Bourges ville culturelle,
c'est aujourd'hui un euphémisme, il est incontestable
que l'image de Bourges sur le plan de la culture est très
positive, à la fois de la part de la majorité des
Berruyers, mais aussi de la part des personnes qui ne sont pas
des locaux.
Cette image est-elle
réelle ? et surtout, quelle fut l'évolution depuis
le début du XX e siècle ?
LA NOTION
DE POLITIQUE CULTURELLE
Pendant plus de la moitié
du siècle, la notion de politique culturelle n'existe
pas. Il faut savoir que le Premier ministère de la Culture
date de 1959 avec André Malraux.
De même à Bourges,
il faudra attendre 1977 pour qu'apparaisse à la mairie
de Bourges le premier service culturel.
Il ne faut pas dire qu'il n'y
avait rien, mais que ce soit au niveau national que local, on
s'intéressait "aux Beaux Arts", un peu au patrimoine,
mais la notion de culture n'était pas une priorité.
La culture était réservée
à une élite qui avait des loisirs, qui ne travaillait
pas 12 heures par jours, qui avait l'instruction. Ce n'était
pas la majorité de la population.
Un mémoire de maîtrise
de Laurent Marc montre qu'en 1958, Bourges a une image essentiellement
passéiste et quelle entretient. C'est un ancien centre
universitaire, et c'est une ex-capitale du Royaume de France,
la ville cultive avec délectation le côté
"grande dame déchue".
LES FETES
DU DEBUT DU XX e SIECLE
La fête dite de l'Argentier sera
donc longuement préparée pour la date du 12 juin
1910. Il est prévu de faire participer des milliers de
berrichons costumés comme au XVe siècle. La présence
d'un descendant de l'enfant le plus célèbre de
Bourges fut acquise : Henri Jacques Coeur de l'Etang a promis
sa participation. La ville sera décorée, avec des
arcs de triomphe, des écussons aux portes et aux fenêtres
et de nombreux calicots portant les formules et autres devises
de Jacques Coeur.
La veille, à 21 heures, c'est la retraite aux flambeaux,
et la soirée se termine par des feux de joie. Mais le
lendemain, "ça ne va pas fort". Ce cortège
de milliers de femmes et d'hommes costumés devait s'ébranler
pour conjurer en quelque sorte les inondations.... mais il pleut
"à pleins sciaux". La foule est présente,
les organisateurs scrutent le ciel, le programme prend du retard,
mais le défilé n'est pas annulé.
Des trains entiers ont déversé des milliers de
visiteurs pour cette fête qui commence enfin. Un cortège
qui commence à s'ébranler, avec un char : celui
des forgerons. Puis les "gars du Berry" suivent et
à leur tête, leur fondateur : Jean Baffier, le sculpteur
régionaliste en costume d'époque, barbe au vent
...ce "terrible extrémiste" était à
son aise. Plus loin le char du Berry.
La suite du défilé est plus historique encore.
On remarque la présence de Charles VII, puis des nobles
du XVe siècle, et bien entendu Jacques Coeur est là,
c'est le clou du défilé qui passe à travers
les gouttes. Tout au long du parcours, une quête est faite
; l'argent, comme prévu, ira aux sinistrés des
inondations de janvier. Deux musiques militaires accompagnent
des participants, et le tout se termine Place Séraucourt
au fond de laquelle le château d'eau fait jaillir mille
jets alors que les choristes entament un "Salut à
Jacques Coeur".
Le soir, on refusera du monde au concert de gala ; il n'avait
rien manqué à cette fête, peut-être
le soleil. Les annales écriront le lendemain : "le
cortège de Bourges évoque de merveilleuse manière
une époque intéressante de notre histoire locale".
Cette année 1910, verra quelques semaines plus tard, une
autre fête, encore plus originale pour l'époque,
ce sera une fête aérienne.
LE MEETING
AERIEN DE 1910
Cette manifestation fut organisée
par l'A.C.C., (Automobile Club du Centre), présidée
par un des "grands" du département, le Prince
d'Arenbert. Les liens entre l'automobile et l'avion étaient
étroits, et de nombreux pionniers de cette nouvelle machine
appelée "le plus léger que l'air" avaient
commencé leur périple sur des "automobiles"
: ce fut le cas de Hanriot père et fils.
Le meeting se déroula sur le terrain du polygone d'artillerie,
car il n'y avait pas d'aérodrome à Bourges, et
Avord était un champ de manoeuvres pour fantassins. C'est
ainsi que cinq avions arrivèrent par ... chemin de fer.
Le 20 octobre 1910, devant une foule évaluée à
40 000 personnes, malgré un temps maussade, le premier
aviateur à s'envoler de Bourges, à bord d'un avion
de type biplan Voisin fut Jean Bielovucic, un péruvien
qui évolua au dessus de la cathédrale de Bourges.
