juin 1914 à Bourges
Que s'est-il passé
à Bourges en juin 1914 à quelques semaines de la
déclaration de la Grande Guerre ?
Il y a deux évènements dans la seconde quinzaine
d ejuin qui mérite l'attention, le premier c'est le temps,
car après une grosse vague de chaleur, Bourges se retrouve
en fin de mois sous les orages. Rien de bien exceptionnel.
second événement, dans les Balkans, l'archiduc
François Ferdinand est tuée à Sarajevo sous
les balles d'un Serbe, ce n'est pas bien exceptionnel, car cette
région est une poudrière.
mais nul n'a à l'esprit que ce sera le prétexte
de la Première Guerre mondiale.
car c'est un orage qui commence, mais un vrai.
dans la dépêche
du berry on parle des Foires Jacques Cur avec du Roller-Skating,
qui permet de faire du patin à roulettes, devant les spectateurs
médusés.
Le nouveau pont de l'Abattoir
a été enfin livré aux piétons, cela
faisait 10 mois qu'il était en cours de reconstruction
:
" On ne peut pas faire à notre service voirie le
reproche d'avoir précipité les travaux
.
"
écrit perfidement le journaliste en juin 1914
et
non en 2014 !
Et puis sur la guerre, on
ne trouve pas de titres qui annoncent ou prédisent le
conflit. Il faut aller dans un article repris de la " Gazette
de Cologne ", pour trouver sous la plume de L. Bitschine
les propos suivants :
" Maintenant en pleine forme, prête à la guerre,
et parfaitement outillée pour la lutte économique,
l'Allemagne peut donc parler haut, et elle sait se faire entendre,
cpomme elle est décidée à imposer ses volontés
".
C'est la conclusion d'un article
sur le pangermanisme et les revendications de l'Allemagne qui
est placée au " centre d'une l'Europe en armes et
sans cesse menacée par de vieilles haines et elle doit
donc toujours être en état de tenir victorieusement
tête à ses rivaux coalisés ".
Juillet 1914 à Bourges
Alors que l'attentat de Sarajevo
occupe les pays de l'est que sont la Serbie et l'Autriche- Hongrie,
en France, c'est oublié dans les premiers jours de juillet
1914.
La presse locale évoque surtout l'orage qui s'est abattu
sur le polygone de tir faisant un mort et onze blessés,
tous du 85 ° Régiment d'Infanterie.
Mais ce qui occupe les Berrichons, c'est, sur le plan national
le procès Caillaux et le voyage du Président de
la République du côté de la Russie du Tsar.
Il faudra attendre le 26 juillet pour que l'on trouve un entrefilet
sur " le conflit Austro-Serbe ", sans aucune allusion
à une possibilité d'envenimement de cette guerre
de frontière entre deux Etats lointains.
Et très vite, les journaux font leur première page
sur " la Guerre Austro-Serbe ", pour la première
fois, on parle de guerre.
Mais le dernier jour de juillet 1914, un article a pour titre
" Restons calmes ", et on peut lire " qu'il est
utile de rappeler que ce n'est pas la première fois que
des mesures sont prises
et il ne faut pas que nos compatriotes
s'alarment ou s'affolent, la situation pour être sérieuse,
n'est pas aussi menaçante que certains se l'imaginent
"
On trouve pourtant dans la presse de Bourges de ce mois de juillet
plusieurs articles sur l'armée, dont un sur la couleur
des uniformes et il est dit qu'il faudra au moins 7 ans pour
avoir des uniformes moins voyants, alors qu'un parlementaire
fait le point de l'artillerie des troupes françaises et
des actions produits à Bourges.
Hormis ces information, on suit la distribution des prix des
écoles de la ville, l'organisation très traditionnelle
du 14 juillet avec défilé et feu d'artifice et
enfin le 19 juillet, le prince Pierre d'Arenberg fait l'acquisition
d'une collection d'insectes pour le Muséum de Bourges.
Ainsi, peu voient arriver la guerre, même si à la
fin du mois, quelques syndicalistes organisent des meetings contre
la guerre, avec Hervier.
Août 1914
Les Alliances européennes
et un besoin de suprématie de certaines forces militaires
et un désir de revanche d'autres font qu'après
avoir déclaré la guerre à la Russie, l'Allemagne
déclare 48 heures plus tard la guerre à la France,
le 3 août 1914.
Le lendemain, la Grande-Bretagne entre en guerre aux côtés
de la France et de la Russie en réaction à l'invasion
de la Belgique par l'armée allemande.
La lecture des journaux de
l'époque à Bourges, un siècle plus tard
donne des frissons et une forme d'incompréhension.
La Dépêche du Berry titre le 4 août, "
La Mobilisation à Bourges " et en sous titre "
L'Armée est enthousiaste et croit au succès de
la France ".
La lecture est intéressante sur l'état d'esprit
même si des éléments de censure sont présents.
Ainsi, on lit que :
"
Soudain, un mouvement de foule se produit vers
l'Hôtel des Postes, un télégramme chiffré
vient d'arriver à l'adresse du commandant du 8° corps
d'armée. Au pas de gymnastique, un gendarme et un télégraphiste
le portent en toute hâte à l'officier général.
