Les études relatives à la ville de
Bourges sont peu nombreuses, et en ce début de troisième
millénaire, il peut paraître étrange que
les "auteurs" locaux soient aussi peu curieux sur les
différentes facettes de leur ville. Le peu d'ouvrages
disponibles sur le chef d'uvre qu'est la Cathédrale
Saint-Etienne ne cesse d'interpeller beaucoup de Berruyers et
de visiteurs.
Des sujets comme le monde souterrain de la ville de Bourges peuvent
permettre de donner à chacun le désir d'en savoir
plus sur cette ville magnifique. Et puis, le monde souterrain
est fascinant. Il suffit de voir la forte demande pour les conférences
qui traitent ce thème, pour les visites du Bourges souterrain
comme les caves du Palais Jacques Cur. Bourges est une
ville qui possède des souterrains, mais quelle est la
part de la légende, du fantasme et la réalité
?
Lorsque l'on découvre que Bourges est "truffée"
de caves, de carrières et de souterrains, ce n'est pas
une légende, mais une réalité, on reprend
conscience de la qualité de cette ville moyenne, beaucoup
plus mystérieuse que ne le croient les habitants.
Les recherches
historiques à Bourges
Le sujet a été peu ou pas
traité. Le plus vieux document historique connu, hormis
les phrases de César, est celui de Cathérinot,
intitulé "Bourges souterrain",
il date du XVII ème siècle.
Au siècle dernier, deux personnalités locales de
grande valeur ont abordé le sujet : Jules Dumoutet et
Paul Adrien Bourdaloue. Ce dernier qui fut le premier homme à
tracer des lignes géodésiques a beaucoup travaillé
sur la fontaine monumentale. Autre érudit local, Buhot
de Kersers qui a tant parlé de tout, n'évoque qu'en
quelques lignes l'existence de souterrains dans le centre-ville.
Au cours de ces dernières décennies, les spécialistes
se sont davantage tournés vers la recherche du monde gallo-romain
que l'on a peu à peu découvert.
Récemment, Jacques Lamy puis Philippe Goldman ont écrit
des articles sur les souterrains de la vieille ville. De son
côté, Jacques Lelièvre, pendant une dizaine
d'années "a fait découvrir à Amis
et Public une dizaine de caves ou sous-sols", et puis,
lui aussi a abandonné.
Cela fait peu pour un sujet passionnant, mystérieux et
qui, en plus laisse une part au rêve. Aujourd'hui, il n'y
a pas d'étude globale des souterrains de Bourges ou du
Cher.
Classification
des lieux souterrains de Bourges
Il y a plusieurs types d'éléments
souterrains et de cavités souterraines à Bourges,
et il n'est pas inutile de chercher à les classifier,
ne serait ce que pour savoir de quoi chacun parle et éviter
certaines ambiguïté regrettables. En effet, il ne
faut pas confondre une cave et une galerie souterraine.
A Bourges, le monde souterrain comprend de véritables
constructions, parfois très élaborées, ce
qui permet d'avancer une première classification de ces
lieux souterrains qui comprennent :
- des monuments devenus souterrains par la construction superposées
d'édifices au cours des siècles, c'est l'exemple
de la célèbre fontaine monumentale.
- des caves appartenant à des particuliers ou se situant
sous des locaux publiques et pouvant être sur plusieurs
étages. (elles sont à 3 à 6 mètres
sous le sol)
- des souterrains, sous forme de galeries allant dans des directions
bien définies. (ils sont à 8 ou parfois 12 mètres
sous le sol).
Ces souterrains sont l'oeuvre de l'homme, ce sont des ouvrages
très bien construits. A Bourges, ils sont d'un magnifique
fini, d'une grande qualité de construction en pierre de
taille, avec les mêmes conceptions que les édifices
principaux de la ville que sont la cathédrale ou le palais
Jacques Coeur.
On trouve aussi, en périphérie de la ville, tout
en restant sur la commune, des éléments souterrains
moins connus, ce sont des cavités creusées par
l'homme, sans grand soin, avec pour unique but de récupérer
de la pierre de taille, des grottes ou des carrières,
oeuvre de l'homme à Bourges mais répondant à
des objectifs différents, plus utilitaires.
On trouve ces grottes vers l'avenue de Dun. Elles sont connues,
parfois dangereuses, elles ne présentent pas un grand
intérêt sur le plan historique, à moins de
trouver au fond de l'une d'entre elle le trésor des Templiers
ou le butin d'un hold up à la traction avant. Pourtant
ces souterrains font l'objet d'une attention particulière,
car c'est le lieu d'hibernation de nombreuses colonies de chauves-souris.
La légende
des souterrains
Les souterrains depuis toujours font l'objet
de légendes et de fantasmes. C'est le cas des souterrains
qui vont de Bourges à Sancerre ou de Mehun-Sur-Yèvres
à Bois-sir-Amé. Ils sont peut être réels,
mais on en a jamais trouvé de traces. L'origine de ce
qui est sans doute une belle légende vient aussi de la
présence dans de nombreuses campagnes berrichonnes de
galeries qui ne sont rien de moins que les aqueducs gallo-romains,
lesquels passaient parfois sous terre. Mais la livraison des
vins de Sancerre directement au Palais Jacques Coeur de Bourges
tient du mythe.
