Marcel Haegelen
Marcel
Émile Haegelen est un " As " français
de la Grande Guerre avant de devenir un des grands pilotes d'essais
de France, pour la firme Hanriot à Bourges.
Marcel Haegelen est né
en 1896, il est pilote en 1916 et devient durant la première
guerre mondiale, un " As " en totalisant au moins 22
victoires.
Dès 1921, il passe au civil, il est attaché à
la " maison Hanriot ". Il n'a que 26 ans, le grade
de capitaine, et devient chef pilote jusqu'à la veille
de la seconde guerre mondiale, faisant la majorité de
sa carrière à Bourges.
Il sera lui aussi un virtuose
de l'avion en s'octroyant par deux fois la Coupe Michelin et
un record du monde de vitesse en 1932.
C'est un homme attachant, un baroudeur mais un grand professionnel.
On disait de lui à cette époque " qu'il était
plus souvent en salopette de pilote qu'en veston, il était
jeune, mais de ceux que l'on appelle Monsieur
".
On lui doit l'implantation
des Etablissements Hanriot à Bourges et c'est lui qui
posera pour la première fois un avion à Bourges
sur le futur terrain d'aviation, en 1928.
Il est reconnu par ses pairs
et dès 1925 il est président de l'Union des Pilotes
Civils de France (UPCF), une charge qu'il occupera pendant 22
ans, jusqu'en 1947.
A Bourges, chez Hanriot administré par Outhenin-Chalandre,
il va mettre au point plus d'une trentaine d'avions prototypes.
Il va échapper à
la mort à plusieurs reprises, que ce soit lors de la Coupe
Michelin en juin 1930 ou au cours de l'année 1938, lors
de deux atterrissages forcés dont un sur la base d'Avord.
Durant le second conflit mondial, il défend l'aéroport
de Bourges, et il abat un avion allemand, sa 23 ème victoire.
Puis il entre dans la Résistance, devenant un spécialiste
du renseignement.
C'était un homme d'énergie,
mais très discret, trop discret sans doute.
Haegelen fera ses études
dans le nouveau lycée Carnot de Dijon situé boulevard
Thiers.
Haegelen obtient, son baccalauréat
à l'âge de 17 ans, quelques semaines avant la déclaration
de la guerre d'Août 1914 entre la France et l'Allemagne.
Dans un journal national de l'entre-deux guerres, il est écrit
qu'il " aurait pu devenir un grand ingénieur, mais
la guerre de 1914 va survenir ".
Haegelen a mis comme profession " représentant en
automobile ", puisqu'il sort de l'école et qu'il
aide son père dans le nouveau garage automobile.
Il part aux armées
et c'est dans ce contexte d'une guerre de mouvement qui se voulait
courte que le tout jeune Marcel arrive au 27 ème RI, Régiment
d'Infanterie à Dijon.
Ainsi Haegelen participe aux célèbres combats de
Saint Mihiel dans la Meuse. Il combat ensuite dans les Hauts
de Meuse et en Woëvre très exactement à Saillant
de Saint-Mihiel. Haegelen ne reste pas très longtemps
sur le front, il se bat dans les tranchées en Artois jusqu'à
ce qu'il soit évacué, gravement malade, il est
atteint de fièvre typhoïde le 10 avril 1915, après
6 mois passés sur le front.
Ainsi, les dates défilent, Marcel Haegelen a 18 ans, il
fait la guerre des tranchées pendant 3 mois, évacué
par la maladie, il se soigne 4 mois et repart au combat, cette
fois en changeant d'arme.
Après le combat dans les tranchées puis la maladie,
le jeune Haegelen demande à être versé dans
l'aviation, il veut devenir pilote d'avions.
Il est effectivement détaché au 1 er Groupe d'aviation
comme élève pilote le 25 juillet 1915 et comme
de très nombreux aspirants-pilotes, il rejoint l'école
de pilotage d'Avord le 31 août 1915
Haegelen
est breveté en quelques mois, puisqu'il a ce brevet de
" Pilote militaire d'avion N° 2309 le 10 janvier 1916
", et quitte Avord quelques jours plus tard, le 19 janvier
1916
Haegelen est nommé caporal le 20 janvier 1916 et un mois
plus tard, le 21 février commence la bataille de Verdun
sur terre et dans les airs.
Il sera donc successivement affecté aux escadrilles :
F 8 - N 103 / SPA 103 - SPA 100.
Avec son brevet de pilote, et une bonne formation, il est affecté
à l'escadrille d'Arcourt lors des grands combats de Verdun
et de Douaumont. Le 30 juin 1916, Haegelen est nommé sergent,
il vole sur plusieurs types d'avions comme le Nieuport puis le
SPAD XIII.
