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- Introduction
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- Passionnant casse-tête que de
proposer au Conseil municipal d'une ville le nom à attribuer
à une rue, une place ou une impasse. C'est là que
les esprits s'enflamment, les querelles se développent,
car ces choix sont la véritable mémoire d'une cité.
A Bourges comme ailleurs, les noms donnés aux rues ne
sont pas neutres. Comment sont donnés les noms de la rue
Agnès Sorel, de la place Cothenet ou du square Mac Donald
?
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- Plusieurs principes ont été
appliqué depuis 1995 :
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- 1/ Des noms en cohérence avec
le quartier, comme des noms de peintres, dans le quartier des
peintre. De même pour les musiciens, aviateurs ou Résistants.
- 2/ Privilégier des noms avec
une connotation locale, c'est à dire régionale
ou berrichonne. Que ce soient des anciens (Hazé), ou modernes
(Deniau).
- 3/ Mettre des noms féminins
pour tenter de modifier la situation actuelle qui a essentiellement
des noms très masculins.
- 4/ Eviter les noms de fleurs, d'arbres
ou de provinces. Il est préférable de mettre des
noms de personnages.
- 5/ Eviter de mettre des noms sous l'émotion
de la mort de tel ou tel personnage, surtout national, laisser
un temps de plusieurs mois.
- 6/ Chercher des personnages qui ont
été universels dans leur domaine, il n'y avait
ni Einstein ni Newton il y a quelques années dans les
noms de nos rues.
- 7/ Ne plus mettre d'impasses ou de
chemins mais le plus possible le mot rue (ou avenue ou boulevard).
- 8/ Demander régulièrement
à la population de participer à la proposition
de noms.
- 9/ Ne jamais débaptiser une
rue ou une place pour convenance, mais seulement dans le cas
où il y aurait un motif grave et documenté.
- 10/ Eviter le " copinage "
politique ou de pensée et bannir par exemple les "
chefs de parti politique ". Ne pas refuser par principe
des noms opposés à la mouvance politique en place.
- 11/ Eviter les homonymie, surtout avec
le GPS, il y a un Popineau magistrat, qui a sa rue, donc le Popineau
sculpteur ne l'a pas.
Processus :
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- Les attributions d'une commission
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- Une commission informelle composée
:
- - de l'adjoint à l'urbanisme
(responsable de la commission) ,
- d'un adjoint ayant des connaissances historiques
- du responsable technique de la voirie
- d'un membre du cabinet spécialisé dans les rues
- du directeur de cabinet.
mais de toute personne
- se réunit à la demande
des ingénieurs de la voirie ou de l'urbanisme qui ont
un besoin urgent (ou non) de mettre des noms à des rues,
qu'elles soient dans le domaine public ou privé, sachant
que dans la grande majorité des cas, une rue dans du privé
passe rapidement dans le public.
- La commission travaille donc avec un
plan du quartier à mettre un nom de rue.
- Pour cela il existe un document sous
forme de tableau qui répertorie les noms de personnages
(ou de lieux ou divers) qui ont été demandés
par la population ou que la commission a donné un jour
passé, et qui sont " en réserve " ou
en " attente ".
- A partir de cette liste chacun propose
ou alors cherche et donne un autre nom hors cette liste.
- Il y a parfois des accords immédiats,
; mais il peut arriver que l'on ne puisse pas se mettre d'accord
et chacun repart pour une semaine de réflexion.
- Lorsque le consensus existe dans la
commission, cela débouche sur une proposition de délibération
municipale qui est proposée au Bureau Municipal.
- Le bureau examine les propositions
de noms et accepte, refuse ou amende, les noms, le maire ayant
souvent le dernier mot.
- Ensuit, la délibération
est présentée cette fois au Conseil municipal qui
vote, et depuis 1995, les noms proposés n'ont jamais fait
l'objet de refus ou de remarques de la part de l'opposition municipales.
- Il y eut quelques débats comme
sur Alexis Carrel ou une courte contestation sur Galliéni,
ou encore le manque de femmes dans les rues du site Lahitholle,
la commission ayant voulu mettre les noms des concepteurs des
canons de Bourges, et il n'y avait pas beaucoup de conceptrice.
- Une fois votée en Conseil municipal
les services techniques mettent les plaques.