La cave ou le souterrain, c'est un lieu de refuge, un entrepôt
à provisions, ou une cache des trésors. Les plus
imaginatifs envisagent des salles de réunions secrètes,
peut-être même des laboratoires pour les alchimistes.
Enfin, ce sont sans doute, dans de nombreux cas des issues dérobées.
La question généralement posée "à
quoi servaient-ils" est courante. Sans dévoiler les
conclusions d'un prochain ouvrage sur le sujet, qui répond
à cette question, on peut affirmer qu'au cours de deux
millénaires, la destination de ces ouvrages a été
variable. Ce furent des lieux d'extraction de pierres à
certains moments, ou des refuges contre les bombardements aériens
plus récemment. Mais ce n'est que par l'étude souterrain
par souterrain qu'il est possible d'aller plus loin dans les
explications et les théories sur ce sujet.
Trouver
des souterrains à Bourges
Les caves et les souterrains de Bourges,
sont dans toute la ville, aussi bien sous des maisons particulières
que sous des hôtels importants comme celui des frères
Lallemant. A titre d'exemple, on en trouve :
sous l'immeuble des Etablissements Aubrun. Ce sont des galeries
maçonnées qui permettent d'aller sous la rue et
sur plusieurs dizaines de mètres, c'est une promenade
curieuse, avec des conduits bouchés ou parfois des pièces
qui devaient servir à entreposer des marchandises
.
Ou des trésors selon votre imagination.
sous la rue Coursarlon ou celle de la Monnaie, plusieurs souterrains
situés à une profondeur de 8 à 12 mètres
ont été répertoriés en 1939, par
les services municipaux afin de faire l'inventaire des lieux
de protections contre les attaques aériennes.
Arche sous la place Etienne
Dolet
Sous la rue Porte Jaune, rue Bourbonnoux
ou rue Joyeuse, se trouvent une imbrication de galeries, les
plus extraordinaires qui puissent être vues à Bourges.
sous le Palais Jacques Cur, les seuls qui se visitent,
c'est une descente dans les caves du Palais, vastes et belles,
puis, un étage plus bas, vers des galeries souterraines
sur plusieurs dizaines de mètres.
Et bien entendu sous la place de la cathédrale, les plus
beaux, ils ont pris le nom de saint Guillaume. Ces galeries sont
d'une architecture rare datant de l'époque de la construction
de la cathédrale, on pourrait s'y promener en costume
cravate.
Ces galeries sont nombreuses et il est possible de penser qu'elles
étaient reliées les unes aux autres, ce qui permettait
d'aller ainsi, sous terre, dans tous les secteurs de la ville.
Il s'agit d'une théorie qui n'a pas été
démontrée à ce jour. S'agissait-il d'un
réseau à l'intérieur de la ville reliant
les différents quartiers de la ville ? Nul ne peut encore
l'affirmer. Il existe de nombreux puits d'aération ce
qui prouve la qualité de ces lieux pour stocker des marchandises
de valeur ou pour accueillir des hommes
.
La sécurité dans les carrières et souterrains
est un point fondamental, cela explique que le public ne puisse
y accéder. A Bourges intra-muros, il ne semble pas qu'il
y ait eu d'effondrements importants. Les seules traces visibles
encore aujourd'hui concernent les carrières de la route
de Dun. D'importants effondrements sont visibles et dangereux.
Que dit
le sieur Cathérinot en 1695 ?
"Bourges souterrain", de ce que l'on en sache, est une locution qui
se retrouve dans les ouvrages de Cathérinot, il écrit
cette phrase :
" Cette
ville est creuse comme un clapier et suspendue sur des caves
comme Thèbes en Egypte et Chartres en France ".
Dans son ouvrage, Bourges Souterrain, Cathérinot se fonde
essentiellement sur des constats de personnes qui ont fait construire
leur maison et dans les trous ainsi réalisés, différents
éléments anciens ont été découverts.
Ce sont beaucoup de pièces de monnaies gallo-romaines,
de carreaux de faïence, ou encore de sculptures. Le document
est intéressant, car il évoque aussi la découverte
en 1660 d'un trésor de "quelques cents pièces
d'or, qui avaient cours en 1450". Il parle de ce qu'il connaît
puisque l'on retrouve cette phrase : "L'Hôtel de la
Haye, à présent de Champroy, rue de Montchevry
est en partie soutenue de cave sur cave. C'est la maison où
je demeure".
Il insiste aussi sur les restes de colonnes cannelées
de l'époque gallo-romaine, et donne une intéressante
théorie pour les caves situées le long du rempart.
Cathérinot écrit " les rues de Narette, Paradis
et Jacques Cur , sont bordées de logis du côté
des anciens murs. Mais les caves de ces logis pourraient servir
de Greniers à ceux qui font bâtir dans les anciens
fossés rue de Bourbon, de Mirebeau et des Arènes".