Marcel avec son frère
Dans l'escadrille MF 8, il
exécute des missions de reconnaissance en compagnie de
Georges Carpentier, " En 1916, il est un des plus précieux
photographes de la MF 8 et il se distingue également par
moult missions spéciales ".
Pour passer de l'aviation
d'observation au combat et à la chasse, Haegelen doit
suivre une formation qui est effectué au cours d'un stage
sur avion de chasse qui se déroule à partir du
8 février 1917 d'une durée de 1 mois.
Il arrive dans cette unité
N 103 (SPA 103) le 8 mars 1917 comme pilote aux armées
du Nord, et il est opérationnel le 3 avril 1917, en une
cinquantaine de jours, il n'effectuera pas moins de 60 missions,
c'est à dire plus d'une par jour.
La SPA 103 est une célèbre
escadrille devenue mythique, celle de René Fonck, et Haegelen
restera l'ami de Fonck, que l'on verra beaucoup plus tard à
Bourges lors d'une visite officielle de cet " As des As
", l'homme aux 75 victoires. René Fonck relatera
plus tard comment il sauva Haegelen et Hervet lors d'un combat
aérien.
Un journal communiqué par le Musée de l'Air, évoque
de manière à la fois cavalière et dans le
langage de l'époque cette partie de la vie du jeune homme
: "
Alors Haegelen se sent véritablement à
son affaire, et pour se présenter aux petits camarades
du secteur, il descend trois Boches à la file ".
C'est dans cette escadrille
SPA 103 que Haegelen fait ses premiers combats sur des avions
de chasse et il obtient sa première victoire homologuée
contre un biplace dans les environs de Moronvillers-Nauroy le
27 mai 1917, il n'a pas 20 ans.
On peut donc raisonnablement
penser, et les travaux en cours, de longue haleine, de Michel
Pelliot sur ce sujet sont intéressants sur la réalité
des victoires des aviateurs français dont Marcel Haegelen.
Cette première victoire est-elle un déclic pour
Haegelen, sans doute puisque, dès le lendemain, le 28
mai 1917, il obtient une seconde victoire homologuée contre
un biplace dans les environs de Chenay-Reims, et l'équipage
allemand est fait prisonnier.
Mais ce même jour à la suite du combat qui s'est
terminé par la chute de l'avion ennemi dans les lignes
françaises, il est gravement blessé après
le combat lors d'un accident d'atterrissage aux commandes d'un
SPAD VII. Haegelen en gardera la trace sur son visage toute son
existence :
" Il s'était en effet retrouvé par deux fois
par terre durant cette guerre, et ma mère m'a dit qu'il
avait un morceau de ferraille dans la partie supérieure
de la bouche afin de maintenir le palais. C'est en effet lors
d'un atterrissage qu'il il va recevoir le " manche à
balai " dans le visage et celui-ci va entrer dans le palais.
Il échappe de peu à la mort, puisque les pièces
métalliques ne sont pas loin du cerveau ".
Gravement blessé et doit donc quitter le front, et il
est soigné, bien soigné puisqu'il reçoit
une plaque métallique à l'intérieur de la
bouche et une cicatrice sur la lèvre supérieure
sera définitive.
Il va rester à l'hôpital trois mois, tout l'été
1917, et il est réaffecté après convalescence
à son escadrille n° 103 qu'il rejoint le 21 septembre
1917.
Il est nommé adjudant, le 5 novembre 1917, puis sous-lieutenant
à titre temporaire.
Haegelen dans la SPA 100
Haegelen est affecté
cette fois, sur sa demande à une autre escadrille, la
SPA 100, et il y arrive le 7 février 1918.
Il est alors possible de suivre jour après jour cette
année 1918, de février à novembre, en prenant
en compte les victoires homologuées de Haegelen, de la
troisième victoire à la vingt deuxième,
lesquelles sont répertoriées de manière
très précises :
3 ème victoire homologuée contre un Albatros D
V vers Coucy-le-Château, le 23 mars 1918.
En ce mois de mars 1918, commence
le " grand choc de l'Offensive Allemande " avec des
attaques en Picardie vers Amiens. C'est dans ces combats que
les escadrilles françaises de chasse et de bombardement
vont conquérir la supériorité dans ce secteur
de Picardie, avec une grande souplesse d'emploi et une rapidité
de déplacement. 4 ème victoire homologuée
de Haegelen puis 5 ème victoire homologuée Haegelen,
il est nommé Sous-lieutenant " active " le 28
juin 1918.
Et les victoires se poursuivent jusqu'à la 22 ème
victoire homologuée contre un avion sur l'Aisne, le 23
octobre 1918. Avec ses 22 victoires, Haegelen devient le 6 ième
AS de la Grande Guerre.
