Roland Narboux - Les souterrains de Bourges - Bourges Encyclopedie

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LES SOUTERRAINS DE BOURGES
Par Roland NARBOUX

Bourges est une ville qui possède en son centre les plus beaux souterrains de France, un réseau remarquable. >>>IMAGES ET PHOTOS

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Version 2009

 

Les études relatives à la ville de Bourges sont peu nombreuses, et en ce début de troisième millénaire, il peut paraître étrange que les "auteurs" locaux soient aussi peu curieux sur les différentes facettes de leur ville. Le peu d'ouvrages disponibles sur le chef d'œuvre qu'est la Cathédrale Saint-Etienne ne cesse d'interpeller beaucoup de Berruyers et de visiteurs.
Des sujets comme le monde souterrain de la ville de Bourges peuvent permettre de donner à chacun le désir d'en savoir plus sur cette ville magnifique. Et puis, le monde souterrain est fascinant. Il suffit de voir la forte demande pour les conférences qui traitent ce thème, pour les visites du Bourges souterrain comme les caves du Palais Jacques Cœur. Bourges est une ville qui possède des souterrains, mais quelle est la part de la légende, du fantasme et la réalité ?
Lorsque l'on découvre que Bourges est "truffée" de caves, de carrières et de souterrains, ce n'est pas une légende, mais une réalité, on reprend conscience de la qualité de cette ville moyenne, beaucoup plus mystérieuse que ne le croient les habitants.

Les recherches historiques à Bourges

Le sujet a été peu ou pas traité. Le plus vieux document historique connu, hormis les phrases de César, est celui de Cathérinot, intitulé "Bourges souterrain", il date du XVII ème siècle.
Au siècle dernier, deux personnalités locales de grande valeur ont abordé le sujet : Jules Dumoutet et Paul Adrien Bourdaloue. Ce dernier qui fut le premier homme à tracer des lignes géodésiques a beaucoup travaillé sur la fontaine monumentale. Autre érudit local, Buhot de Kersers qui a tant parlé de tout, n'évoque qu'en quelques lignes l'existence de souterrains dans le centre-ville. Au cours de ces dernières décennies, les spécialistes se sont davantage tournés vers la recherche du monde gallo-romain que l'on a peu à peu découvert.
Récemment, Jacques Lamy puis Philippe Goldman ont écrit des articles sur les souterrains de la vieille ville. De son côté, Jacques Lelièvre, pendant une dizaine d'années "a fait découvrir à Amis et Public une dizaine de caves ou sous-sols", et puis, lui aussi a abandonné.
Cela fait peu pour un sujet passionnant, mystérieux et qui, en plus laisse une part au rêve. Aujourd'hui, il n'y a pas d'étude globale des souterrains de Bourges ou du Cher.

Classification des lieux souterrains de Bourges

Il y a plusieurs types d'éléments souterrains et de cavités souterraines à Bourges, et il n'est pas inutile de chercher à les classifier, ne serait ce que pour savoir de quoi chacun parle et éviter certaines ambiguïté regrettables. En effet, il ne faut pas confondre une cave et une galerie souterraine.
A Bourges, le monde souterrain comprend de véritables constructions, parfois très élaborées, ce qui permet d'avancer une première classification de ces lieux souterrains qui comprennent :
- des monuments devenus souterrains par la construction superposées d'édifices au cours des siècles, c'est l'exemple de la célèbre fontaine monumentale.
- des caves appartenant à des particuliers ou se situant sous des locaux publiques et pouvant être sur plusieurs étages. (elles sont à 3 à 6 mètres sous le sol)
- des souterrains, sous forme de galeries allant dans des directions bien définies. (ils sont à 8 ou parfois 12 mètres sous le sol).
Ces souterrains sont l'oeuvre de l'homme, ce sont des ouvrages très bien construits. A Bourges, ils sont d'un magnifique fini, d'une grande qualité de construction en pierre de taille, avec les mêmes conceptions que les édifices principaux de la ville que sont la cathédrale ou le palais Jacques Coeur.
On trouve aussi, en périphérie de la ville, tout en restant sur la commune, des éléments souterrains moins connus, ce sont des cavités creusées par l'homme, sans grand soin, avec pour unique but de récupérer de la pierre de taille, des grottes ou des carrières, oeuvre de l'homme à Bourges mais répondant à des objectifs différents, plus utilitaires.
On trouve ces grottes vers l'avenue de Dun. Elles sont connues, parfois dangereuses, elles ne présentent pas un grand intérêt sur le plan historique, à moins de trouver au fond de l'une d'entre elle le trésor des Templiers ou le butin d'un hold up à la traction avant. Pourtant ces souterrains font l'objet d'une attention particulière, car c'est le lieu d'hibernation de nombreuses colonies de chauves-souris.