La foule suit avec une anxiété poignante.
L'ordre de mobilisation est arrivé, dit-on, la guerre
" est déclarée ".
La population reste calme,
" un calme exemplaire " selon la presse locale qui
titre aussi sur " l'enthousiasme militaire ", et de
poursuivre qu'il " ne s'agit pas d'emballement irréfléchi
mais d'une résolution froide et ferme d'accomplir le devoir
sacré ".
Dans les jours qui suivront,
la mobilisation se poursuit, alors qu'en Berry, beaucoup s'interrogent
sur la récolte de blé et d'avoine indispensable
au pays, il faut commencer les travaux le plus tôt possible.
Le maire Paul Commenge le 4 août dans un arrêté,
signe qu'à compter de ce jour, " les cafés
et débits de boissons devront être fermés
à 23 heures ".
Et puis c'est la guerre, et
on trouve des titres surprenants comme le 9 août, "
La Belgique tient l'Allemagne en échec ", car ils
avaient effectivement été ralentis devant Liège,
mais lorsque le titre du 21 devient " La déroute
allemande confirmée " et cette fois " la barbarie
allemande n'a plus de limites ".
Et ce jour, entre deux informations
sur les conflits, on peut lire :
" Malgré la guerre, les phénomènes
de la nature continuent leur marche normale, prévue depuis
des années par les spécialistes ", car il
s'agit d'une éclipse de soleil, totale en Norvège
mais partielle en Europe occidentale. A Bourges l'éclipse
a intéressé nombre de personnes, munis de verres
fumés qui ont examiné les phases, commencées
à 11 heures avec un maximum vers midi et qui s'est terminé
à 2 heures.
Mais à Bourges, la
guerre est géographiquement lointaine, peu de nouvelles,
et peu savent ce qui se passe sur le front très mobile
à ce moment. C'est le 25 août que chacun prend conscience
de ce qu'est la guerre, avec plusieurs convois de blessés
qui passent par la gare et se dirigent vers l'intérieur
du pays. Et puis ce sont des prisonniers allemands qui passent
en gare de Bourges, ils étaient 27 dont un aviateur "
qui affichait nous dit le journaliste présent, une morgue
hautaine et une arrogance peu ordinaire ".
Le 28 août un article
signale que " Les Allemands tirent sur des médecins
militaires ", un épisode qui montre ce début
de conflit
où Alain Fournier va périr !
Et pour la première
fois, ce sont des blessés Berrichons qui arrivent en gare
de Bourges
" les blessés pour la plupart sont
atteints légèrement aux bras et aux jambes . Il
faut en aider d'autres plus gravement atteints, quelques uns
enfin sont inertes sur des civières. "
Les visages mâles sont
parfois voilés d'un peu de souffrance, car " ils
ont vu tomber les boches sous les rafales de notre artillerie
et le feu de nos braves pioupious ".
Le 29 août, au lendemain
du Conseil Municipal, le maire fait un discours d'ouverture :
"
La guerre a été déclarée
au moment où tranquillement vous vous occupiez des travaux
d'embellissement de la Ville de Bourges. La Ville a aussitôt
pris toutes les mesures nécessaires pour parer aux besoins
extraordinaires qui ont surgit de l'état de guerre ".
A noter ce qui sera publié
plus tard, que le 22 août 1914 sera le jour le plus meurtrier
de l'histoire de France. Ce sont 27 000 Français qui sont
tués, un total de pertes sans précédent
dans notre histoire dans la bataille dite des frontières,
et 13 000 soldats allemands.
Ainsi se termine cette première
phase de la guerre de 14,
Septembre 1914 à Bourges
Nous poursuivons jusqu'en
décembre ce que dirent les journaux locaux il y a tout
juste 100 ans, avec les premiers mois de la guerre de 1914 /
1918.
Dans les premiers jours de
septembre, on note que la presse insiste sur l'exode et les milliers
de personnes qui viennent se réfugier loin des lignes
de bataille, c'est aussi le 4 septembre, la réquisition
des chevaux et ce même jour, sans relation entre les deux
événements, le gouvernement quitte Paris pour Bordeaux.
Pas simple de faire croire
que nos soldats avancent et que le gouvernement s'en va à
Bordeaux et les communiqués de guerre envoyés à
la Dépêche du Berry viennent de Bordeaux !
Et puis, c'est la célèbre
bataille de la Marne, celle des taxis de Paris, et la presse
évoque "la grande bataille", et pour la première
fois, la Dépêche du Berry évoque "la
victoire française sur la Marne".
Cet épisode des taxis
de la Mrne est assez symptomatique de la propagande en temps
de guerre. En effet, le général Galliéni
à Paris va réquisitionner des centaines de taxis
parisiens afin de transporter des soldats sur le front. Mais
il faut savoir que dans la zone où ils allèrent,
il y avait 200 000 soldats et les taxis en transporteront 5000
de plus
pas de quoi changer le cours de la guerre.