Le 11 novembre arrive la guerre est finie.
Pour Michel Pelliot, "
Après une courte pause, il repart au combat en 1919 pour
la Pologne, mais le conflit ne dure pas ". Il est affecté
à l'escadrille SPA 162 envoyée en Pologne pour
faire partie de la Mission Française car une guerre russo-polonaise
commencée 3 mois après l'armistice, en février
1919 et ne se terminera réellement qu'en mars 1921. Pourtant
il reste en Pologne jusqu'en septembre 1920, avant un saut dans
l'aviation commerciale, tout en ayant un pied dans l'armée
il effectue des courtes périodes militaires et cherche
le moyen de voler.
Voler sera jusqu'à la fin de sa vie une de ses préoccupations
continues.
Dès 1921, il passe au civil, et entre dans la " maison
Hanriot ", Il n'a que 26 ans, le grade de capitaine, et
devient chef pilote jusqu'à la veille de la seconde guerre
mondiale, faisant la majorité de sa carrière à
Bourges à partir de 1928.
Haegelen pilote d'essai chez
Hanriot
Le 1 er mai 1922 il entre
officielle ment dans cette firme fondée par René
Hanriot, puis dirigée par son fils Marcel et surtout par
un ingénieur de grande valeur, Hubert Outhenin Challandre,
appelé HOC. Selon certains documents, il aurait commencé
en fait sa carrière dès la fin de l'année
1921, avec à ses côtés, Paul Gibert, dit
" La Volaille ".
Il devient pilote d'essai, avec l'aura de ses victoires 4 ans
plus tôt. Il faut se souvenir que Marcel Hanriot n'a que
2 ans de plus qu'Haegelen, ils devaient peut être se côtoyer,
habitant des régions assez voisines. En 1924 et 1925,
Hanriot s'installe à Carrières-sur-Seine, route
de Bezon, c'est près de Versailles.
A son arrivée chez Hanriot, Haegelen, avec sa notoriété
se spécialise dans les premiers vols des avions de la
firme. Déjà à cette époque, on disait
de lui :
" Il était plus
souvent en salopette de pilote qu'en veston, il était
jeune, mais de ceux que l'on appelle Monsieur ".
Et dans les ateliers, "
on " disait encore de lui :
" C'est un excellent manuvrier, il fera décoller
tous les prototypes de la firme. C'était aussi un bon
vivant et un excellent camarade ". Et d'ajouter " Il
sera aussi connu pour sa façon très personnelle
de passer les nuits dans les villes où il atterrissait
".
Il sera un virtuose de l'avion en s'octroyant par deux fois la
Coupe Michelin et un record du monde de vitesse en 1932. C'est
un homme attachant, un baroudeur mais un grand professionnel.
On disait de lui à cette époque " qu'il était
plus souvent en salopette de pilote qu'en veston, il était
jeune, mais de ceux que l'on appelle Monsieur "
Le HD 17 sous les ponts
de Paris en 1923
En 1923, Marcel Haegelen effectue
le premier vol du HD 17, une version à flotteurs pour
l'aéronavale, ce vol se déroula sur la Seine. Il
fallait en effet vérifier l'efficacité des gouvernes
de queue, et ce jour-là, à la grande frayeur des
techniciens présents, et des curieux, il passera sous
le pont du Nord de Paris. Une fois encore il aura " eu chaud
" puisque le moteur de son HD 17 va s'arrêter une
fois le pont franchi et il va réussir à poser son
hydravion. Il était courant à cette époque
que les grands pilotes se laissent aller à des évolutions
acrobatiques ou spectaculaires, montrer leur adresse ou la manuvre
possible de leur avion.
Haegelen,
est envoyé ensuite au Maroc pour la guerre du Rif, alors
qu'Abdelkrim tient toujours la montagne, Haegelen rentre en France
assez vite, à la fin du mois de novembre 1925. La situation
sur le front en est sans doute la cause, il n'est pas homme à
attendre les événements. Est-ce une fin de contrat
? Ou est-ce la mort de René Hanriot dans ce mois de novembre
?
En 1926, sortie et premier vol du HD 320, un avion d'entraînement,
puis la même année le H 33, le H 35 et le H 38.
En 1927, on trouve le H 43,
un avion de liaison, alors que l'année 1928 est prolixe
dans la firme Hanriot avec le HD 141, HD 28, HD 321H 410, H 431,
puis H 46 Styx, et enfin les H 461 et H 462.