Ainsi les caves des uns pouvaient être les greniers des
autres !
Visite
guidée du souterrain Saint Guillaume.
Il faut descendre dans les caves du palais
des archevêques. Sur la gauche, au fond de la salle une
descente assez profonde comportant une trentaine de marches de
béton qui vous emmène dans une série de
caves voûtées comme on en rencontre dans le vieux
Bourges.
Après le franchissement de deux portes voûtées,
n'oubliez pas de tourner à gauche, si vous allez tout
droit, vous allez vous perdre dans d'autres caves. Alors, suivez
le guide !
Dans une cave très sombre, se trouve un nouvel escalier.
Cette fois il faut descendre des marches en béton, avancer
sur un palier et à nouveau descendre une vingtaine de
marches.
Vous êtes à l'entrée d'un souterrain de 28
mètres de long recouvert de parpaing, la hauteur est de
1,9 mètres pour une largeur de 1,3 mètres, de quoi
bien passer en file indienne.
C'est ensuite un angle à 90 ° et c'est bien ici que
commence le véritable souterrain Saint Guillaume, le béton
laisse alors la place à de magnifiques galeries de pierre.
La première galerie Saint Guillaume fait d'abord 22 mètres
de long, il y a 5 ogives de plein cintre situées de manière
régulière. La distance entre chaque voûte
est de 4 mètres. A l'entrée, sur la gauche, une
niche voûtée. Chaque voûte est de bonne qualité,
les pierres sont chanfreinées.
Au fond de la galerie, à droite, une petite pièce
carrée, elle devait comporter une porte puisque les passages
de gonds existent encore. Salle du trésor ou garde manger
?.
Il faut tourner à gauche presque à 90 °, un
peu moins.
Alternativement des voûtes et des galeries importantes
sont visibles à droite comme à gauche. Sur la droite
une galerie obstruée semble remonter, elle est aussi voûtée.
C'est à cet endroit que fut creusée une galerie
pour la défense passive qui rejoint le jardin de l'archevêché.
En poursuivant dans ce souterrain, en direction du Nord, donc
de la cathédrale, on observe que le parcours ne se fait
pas en ligne droite, mais oblique parfois. En plusieurs endroits,
une voûte de plein cintre, alternativement à gauche
et à droite, mais de profondeur inégale, parfois
de plusieurs mètres de profondeur. Après une première
ligne droite, on oblique légèrement à droite
pour se trouver sous un carrefour formé d'arc doubleaux
en plein cintre, avec des croisées d'ogives tout à
fait remarquable. Nous sommes alors à 12 mètres
sous terre.
Sur la droite, un escalier remonte de manière assez abrupte.
Il est sur les plans de Bourdaloue et il va vers la cathédrale,
dans la tour dite Saint Guillaume. Cette tour permet de monter
dans les triforium et descendre dans les souterrains. Par contre,
en haut des escaliers, des pierres obstruent l'endroit et ne
permet plus d'entrer dans la cathédrale.
Les voûtes, aussi bien des arcs doubleaux que des arcs
cintrés ne sont pas en très bon état sur
le plan de la solidité.
En voulant aller tout droit après ce carrefour, alors
que nous ne sommes qu'à quelques mètres des fondations
de la cathédrale, des galeries se poursuivent sur la gauche
sur plusieurs mètres, mais c'est assez dangereux, et il
faut ramper sur le sol avant de retrouver une hauteur convenable.
Il y a gauche une galerie semblable aux autres sur quelques mères,
puis fermée.
C'est donc un véritable carrefour qui est situé
en ce lieu.
La visite s'arrête à cet endroit
..
Conclusion
provisoire :
J'ai répertorié plus de 50
souterrains dans Bourges, et hormis dans certains lieux, il n'existe
pas de trace d'un réseau organisé, même s'ils
sont tous situés à une même profondeur. C'est
un monde merveilleux et envoûtant par le mystère
et la qualité des constructions de ces galeries.
Souhaitons qu'un jour, certains de ces édifices puissent
s'ouvrir au public.
En octobre 2005, le livre "Bourges
Mystérieux" a été réédité
aux éditions Royer, dans cet ouvrage vous retrouverez
tout sur les souterrains de Bourges.
Il est disponible chez l'auteur, nous
contacter >>>Cliquer ici
Complément sur le
souterrain de la rue Joyeuse d'Isabelle Renault :
Pour Isabelle Renault,
" Le sous-sol de Bourges est un véritable
gruyère, il est constitué d'une succession de bancs
d'argile et de bancs de calcaire, c'est un vrai millefeuille.
C'est à partir de la construction
du rempart de Philippe Auguste que la ville s'est refermée
incluant les faubourgs. On a alors creusé des carrières
pour en extraire de la pierre nécessaire à la construction
des maisons.
Les caves ont été utilisées
jusque vers le XVII ième siècle".
Et sous les caves, il y a un autre niveau
en dessous, et cela peut aller jusqu'à 10 à 15
mètres sous la rue.