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- Les noms d'autrefois
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- Dans les noms de rues, parmi les plus
anciens, figure inévitablement la " rue Moyenne ",
artère principale de la cité. Depuis la nuit des
temps, cette rue qui traverse la ville s'est toujours appelée
rue " Médiane, Médiana ou encore Média
Via pour devenir Moyenne au XIX e siècle. Une partie de
cette artère ayant pris jusqu'en 1791, le nom magnifique
de rue du Dieu d'Amour.
- Les anciens n'avaient pas la pudeur
d'aujourd'hui, ils ont ainsi baptisé une rue, aujourd'hui
" Cage verte ", par rue " Gratte couille ",
car les chanoines l'empruntaient pour se rendre à la cathédrale
Saint Etienne, mais comme la rue était bordée d'orties,
ils devaient relever leur soutane et
se piquaient leurs
parties intimes avec les orties.
D'autres noms comme la rue des Vertus devaient receler une maison
peu fréquentable.
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- Les appellations anciennes et modernes
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- Dans le noms à donne à
des rues, les politiques municipales n'ont jamais fait preuve
de beaucoup de continuité.
Il y a eu les " dogmatiques ", c'est à dire
ceux qui vont donner aux rues et places un nom par rapport à
leurs convictions. C'est le cas bien entendu des rues avec le
nom d'un saint, et la puissance de l'Eglise de l'époque,
qui va durer plusieurs siècles est telle que les rues
se nommeront pendant longtemps des appellations comme Saint Sulpice,
Saint Bonnet ou Sainte Ursule et l'on trouve de la même
manière la place Saint Pierre ou l'impasse Saint Médard.
A l'opposé, mais beaucoup plus récemment, la laïcisation
de la vie publique à Bourges vers 1900, à partir
de l'arrivée de la municipalité Vaillandet, va
changer ces noms de Saint XY en nom de laïques, comme Montaigne
remplaçant Saint Ursin ou Emile Zola prenant la place
du prédicateur Bourdaloue, ou encore Gambon remplaçant
Saint Sulpice, quant à la rue Saint Marc, elle deviendra
la rue Calas
Plus récemment le remplacement d'une partie de la place
Etienne Dolet par celle d'un archevêque local fera se lever
les boucliers des laïques, et il faudra attendre la fin
du Xxe siècle pour que Monseigneur Lefèvre ait
à proximité " son jardin cardinal Joseph Lefèvre
".
- La période contemporaine ne
va pas échapper à ce mouvement avec la municipalité
communiste de Jacques Rimbault qui donne des noms comme Marcel
Paul ou Jacques Duclos, des communistes purs et durs, le second
en particulier " stalinien notoire " ne laissera pas
un souvenir impérissable aux berruyers.
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- Les noms " sans risque "
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- Dans ce domaine qui consiste à
mettre un nom de rue à telle ou telle artère, il
arrive que le maire ne veuille pas prendre de risque, avec des
noms propres souvent controversés. Ainsi " fleurissent
" les noms charmants comme rue des Tulipes, des Violettes
ou rue des Tournesols pour les fleurs et rue des Cerisier ou
allée des Frênes pour les arbres. Dans la décennie
1970, les provinces seront à l'honneur avec la rue de
Touraine, celle du Poitou ou de Picardie, dans le quartier des
Pijolins.
- A la limite de ce " courage ne
décidons rien ", se trouvent les " grands musiciens
" ou les grands peintres. On trouvera ainsi la rue Debussy,
la rue et l'impasse Mozart ou la rue Maurice Ravel. Il manquera
jusqu'en 2008 la rue Beethoven auquel personne n'avait jamais
pensé ! L'avantage, dans ces cas où la ville honore
les " grands hommes de l'art ", comme Picasso et cela
permet, s'ils sont bien concentrés dans un quartier ou
un lotissement de se dire, " Ah, oui, la rue Degas, c'est
un peintre, cela doit être dans le quartier des peintres
au Val d'Auron ! "
- Il y a aussi les relations entre les
noms des rues et le quartier lorsque celui-ci se créé.