Haegelen a la création
de l'usine Hanriot de Bourges
Il est alors décidé
en 1927 de trouver un lieu d'implantation d'une école
de pilotage civile Hanriot et ce sera à Bourges, près
de la N151: sur l'axe Bourges - Issoudun - Châteauroux,
ce qui sera effectif en juillet 1928.
Il y aura dans cette aventure industrielle qui se poursuit plus
de 80 ans après, de la volonté et de la chance.
Au départ, le maire de Bourges Henri Laudier rencontre
un aviateur de passage à Bourges : c'est Marcel Haegelen.
Ce pilote, venu en Berry, un soir de novembre 1927, est un "
As " reconnu de la Grande Guerre. Il est même le 6ème
" As ", et lui, contrairement à de nombreux
de ses compagnons, il en est revenu. Il travaille depuis 1922
aux établissements Hanriot, une firme spécialisée
dans la fabrication des avions.
C'est une soirée de " bordée " qu'effectue
Haegelen avec quelques amis à l'aéroclub de Bourges,
dont le célèbre et pittoresque Pelletier-Doisy,
appelé familièrement Pivolo. Ce dernier est un
ami d'Haegelen. Il est célèbre par ses raids dont
le Paris - Saïgon - Hanoï, et il est de souche paternelle
berrichonne.
Entre " As " et autres " Vieilles Tiges ",
c'est la grande fraternité de l'air.
Haegelen est dans la région du centre de la France pour
trouver un terrain d'aviation apte à recevoir une école
de pilotage, celle de Hanriot.
Lorsque la firme Hanriot vend des avions, il lui est nécessaire
de former les pilotes des clients dans une école de pilotage.
Comme l'école Hanriot est à Reims, les directives
gouvernementales les incitent à se délocaliser
au sud de la Loire. C'est pourquoi Haegelen, pour le compte des
avions Hanriot, recherche dans le centre du pays un terrain plat
pour implanter son école de pilotage. La rencontre d'Haegelen
en Berry avec les autorités municipales va être
décisive.
Henri Laudier raconte ainsi cette rencontre :
"
Un soir de novembre 1927, nous étions réunis
à l'invitation de l'aéroclub pour fêter une
des plus pures gloires de l'Aviation française, notre
chère Pivolo, quand un autre As se présenta tout
menu, tout simple, tout modeste mais combien grand par la renommée
: Marcel Haegelen ".
Dans les années 1930
L'inauguration de l'aéroport
de Bourges
C'est ce premier jour de juillet 1928 que les Berruyers découvrent
un homme qui est venu pour cette inauguration, il est au milieu
des personnalités, c'est avec Laudier, l'artisan de cet
aéroport de Bourges, car il s'agit bien de Marcel Haegelen.
Et les Berruyers découvrent la " Maison Hanriot ",
le dimanche de juillet, avec l'aéroport de Bourges qui
est inauguré.
En effet, les premiers pas
de l'aviation à Bourges remontent au grand meeting de
1910, qui était resté dans toutes les mémoires
locales, puis l'arrivée des avions à Avord et la
Grande Guerre furent des éléments permettant à
chacun de connaître encore davantage l'aviation.
Ensuite, des meetings, comme celui de 1922 initié par
Henri Hervet après la disparition du prince d'Arenberg.
Pendant plusieurs années, l'activité aéronautique
locale fut entretenue par quelques conférences et manifestations
diverses, mais Bourges n'avait toujours pas de terrain d'aviation
et cela devenait sa hantise.
Et le maire de Bourges de
poursuivre rappelle une fois encore la création de l'Aéroport
:
" Marcel Haegelen, chef pilote de la Maison Hanriot, était
à la recherche d'un terrain pour la création d'une
école de pilotage. En un tournemain, la décision
fut prise, les démarches et pourparler entrepris, et conduits
avec une rapidité jusqu'ici inconnue dans les annales
administratives du Berry. En six mois, tout était terminé
ou à peu près, et l'aérodrome a pu être
inauguré le 1 er juillet 1928 ".
Marcel Haegelen, deviendra
président des pilotes civils de France et organisateur
d'un grand rallye aérien.
Il faut savoir que le premier
avion se posant à Bourges fut celui du général
Girot, piloté ce jour-là 1 er juillet 1928 par
Haegelen qui est donc le premier pilote à s'être
posé à l'aéroport de Bourges.
Le grand pilote de Bourges
Haegelen va être le
grand pilote d'essai de Bourges et ce sont plus de 30 prototypes
qu'il fera décoller pour la première fois.
Le LH 10 et les versions suivantes, le H 43, puis le H 25, et
en 1935 le H 192.