C'est une grande joie dans
les journaux qui signalent que les troupes françaises
ont gagné 100 kilomètres en 6 jours, et "
après tant de fausses nouvelles, qui avaient secouées
presque chaque jour l'émotion de notre population c'est
avec un mélange qu'elle appris cette fois la réalisation
de ses espoirs ".
Et de terminer par cette phrase
optimiste qui ne se réalisera pas :
" l'avenir pour chacun apparaît comme définitivement
rassurant "
A Bourges, on s'inquiète
sur la rentrée des classes prévue le 1 er octobre
alors que pour la première fois, la censure apparaît,
ce sont des bandeaux blancs à la place du texte.
Un mot sur le 22 septembre
avec la mort d'un écrivain céléèbre
à Bourges où il fit ses études, il s'agit
d'Alain Fournier.
Et les journaux n'en parlent pas car ils ne savent pas. Il faudra
pas mal de temps pour savoir qu'il a disparu et ensuite qu'il
est mort dans la zone de Calonne.
Et puis le temps va passer, on retrouvera son corps après
des années de recherche de Michel Algrain, ce sera en
1991.
Et là commencera une polémique sur les circonstances
de cette mort.
Octobre 1914 à Bourges
Le 1 er octobre ce sont les
communiqués officiels qui sont diffusés et apparaissent
en gros titre dans la journal local.
Ainsi, on peut lire :
" Les attaques allemandes se répètent sans
succès " et ajoute que l'armée française
a fait de nombreux prisonniers. ensuite, le communiqué
donne front par front des indications du genre " l'ennemi
s'est borné à de fortes canonnades ".
Dans la partie locale du journal,
on a un article assez surréaliste ditré ainsi "
Doit-on payer ses contributions ? " et et ce sont des Berruyers
qui payent en plusieurs fois leurs impôts et ils se demandent
si la guerre les dispense de le faire.
Renseignement pris auprès des contributions, il est écrit
que c'est " un devoir patriotique auquel tous les bons citoyens
ne sauraient se soustraire ".
Mais pour être plus conciliant, l'article ajoute qu'aucune
poursuite ne sera momentanément exercée, mais qu'il
faudra s'acquitter de cette dette.
Et puis, Bourges loin du front
s'intéresse aussi à la rentré des classes
qui est prévue le 1 er octobre et l'Inspecteur d'académie
présente un tableau avec les classes qui sont prévues.
On note ainsi que 3 classes seront ouvertes rue Barbès,
et 2 à Fernault et Mirebeau tout comme La Thaumassière
et Beaumont.
Pour l'école primaire il y a les filles et les garçons
avec par exemple pour les filles è classes sont prévues
au Bouillet de midi et demi à16 h 30 y compris le jeudi.
Pour les garçons, 6 classes à Barbès et
7 au Bouillet au total ce sont 6 classes ouvertes et l'horaire
pour les garçons est de 8 h à midi y compris le
jeudi.
C'est parfois dans l'école d'avant la guerre et d'autres
fois dans des locaux proches.
Pour la première fois
dans la Dépêche du Berry, on voit apparaître
de grandes colonnes blanches , et c'est la censure, souvent d'ailleurs
sur des faits nationaux. Alors que les journalistes notent uniquement
la première lettre des lieux où se déroule
le front.
C'est le cas en particulier des citations à l'ordre du
jour dans la rubrique locale.
C'est la liste des morts et
des grands blessés qui va tenir de plus en plus de place.
Les mots les plus courants alors sont héroïsme et
bravoure.
Un décret est promulgué
et il va intéresser les Berrichons, c'est le paiement
des Animaux réquisitionnés, et suit un article
très complexe sur le moyen de se faire payer le mandat
et là, même en temps de guerre, l'administration
est très présente et très tatillonne.
Au milieu du mois d'octobre,
les communiqués officiels sont à l'optimisme, c'est
" la progression générale des Troupes françaises
" avec en gros titre, " Nous prenons l'offensive ".
Et puis dans la dépêche
du Berry, ce titre signé de La Rédaction, "
Mort au champs d'honneur " et l'annonce a été
faite par le maire de Bourges, Paul Commenge : il s'agit de la
mort au champ d'honneur de Jean Elie Foucrier, le fils du directeur
de la Dépêche, Jean Foucrier. L'article est intéressant,
car il montre que ce jeune homme de 20 ans, qui avait fait de
bonnes études au lycée de Bourges et qui travaillait
avec son père était appelé à un grand
avenir dans le journalisme et l'imprimerie.
Il est écrit " l'affreuse guerre a détruit
tout cela et jeté par terre les plus beaux et les plus
riants projets, qui disparaissent à la veille de se réaliser
".
Ainsi se déroule cette
guerre qui n'en est qu'à ses débuts.
Et puis à Bourges le sport est encore présent,
c'est un match de l'USB, Union Sportive du Berry qui joue un
match au profit de la Croix Rouge, tout comme l'équipe
du 5° génie qui s'oppose à une équipe
de Vierzon.
A suivre