La légende des souterrains

Les souterrains depuis toujours font l'objet de légendes et de fantasmes. C'est le cas des souterrains qui vont de Bourges à Sancerre ou de Mehun-Sur-Yèvres à Bois-sir-Amé. Ils sont peut être réels, mais on en a jamais trouvé de traces. L'origine de ce qui est sans doute une belle légende vient aussi de la présence dans de nombreuses campagnes berrichonnes de galeries qui ne sont rien de moins que les aqueducs gallo-romains, lesquels passaient parfois sous terre. Mais la livraison des vins de Sancerre directement au Palais Jacques Coeur de Bourges tient du mythe.
La cave ou le souterrain, c'est un lieu de refuge, un entrepôt à provisions, ou une cache des trésors. Les plus imaginatifs envisagent des salles de réunions secrètes, peut-être même des laboratoires pour les alchimistes. Enfin, ce sont sans doute, dans de nombreux cas des issues dérobées. La question généralement posée "à quoi servaient-ils" est courante. Sans dévoiler les conclusions d'un prochain ouvrage sur le sujet, qui répond à cette question, on peut affirmer qu'au cours de deux millénaires, la destination de ces ouvrages a été variable. Ce furent des lieux d'extraction de pierres à certains moments, ou des refuges contre les bombardements aériens plus récemment. Mais ce n'est que par l'étude souterrain par souterrain qu'il est possible d'aller plus loin dans les explications et les théories sur ce sujet.

Trouver des souterrains à Bourges

Les caves et les souterrains de Bourges, sont dans toute la ville, aussi bien sous des maisons particulières que sous des hôtels importants comme celui des frères Lallemant. A titre d'exemple, on en trouve :
sous l'immeuble des Etablissements Aubrun. Ce sont des galeries maçonnées qui permettent d'aller sous la rue et sur plusieurs dizaines de mètres, c'est une promenade curieuse, avec des conduits bouchés ou parfois des pièces qui devaient servir à entreposer des marchandises…. Ou des trésors selon votre imagination.
sous la rue Coursarlon ou celle de la Monnaie, plusieurs souterrains situés à une profondeur de 8 à 12 mètres ont été répertoriés en 1939, par les services municipaux afin de faire l'inventaire des lieux de protections contre les attaques aériennes.

Arche sous la place Etienne Dolet

Sous la rue Porte Jaune, rue Bourbonnoux ou rue Joyeuse, se trouvent une imbrication de galeries, les plus extraordinaires qui puissent être vues à Bourges.
sous le Palais Jacques Cœur, les seuls qui se visitent, c'est une descente dans les caves du Palais, vastes et belles, puis, un étage plus bas, vers des galeries souterraines sur plusieurs dizaines de mètres.
Et bien entendu sous la place de la cathédrale, les plus beaux, ils ont pris le nom de saint Guillaume. Ces galeries sont d'une architecture rare datant de l'époque de la construction de la cathédrale, on pourrait s'y promener en costume cravate.
Ces galeries sont nombreuses et il est possible de penser qu'elles étaient reliées les unes aux autres, ce qui permettait d'aller ainsi, sous terre, dans tous les secteurs de la ville. Il s'agit d'une théorie qui n'a pas été démontrée à ce jour. S'agissait-il d'un réseau à l'intérieur de la ville reliant les différents quartiers de la ville ? Nul ne peut encore l'affirmer. Il existe de nombreux puits d'aération ce qui prouve la qualité de ces lieux pour stocker des marchandises de valeur ou pour accueillir des hommes….
La sécurité dans les carrières et souterrains est un point fondamental, cela explique que le public ne puisse y accéder. A Bourges intra-muros, il ne semble pas qu'il y ait eu d'effondrements importants. Les seules traces visibles encore aujourd'hui concernent les carrières de la route de Dun. D'importants effondrements sont visibles et dangereux.

Que dit le sieur Cathérinot en 1695 ?

"Bourges souterrain", de ce que l'on en sache, est une locution qui se retrouve dans les ouvrages de Cathérinot, il écrit cette phrase :


" Cette ville est creuse comme un clapier et suspendue sur des caves comme Thèbes en Egypte et Chartres en France ".


Dans son ouvrage, Bourges Souterrain, Cathérinot se fonde essentiellement sur des constats de personnes qui ont fait construire leur maison et dans les trous ainsi réalisés, différents éléments anciens ont été découverts.
Ce sont beaucoup de pièces de monnaies gallo-romaines, de carreaux de faïence, ou encore de sculptures. Le document est intéressant, car il évoque aussi la découverte en 1660 d'un trésor de "quelques cents pièces d'or, qui avaient cours en 1450". Il parle de ce qu'il connaît puisque l'on retrouve cette phrase : "L'Hôtel de la Haye, à présent de Champroy, rue de Montchevry est en partie soutenue de cave sur cave. C'est la maison où je demeure".
Il insiste aussi sur les restes de colonnes cannelées de l'époque gallo-romaine, et donne une intéressante théorie pour les caves situées le long du rempart. Cathérinot écrit " les rues de Narette, Paradis et Jacques Cœur , sont bordées de logis du côté des anciens murs. Mais les caves de ces logis pourraient servir de Greniers à ceux qui font bâtir dans les anciens fossés rue de Bourbon, de Mirebeau et des Arènes". Ainsi les caves des uns pouvaient être les greniers des autres !