C'est à partir de 1927 qu'Hanriot se lance dans la conception
d'avions biplace pour la liaison, mais aussi pour la formation,
celle des pilotes et celle des observateurs. Ainsi va naître
le H 43, un fuselage circulaire, une structure métallique
et un recouvrement en toile. Le moteur est alors un Salmson CM
9 de 260cv, quant à l'hélice elle est toujours
en bois. A partir de cet avion, d'autres appareils de la famille
seront construits, de 430 à 439 inclus.
Avion des années 1930,
le H 431 ce biplace d'entraînement ou d'instruction, sera
fabriqué à 67 exemplaires, signalons encore le
H 115, en 1933, H 16 en 1934 et ainsi de suite.
C'est à bord de son
avion Lorraine-Hanriot 431, un nouveau modèle conçu
par la firme Hanriot que Marcel Haegelen fait une tournée.
Une revue nord-africaine évoque cette prestation en ces
termes :
" Il a exécuté au-dessus des principales villes
du Maroc, des vols de démonstration, en compagnie de son
sympathique mécano La Volaille ".
Il a ainsi accompli 8000 km
ce qui correspond à plus de 5h de vol, en partant de Bourges
le 18 novembre 1931. Puis il vole vers Angoulême et Toulouse
pour rejoindre Barcelone. La
Vainqueur par deux fois de
la coupe Michelin
Pour la coupe Michelin de
1929-1930, la firme Hanriot se lance dans la fabrication d'un
tout nouvel avion, le LH 41. C'est un monoplan, une révolution
dans cette société, car cet avion avait des airs
de famille avec les célèbres avions américains,
les " racers ".
1930
Haegelen vers 16 heures doit se poser à Reims, sur une
aire en herbe de 1200m sur 850m, balisée réglementairement
en bois, peinte blanc et rouge, délimitant la piste d'atterrissage.
Haegelen va atterrir et l'avion capote à une vitesse de
120km/h du fait de hautes herbes et de chardons dont certains
atteignaient 1,7m.
Pour la 17 ème année de la Coupe Michelin, au printemps
1931, Haegelen, malgré ses graves ennuis de l'année
précédente, décide de courir, et donc de
prendre sa revanche.
Il rentre très exactement à 17h32, il avait volé
sur 2 631km en 11h37mn et 25s, une belle précision, et
la vitesse est alors de 226km/h. Ses concurrents n'ayant pas
fait mieux.
Haegelen remporte la coupe Michelin. Une belle revanche sur ses
déboires de l'année précédente.
Il la remportera à nouveau en 1932 sur un avion Hanriot
LH 42.
Dans ces années, il devient l'organisateur du Tour de
France Aérien en 1931
Il va échapper à la mort à plusieurs reprises,
c'était un homme d'énergie, mais très discret,
trop discret sans doute.
Record de vitesse sur 2000
km en 1932
A 6 heures 26 très
exactement, le 12 août, Haegelen décolle pour un
circuit de 500km d'Etampes, puis Tours, Châteauroux, Mesves-sur-Loire
et retour à Etampes. Un circuit qu'il boucle à
4 reprises pour se poser à 14h 01. Il faut noter que le
parcours initialement prévu, Paris - Toulouse - Paris
avait été abandonné.
Ainsi les 2000km sont réalisés en 7h, 34min, 43s,
c'est à dire à une moyenne de 263,9km/h. Le record
de vitesse des 2000km sans charge, détenu depuis avril
1931 par Paris était battu par Marcel Haegelen.
C'est l'euphorie chez la SGA
et Hanriot, avec " un Marcel Haegelen qui ne cesse d'accumuler
les lauriers ".
1934 : inauguration de l'aérogare
de Bourges
15 juillet 1934, ce fut une
de ces grandes fêtes dont Bourges avait le secret dans
ces années 1930, car cette inauguration de l'aérogare
se déroule en présence du ministre de l'Air, le
général Denain.
Ont été amenés pour cette manifestation
près de 100 avions sur le terrain de Bourges.
La presse rapporte avec des termes élogieux que :
"
Ces avions avaient été amenés
chez nous par l'élite des pilotes nationaux
A côté
d'Haegelen, de Fonck, de Cavalli, d'Arnoux, de Delmotte, de Maryse
Bastié, et de tant d'autres dont les noms ont été
claironnés aux quatre coins du monde par la trompette
de la renommée, nous avons vu venir à nous de toutes
les régions de France des équipages
".
On apprend que Haegelen était
franc maçon, initié le 20 mars 1935 à Paris,
et ce n'était pas dans une loge du Grand Orient de France,
comme cela aurait pu être, mais à la Grande Loge
de France, seconde obédience française de cette
époque. La loge de Paris s'appelle " L'Alliance ",
avec le numéro 70.
