de sa vie à la rédaction de cet ouvrage en deux
tomes, qui reste très recherché de nos jours.
Il contient notamment une méthode pratique et universelle
de l'engrenage suivant la science modifiée par l'application.
L'uvre de Louis Moinet a consisté
à animer, à donner la vie à la matière.
Il a été reconnu par ses pairs comme un homme de
cur et d'esprit, né à Bourges en 1768, est
décédé à Paris, le 21 mai 1853, à
l'âge de 85 ans.
Synthèse réalisée
à partir des documents de Bernard Vuilliomenet.
Louis Moinet
âgé
Chronographe
et chronomètre
Le chronographe et le chronomètre
sont tous les deux des outils qui mesurent le temps. Même
si la différence n'est pas toujours évidente à
percevoir, ils possèdent néanmoins des caractéristiques
distinctes.
Le chronomètre
Le chronomètre est une montre extrêmement
précise capable d'indiquer les secondes. Pour qu'une montre
puisse être appelée chronomètre, elle doit
obtenir un certificat du Contrôle officiel suisse des chronomètres
(COSC). Celui-ci teste la montre sur sept critères durant
deux semaines, à 8, 23 et 38 °C, ainsi que dans cinq
positions différentes.
Le chronographe
Il s'agit d'une montre dotée d'un
mécanisme complémentaire qui mesure le temps qui
s'écoule à partir d'un moment donné. Un
chronographe comporte deux systèmes horaires indépendants
: l'un pour donner l'heure ; l'autre pour mesurer les temps courts.
Il indique la durée d'un événement grâce
à l'aiguille de chronographe généralement
située au centre. Rien n'empêche qu'un chronographe
soit également un chronomètre, mais il ne peut
se prévaloir de cette appellation s'il n'a pas obtenu
le certificat officiel.
Une plaque inaugurée le 1
er octobre 2016
Pour honorer ce grand homme, et face
à la timidité de la ville de Bourges et de ses
élus pour lesquels ce retour au passé n'est pas
essentiel, c'est une association suisse, "Les Amis de Louis
Moinet" qui va faire réaliser à ses frais
une plaque à la mémoire de ce grand homme né
à Bourges.
La ville autorisera à mettre cette
plaque sur la façade de l'Ecole des Beaux Arts, et finalement,
une délégation suisse d'une douzaine de personnes
viendra le samedi 1 er octobre 2016 pour dévoiler cette
plaque, en présence d'une élue de la ville, Valérie
Legouhy, de Véronique Fenoll, première vice-présidente
du Conseil départemental et de Jacques Fleury.
Il reste désormais à donner
le nom de Louis Moinet à une rue ou une place dans Bourges,
ce sera le "prochain combat".
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