Visite guidée du souterrain Saint Guillaume.

Il faut descendre dans les caves du palais des archevêques. Sur la gauche, au fond de la salle une descente assez profonde comportant une trentaine de marches de béton qui vous emmène dans une série de caves voûtées comme on en rencontre dans le vieux Bourges.
Après le franchissement de deux portes voûtées, n'oubliez pas de tourner à gauche, si vous allez tout droit, vous allez vous perdre dans d'autres caves. Alors, suivez le guide !
Dans une cave très sombre, se trouve un nouvel escalier. Cette fois il faut descendre des marches en béton, avancer sur un palier et à nouveau descendre une vingtaine de marches.
Vous êtes à l'entrée d'un souterrain de 28 mètres de long recouvert de parpaing, la hauteur est de 1,9 mètres pour une largeur de 1,3 mètres, de quoi bien passer en file indienne.
C'est ensuite un angle à 90 ° et c'est bien ici que commence le véritable souterrain Saint Guillaume, le béton laisse alors la place à de magnifiques galeries de pierre.
La première galerie Saint Guillaume fait d'abord 22 mètres de long, il y a 5 ogives de plein cintre situées de manière régulière. La distance entre chaque voûte est de 4 mètres. A l'entrée, sur la gauche, une niche voûtée. Chaque voûte est de bonne qualité, les pierres sont chanfreinées.
Au fond de la galerie, à droite, une petite pièce carrée, elle devait comporter une porte puisque les passages de gonds existent encore. Salle du trésor ou garde manger ?.
Il faut tourner à gauche presque à 90 °, un peu moins.
Alternativement des voûtes et des galeries importantes sont visibles à droite comme à gauche. Sur la droite une galerie obstruée semble remonter, elle est aussi voûtée. C'est à cet endroit que fut creusée une galerie pour la défense passive qui rejoint le jardin de l'archevêché.
En poursuivant dans ce souterrain, en direction du Nord, donc de la cathédrale, on observe que le parcours ne se fait pas en ligne droite, mais oblique parfois. En plusieurs endroits, une voûte de plein cintre, alternativement à gauche et à droite, mais de profondeur inégale, parfois de plusieurs mètres de profondeur. Après une première ligne droite, on oblique légèrement à droite pour se trouver sous un carrefour formé d'arc doubleaux en plein cintre, avec des croisées d'ogives tout à fait remarquable. Nous sommes alors à 12 mètres sous terre.
Sur la droite, un escalier remonte de manière assez abrupte. Il est sur les plans de Bourdaloue et il va vers la cathédrale, dans la tour dite Saint Guillaume. Cette tour permet de monter dans les triforium et descendre dans les souterrains. Par contre, en haut des escaliers, des pierres obstruent l'endroit et ne permet plus d'entrer dans la cathédrale.
Les voûtes, aussi bien des arcs doubleaux que des arcs cintrés ne sont pas en très bon état sur le plan de la solidité.
En voulant aller tout droit après ce carrefour, alors que nous ne sommes qu'à quelques mètres des fondations de la cathédrale, des galeries se poursuivent sur la gauche sur plusieurs mètres, mais c'est assez dangereux, et il faut ramper sur le sol avant de retrouver une hauteur convenable.
Il y a gauche une galerie semblable aux autres sur quelques mères, puis fermée.
C'est donc un véritable carrefour qui est situé en ce lieu.
La visite s'arrête à cet endroit……..

Conclusion provisoire :

J'ai répertorié plus de 50 souterrains dans Bourges, et hormis dans certains lieux, il n'existe pas de trace d'un réseau organisé, même s'ils sont tous situés à une même profondeur. C'est un monde merveilleux et envoûtant par le mystère et la qualité des constructions de ces galeries.
Souhaitons qu'un jour, certains de ces édifices puissent s'ouvrir au public.


En octobre 2005, le livre "Bourges Mystérieux" a été réédité aux éditions Royer, dans cet ouvrage vous retrouverez tout sur les souterrains de Bourges.

Il est disponible chez l'auteur, nous contacter >>>Cliquer ici


Complément sur le souterrain de la rue Joyeuse d'Isabelle Renault :

Pour Isabelle Renault,

" Le sous-sol de Bourges est un véritable gruyère, il est constitué d'une succession de bancs d'argile et de bancs de calcaire, c'est un vrai millefeuille.

C'est à partir de la construction du rempart de Philippe Auguste que la ville s'est refermée incluant les faubourgs. On a alors creusé des carrières pour en extraire de la pierre nécessaire à la construction des maisons.

Les caves ont été utilisées jusque vers le XVII ième siècle".

Et sous les caves, il y a un autre niveau en dessous, et cela peut aller jusqu'à 10 à 15 mètres sous la rue. 

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