Haegelen et le président de la République
Le 18 juin 1938, Henri Laudier
reçoit à Bourges le président de la République
Albert Lebrun, et au cours de la journée il est en première
ligne pour montrer la firme SNCAC, nouvellement nationalisée
et ses nouveaux avions comme le NC 510, ou les bâtiments
nouveaux et quelques avions dont le NC 510, qui permet à
Marcel Haegelen de fournir un certain nombre de renseignements
techniques sur ce nouvel avion. Les accompagnateurs peuvent découvrir
que plusieurs avions sont toujours marqués au sigle "
Hanriot ", alors que les nationalisations sont passées
par là depuis plusieurs mois ! Est-ce un oubli ou une
sorte de provocation, nul ne peut aujourd'hui répondre.
Mais en Berry, il faut souvent une bonne génération
pour adopter les nouvelles dénominations de l'usine de
la rue Le Brix.
Haegelen est à gauche
à côté de l'avion
La guerre de 39/45
La guerre arrive en septembre
1939, et Haegelen, pendant la " drôle de guerre ",
continue à essayer des avions H 230, NC 600, NC 530. Le
dernier étant le NC 600 qui vole pour la première
fois le 15 mai 1940 alors que les troupes allemandes déferlent
sur la France. Il défendra l'aéroport de Bourges
et abattra son 23ème avion allemand avec son Curtiss H75.
A 6 000m, les Polonais effectuent
une première passe frontale sur les He 111 puis attaquent
par l'arrière. Si les Polonais revendiquent 3 victoires
et deux appareils ennemis sérieusement endommagés,
une seule victoire sera homologuée par les autorités
françaises à Kremski en collaboration avec ses
trois équipiers.
Pour sa part, le lieutenant-colonel Haegelen, également
sur Curtiss H75 (accompagné d'un ailier de l'équipe
d'essais dont on ne sait s'il s'agit de Brivot, Nique ou Bertrand),
prend en chasse un Heinkel H 111 et finit par l'abattre entre
Morogues et La Chapelle d'Angillon. Il est indiqué "
ELD/Bourges ".
Blessé à l'épaule,
il doit atterrir en catastrophe à Avord. Son avion a encaissé
14 impacts, comptés par son fidèle mécanicien
" La Volaille ".
Cette victoire est la 23ème de sa carrière, 22
ans après les précédentes. Ils ne seront
que 3 pilotes en France a avoir abattu des avions allemands en
14-18 et en 39-45.
Sculpture de Didier Mori
Dès le 15 décembre
1940, Marcel Haegelen entre dans la Résistance, dans le
réseau de l'Intelligence Service. Il devient un agent
P2 non rétribué du réseau ROY, qui apparaît
parfois sous le nom complet de "réseau ROY MISSION
LENOIR " et il participe à plusieurs missions en
particulier dans le renseignement.
C'est par l'intermédiaire de M. De la Pérelle qu'il
entre dans ce réseau, il en écrit les circonstances
:
" Ayant été le chef d'escadrille d'Haegelen
en 1918, je n'ai pas hésité à m'adresser
à lui quand j'ai eu à faire du renseignement en
1940 et il a fait preuve des mêmes qualités qui
l'ont rendu célèbre ".
Il fournit les plans de la
base d'Avord et de l'aéroport de Bourges qui sont transmis
à la RAF (Royale Air Force), ainsi que l'emplacement des
batteries de DCA, et des renseignements sur l'activité
des terrains régionaux.
Il fit du renseignement sur la préparation des raids,
et aussi sur les fabrications et l'armement des avions allemands.
Il semble même que les premiers bombardements menés
par les américains avec une rare précision en 1944
ont été réalisés à partir
des renseignements fournis et transmis par Haegelen.
Ainsi, alors que les bombardement
au-dessus de certaines usines ou de certaines villes étaient
parfois très approximatifs et occasionnaient de nombreuses
victimes civiles et la destruction d'une partie de la cité,
à Bourges, les renseignements de Haegelen ont sans aucun
doute participé à la sauvegarde de la ville. Les
bombardements prenant en compte des batteries de DCA bien localisées
et les bâtiments et la piste à détruire.
Marcel Hanriot, quant à
lui, fera partie du réseau de résistance JADE et
sera grièvement blessé en août 1944.
On notera que Haegelen est le créateur avec Jean Brivot
du BAC, le Bourges Athlétique Club.
Haegelen arrêté
par la Gestapo
Le document est assez précis
et raconte les circonstances de l'arrestation :
" Lorsque la Gestapo l'a arrêté dans notre
bureau et fouillé ses papiers, elle a trouvé sur
son calepin une inscription sur le voyage de Montrouge le 14/3/43.