C'est le cas dans les années 1930 de l'arrivée
de l'Aéroport au sud de Bourges route de Châteauroux,
avec les noms des aviateurs comme Joseph Le Brix, les frères
Voisin, Blériot et autre Haegelen. Mais lorsque le quartier
va s'étendre, dans les années 1970, on trouvera
des femmes, comme Maryse Bastié ou Adrienne Bolland, et
aussi
Clément Ader le " père de l'aviation
" et
.Youri Gagarine, un russe, délaissant
au passage " Amstrong " l'américain qui fit
le premier pas sur la lune. A ce moment, la municipalité
était communiste et le mur de Berlin n'était pas
tombé. Récemment un rond point a été
baptisé Marcel Hanriot, du nom de celui qui a implanté
à Bourges les industries aéronautiques.
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- Les Changements de noms
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- Parmi les changements de noms de rues,
la période récente, depuis une quinzaine d'années,
a pris pour principe d'éviter de changer le nom d'une
rue existante. Pourtant les demandes sont parfois forte, comme
pour certains riverains qui habitent rue Robespierre !
Une seule fois ces dernières années, un nom a été
gommé, il s'agit de la rue Alexis Carrel, un savant français,
de très haut niveau mais dont certains écrits sur
l'eugénisme et des thèses racistes ont défrayées
la chronique. La rue a été débaptisée,
et le nom d'une résistante Adélaïde Hautval
lui a été donné.
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- Les lobbies
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- Il y a aussi les lobbies qui interviennent,
lobby familial, avec " mon ancêtre " a fait à
Bourges des choses extraordinaires ", il faut lui donner
le nom d'une rue !
C'est parfois justifié, comme récemment pour la
famille Sallé de Choux, dont un des ancêtres est
à l'origine du département du Cher, d'autres sont
plus difficiles à accepter.
- Ces dernières années,
les lobbies les plus forts ont concerné les militaires
et les anciens combattants, avec des demandes très fortes
pour que tous les Résistants du Cher attachent leur nom
à une rue.
C'était d'autant plus difficile qu'il faut que des rues
ou des places soient créées. Alors dans certains
quartiers, comme la ZAC Maréchal Juin, les noms de Pierre
Jacquet, d'Edmé Boishé ou de Jean Zay on été
approuvés à l'unanimité du Conseil municipal.
Le lobby européen ne furent pas en reste, et pour le nom
des " grands " hommes qui ont fait l'Europe, il faudra
attendre les années 2000, avec la place de l'Europe en
Centre ville, puis, vers la route de Saint Amand, les noms comme
Jean Monnet, mais aussi Adénauer, Spaak, et bientôt
sans doute, Jean François Deniau.
- Le lobby des ingénieurs et scientifiques
était aussi actifs, et j'en fus, c'est ainsi que le grand
Albert Einstein, tout comme Newton et Faraday dont les noms qui
n'étaient pas présents à Bourges eurent
des rues dans l'espace tertiaire appelé " Esprit1
".
- La politique depuis 1995 a défini
plusieurs axes pour donner le nom d'une rue à un personnage
:
En premier lieu, ce nom doit, au Conseil municipal faire l'objet
d'un vrai consensus, ce qui n'est jamais simple. Ensuite, privilégier
les " acteurs locaux ", Berrichons et Berruyers car
c'est la mémoire et la reconnaissance d'une contrée,
le Berry, qui est en jeu. Et puis se donner un peu de temps,
et ne pas donner un nom dans la précipitation et l'émotion
comme ce fut le cas dans les années 1980 pour la rue Djibaou
!
Enfin, honorer quelques personnages nationaux " clés
" qui n'avaient pas leur nom à Bourges comme Jules
Ferry ou Napoléon III à qui la ville de Bourges
doit l'implantation des établissements militaires. Enfin
trouver des femmes car dans ce domaine, les villes sont loin
de la parité !
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- Prochains et futurs noms à
Bourges ?
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- Parmi les rues qui se créaient
les noms choisis doivent s'intégrer dans l'environnement
immédiat, c'est le cas de Maurice Estève le peintre
de Culan qui aura son nom dans une rue peu éloignée
de Bonnard, Fernand Léger ou Seurat.
- Et puis, il reste des personnages qui
n'ont pas leur rue comme Pierre Brossolette ou Julien Mamet,
ce dernier, aviateur né à Bourges, fut l'homme
qui permit à Blériot de réussir. Il était
tombé dans l'oubli. Certains hommes qui ont compté
dans le Berry comme l'intendant Denys Dodart ont désormais
une rue à leur nom dans une zone industrielle, tout comme
devrait l'avoir un jour prochain Marcel Dassault, puisque sous
le nom de Marcel Bloch, c'est lui qui développera en 1932
l'industrie aéronautique naissante à Bourges.