Je crois maintenant avec certitude que d'autres personnalités
dirigeantes de notre usine seront arrêtées ".
Le document est assez précis et raconte les circonstances
de l'arrestation :
" Lorsque la Gestapo l'a arrêté dans notre
bureau et fouillé ses papiers, elle a trouvé sur
son calepin une inscription sur le voyage de Montrouge le 14/3/43.
Je crois maintenant avec certitude que d'autres personnalités
dirigeantes de notre usine seront arrêtées ".
Et pourtant Haegelen sera
libéré après un peu plus d'un mois de prison,
le 13 avril 1943. Il est mis au secret à la prison de
Bourges au Bordiot, avant d'être envoyé pour y être
interrogé à Orléans puis à Fresnes
dans la région parisienne.
Avec les preuves et le " petit carnet ", il est certain
qu'il ne pouvait pas s'en sortir.
Il semble bien que sur cette
libération " miraculeuse ", Haegelen soit resté
muet. Il n'en a jamais parlé, sans doute parce qu'il craignait
les mauvaises interprétations.
L'hypothèse la plus
probable, c'est sa position d' " As " de la Grande
Guerre. Nul doute que cet homme était devenu en France
mais aussi en Allemagne un personnage mythique. Il y avait entre
les combattants de la Grande Guerre une sorte de fraternité
des armes et en particuliers dans ces " Chevaliers du ciel
", une situation assez différente que dans les anciens
fantassins des tranchées qui parlaient encore largement
" du Boche " et avaient toujours autant de haine vis
à vis de l'ennemi.
Ainsi, le plus grand "
As " de 1914/18, René Fonck avait lié des
liens " d'amitié " avec des pilotes allemands,
et même avec Goering, qui fut un " AS " Allemand,
aux 22 victoires avant de devenir un des personnages importants
du régime Nazi.
Le journal du Centre du 23 août 1947 appui cette thèse,
sans aucune preuve en écrivant qu'Haegelen " ne devait
sans doute sa libération qu'au manque de preuves et à
sa notoriété
Marcel Haegelen en grand uniforme
de colonel
Voici cette lettre d'Haegelen
avec l'original retrouvé et daté du 20 février
1946 : Il est alors commandant de la base aérienne d'Avord,
et il certifie :
" Ayant été
agent P2 non rétribué des Forces Françaises
combattantes depuis le 15 décembre 1940 ;
J'ai été arrêté par la Gestapo le
15 mars 1943 à 9 h à Bourges.
J'ai pu correspondre après deux jours avec l'extérieur,
grâce à M. Desgeorges, négociant en vins,
60 rue Jean Baffier à Bourges, par l'intermédiaire
du frère Alfred, franciscain infirmier Allemand anti-nazi.
J'au alors pu alerter des amis, être ravitaillé,
et soutenir trois interrogatoires à Bourges, Orléans
et Fresnes, avec le maximum d'information et le meilleur moral.
J'ai pu ainsi échapper, sinon à une exécution
que les boches m'avaient promise par écrit, du moins à
Buchenwald.
A ce moment, M. Desgeorges avait pris les dispositions nécessaires
pour me faire évader avec l'aide du frère Alfred
".
Et la lettre est un plaidoyer
pour Félix Desgeorges puisqu'Haegelen poursuit sa lettre
:
" Le nombre de français qui ont ainsi pu être
soutenus par M. Desgeorges est considérable.
Son activité, au péril de sa vie, s'est exercé
pendant les quatre ans d'occupation au profit des victimes de
la Gestapo et parallèlement comme un vrai résistant
".
Il est d'ailleurs écrit
" qu'à l'issue de son incarcération, le 13
avril 1943, il reprend son activité clandestine avec un
zèle accru jusqu'à la libération du territoire
".
Haegelen libéré reprend ses activités à
l'usine de la SNCAC, devenant sans doute prudent, pendant quelques
mois dans les renseignements à transmettre aux Alliés.
Pourtant on le retrouve dans une fin de guerre difficile continuant
son action de Résistant, en prenant des risques conséquents,
afin de voler des armes aux Allemands et de les remettre aux
Français
Le 25 mai 1950, alors que
l'usine d'avions semble définitivement sauvée de
la faillite, les Berruyers apprennent la mort de Marcel Haegelen.
Il n'était âgé que de 54 ans, et succombait
à l'hôpital du Val-de-Grâce d'une congestion
cérébrale, selon les premières informations,
puis il fut écrit qu'il avait succombé d'une grave
affection hépatite.
En réalité, c'est bien un vaisseau qui a "
claqué " et au Val de Grâce, avec les moyens
de l'époque, il n'a pas été opéré
à temps. Il s'est vu mourir, il avait un côté
paralysé et savait en toute conscience ce qui se passait.
Marcel Haegelen meurt le 24
mai 1950 à 22 heures.
Il s'était marié
à Bourges très tard, le 27 juin 1944 avec Georgette
Boury et il avait eu ensuite 3 enfants alors âgés
de 6, 4 et 2 ans à sa mort.
Le livre sur Marcel Haegelen
de PABB La tombe de Marcel Haegelen.
Ceci est l'ancienne version
Après
3 ouvrages sur l'histoire de l'aéronautique à Bourges,
avec du texte et des photos exclusives, qui font aujourd'hui
autorité sur ce thème local, il a semblé
à l'association PABB de poursuivre avec des points plus
restreints mais plus précis de cette grande histoire locale.
Aussi la vie de Marcel Haegelen, un personnage peu connu, ressemble
à une existence tout à fait originale et remarquable
pour la ville de Bourges et le Berry tout entier. Il y a plus
de 20 ans, Roland Narboux avait travaillé sur cet homme,
et une première publication dans le magazine La Bouinotte
lui avait permis de prendre des contacts avec son épouse
aujourd'hui décédée. En 2009, pour cet ouvrage,
il persévéra et ce fut avec deux des enfants de
Marcel Haegelen, Claude la fille et Emile le fils, que des documents
furent retrouvés, permettant de réaliser une partie
de l'ouvrage.
Marcel Haegelen, jusqu'à la publication
de ce présent livre est essentiellement connu pour avoir
donné son nom à une grande avenue de Bourges. Celle
qui entre dans la cité à partir de l'aéroport
situé sur la RN 151 laquelle vient de Châteauroux
et Saint-Florent, et s'arrête à la hauteur de l'église
Saint-Henri à deux pas du pont d'Auron.
En près de 180 pages, illustrées
de documents et de photos originales, il est désormais
possible de bien cerner cette vie tout à fait extraordinaire
de cet homme, un héros des deux guerres, mais aussi un
humaniste, très apprécié des gens qu'il
côtoyait. Nous savons qu'il reste encore des zones d'ombre
et nous serions heureux de combler ces vides ou de corriger certaines
imprécisions et même inexactitudes, veuillez nous
les signaler.
Par cet ouvrage, Marcel Haegelen revit
et chacun pourra constater qu'il fut un véritable héros
auquel la ville de Bourges doit beaucoup dans deux circonstances
essentielles, pour l'implantation d'une usine d'aviation qui
aura jusqu'à 3000 employés, et pour avoir sans
doute évité la destruction de la ville lors des
bombardements alliés de 1944, par la précision
des renseignements qu'il avait fournis, comme agent de renseignement
pour l'Intelligence Service.
Marcel Émile Haegelen est
un " AS " français de la Grande Guerre avant
de devenir un des grands pilotes d'essais de France, pour la
firme Hanriot à Bourges.
Marcel Haegelen est né en 1896,
il est pilote en 1916 et devient durant la première guerre
mondiale, un " AS " en totalisant au moins 22 victoires.
Dès 1921, il passe au civil, il est attaché à
la " maison Hanriot ". Il n'a que 26 ans, le grade
de capitaine, et devient chef pilote jusqu'à la veille
de la seconde guerre mondiale, faisant la majorité de
sa carrière à Bourges.
Il sera lui aussi un virtuose de l'avion
en s'octroyant par deux fois la Coupe Michelin et un record du
monde de vitesse en 1932.
C'est un homme attachant, un baroudeur mais un grand professionnel.
On disait de lui à cette époque " qu'il était
plus souvent en salopette de pilote qu'en veston, il était
jeune, mais de ceux que l'on appelle Monsieur
".
On lui doit l'implantation des Etablissements
Hanriot à Bourges et c'est lui qui posera pour la première
fois un avion à Bourges sur le futur terrain d'aviation,
en 1928.
Il est reconnu par ses pairs et dès
1925 il est président de l'Union des Pilotes Civils de
France (UPCF), une charge qu'il occupera pendant 22 ans, jusqu'en
1947.
A Bourges, chez Hanriot administré par Outhenin-Chalandre,
il va mettre au point plus d'une trentaine d'avions prototypes.
Il va échapper à la mort
à plusieurs reprises, que ce soit lors de la Coupe Michelin
en juin 1930 ou au cours de l'année 1938, lors de deux
atterrissages forcés dont un sur la base d'Avord. Durant
le second conflit mondial, il défend l'aéroport
de Bourges, et il abat un avion allemand, sa 23 ème victoire.
Puis il entre dans la Résistance, devenant un spécialiste
du renseignement.
C'était un homme d'énergie,
mais très discret, trop discret sans doute.
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