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- Et puis, il y a le nom des maires de
Bourges qui doivent avoir un nom de rue, ce n'est pas une obligation,
mais une tradition forte depuis plus d'un siècle. Et là
encore la politique reprend ses droits, et rien n'est neutre.
Ainsi, Raymond Boisdé, homme de droite, maire de Bourges
pendant 18 ans, a une rue qui ne comporte pratiquement aucune
adresse ! Inversement Jacques Rimbault, homme de gauche a une
rue qui n'a pas beaucoup d'adresse, mais une seule doit lui suffire,
car c'est celle de la mairie et des milliers de lettres arrivent
avec son nom en bonne place
perpétuant le nom de
ce maire en fonction pendant 16 ans.
- Aujourd'hui, il reste 3 noms de maire
à distinguer, c'est Jean Claude Sandrier, Roland Chamiot
et Serge Lepeltier, ils auront un jour leur rue
le plus
tard possible car généralement la ville ne donne
pas de noms à des personnalités vivantes.
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- LES NOMS DES RUES DE BOURGES
: LES CHIFFRES
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- Situation avant 1995 (depuis le
Moyen Age à 1995)
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- 825 noms de rues, place
- - 485 donnés à des hommes
- 20 donnés à des femmes
- 320 à des noms de fleurs, provinces, lieu-dit
- Cela donne 58,7% à des hommes
arrondi à 59%
2,3% à des femmes arrondi à 2%
38,7% à des noms divers arrondi à 39%
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- Ce qui s'est passé de 1995
à 2015 (31 décembre) : (sur 20 ans)
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- 198 noms donnés à des
rues, place
- - 124 donnés à des hommes
- 37 donnés à des femmes
- 37 à des noms de fleurs, provinces, lieu-dit
- Cela donne 62,6 % à des hommes
arrondi à 63%
18,6 % à des femmes arrondi à 19 %
19, % à des noms divers
- Les noms pour les hommes passent de
59 à 62 %
Pour les femmes, cela passe de 2 à 19%
Pour le divers, diminution de 39 à 19%
- Cela signifie que les noms neutres
donnés à des rues a très largement été
diminué, au profit des noms de personnes. Et dans ce cas,
le nombre de femme a été plus que doublé,
passant de 20 noms à 57.
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- Situation au 31 décembre
2015 :
- 1023 noms de rues, place
- - 609 donnés à des hommes
- 57 donnés à des femmes
- 357 à des noms de fleurs, provinces, lieu-dit
- Cela donne 59,5 % à des hommes
5,5 % à des femmes
34,8 % à des noms divers
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- A noter qu'il n'y a qu'un nom retenu
si il y a une place, une impasse ou une rue qui porte le même
nom.
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Enfin, si les Internautes
de l'Encyclopédie ont des idées de noms de rue,
de place ou de rond point , pour Bourges, ils peuvent nous écrire.
Le
livre de Roland Narboux de novembre 2010 aux éditions
CPE, intitulé "l'Histoire
du nom des rues de Bourges".
- Cet ouvrage comprend les noms de toutes
les rues de Bourges à la date de la publication,
et il en a été dénombré 962, cest
considérable, mais pour une impasse,
une rue et une place au même nom, cela ne représente
quun seul nom. A noter
que ne figurent que les noms actuels des rues et non les noms
enlevés, pour des
raisons multiples.
Bien entendu, je demande une certaine indulgence pour des imprécisions
et sans
doute quelques erreurs tant les documents sont nombreux et parfois
contradictoires.
Lutilisation massive des comptes rendus des bureaux et
conseils municipaux
a été la source principale de cet ouvrage, et pourtant
ces documents officiels
peuvent receler des erreurs, jen ai trouvé quelques
unes.
Mais élu de Bourges depuis 1995, jai participé
à une grande partie de ces dénominations,
depuis cette date, ladjoint à lurbanisme ayant
la responsabilité de ce
travail recevant la délégation de monsieur le maire
Serge Lepeltier. Les adjoints
ont été Paul André Aubrun, et jai
exercé cette fonction ensuite pendant 6 ans,
aujourdhui cest la tâche de Véronique
Fénoll.
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- dans les bonnes librairies
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de Bourges : rues caractéristiques
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de Bourges
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