Avec Bielovucic, il y eut des prestations de Breggi, Paillette,
Jullerot et du malheureux Blanchard. Ce dernier, en effet, en
revenant sur Paris à l'issue de ce meeting s'écrasera
à l'atterrissage d'Issy-les-Moulineaux : il y trouvera
la mort.
Durant ces 4 jours de fête, un certain
nombre de personnalités locales effectueront leur baptême
de l'air, comme M. Pillivuyt, le patron des Etablissements de
porcelaine de Mehun. A cette époque, nul ne songeait que
deux années plus tard, naîtrait la base d'aviation
d'Avord, ni, en 1928, le début de l'industrie aéronautique
à Bourges. En 1910, l'avion, c'est avant tout un merveilleux
spectacle pour les yeux, avec en prime, l'émotion.
LA CULTURE
AVANT GUERRE
C'est avant tout l'uvre de personnes
individuelles, et d'associations, mais il n'y a pas de coordination
ni de moyens.
La culture est faite par les associations
dans lesquelles on distingue trois grandes familles :
Les fanfares
Le théâtre amateur
Les sociétés savantes
Ces dernières forment un noyau culturel
à la fois fort, puissant et élitiste. C'est principalement
:
La société des Antiquaires
du Centre
La société Historique du Cher
La Société de Géographie.
Cette situation va durer jusque dans les
années 1950, avec périodiquement les questions
que l'on pose alors : Bourges est-il un désert culturel
et la réponse est "non mais" car, il n'y a aucune
structure cohérente, et il n'y a pas de moyens.
De 1900 à 1940, la culture n'est
pas une préoccupation forte, c'est la lecture pour certains,
et le divertissement pour d'autres. Les ouvriers des établissements
militaires ont d'autres soucis ou d'autres aspirations.
C'est le loisir traditionnel et largement compréhensif
des bals, guinguettes, et de quelques grands spectacles populaires,
comme le cirque Barnum ou les meetings aériens.
Le théâtre classique, la musique classique, la conférence
classique ne sont pas pour eux. Et il y a une séparation
sociologique forte.
Mais ne la retrouve-t-on pas aujourd'hui sous d'autres formes
?
- complément d'un internaute
: Votre encyclopédie
étant une des plus complètes j'aurais souhaité
pouvoir vous apporter une précision au sujet du passage
à Bourges du Buffalo Bill WW show en 1928. Il s'agit d'une
mystification du cirque Bouglione qui avait racheté un
stock d'affiches. Buffalo Bill s'est installé à
Bourges le 23 août 1905 et je cherche où
?
je peux vous apporter les preuves de ses précisions si
vous le désirez par respect au travail que vous avez fourni
dans cette encyclopédie très bien documentée.
Salutations d'un passionné de Cirque
nom: Michel DOMAIN Orléans
LA CULTURE
DES ANNEES 50 A BOURGES
Les propositions en terme d'activités
culturelle au milieu des années 50 sont intéressantes
:
Conférences 13%
Concerts classiques 19%
Ciné club 15%
Divers et divertissement 21%
C'est la grande époque des revues,
comme celles de Roger Rabot, dit Régor et qui tournait
en dérision les notables de la ville, ce qui n'existe
plus aujourd'hui. Un genre situé entre le théâtre,
le cabaret et les chansonniers qui avait beaucoup de succès.
Les concerts classiques sont donnés
par l'Ecole Nationale de Musique, la Schola Saint Etienne et
la SAMP créée en 1932, qui passera du Martin Pécheur
à la Musique Populaire.
Le ciné club a beaucoup de succès,
c'est le ciné club Pierre Monnier qui est fondé
à la Libération, il draine les intellectuels de
la ville.
De son côté, le docteur Malgras
propose chaque année 5 à 6 conférences
Le théâtre existe mais manque
d'une véritable salle
Notre Berry qui fut créée
en 1949 est un groupe de danse qui orient son activité
vers le folklore, les costumes, les objets de la région.
Le premier tournant se déroule sous l'ère de Boisdé,
et par une politique nationale volontariste.
Soulignons à cette époque
l'action de Malraux. Il viendra plusieurs fois à Bourges
et c'est une ville qu'il devait aimer. C'est l'époque
"des cathédrales culturelles" comme il aimait
le dire et à Bourges il doublera celle de 1195 par une
autre, la Maison de la Culture.
Il y a un renouveau sur le plan national, il va rejaillir à
Bourges avec deux causes plus ou moins liées. L'arrivée
de Raymond Boisdé comme maire de Bourges et l'aspiration
d'une ville qui veut se donner les moyens de redevenir une grande
ville universitaire.
Boisdé devient maire de Bourges
en 1959, il est entouré de personnalités qui ont
fait leur preuve à titre individuel dans le milieu culturel,
c'est le cas
D'Alfred Depège
De Jean Jenny
De Pierre Malgras, le président des "conférences
du lundi"
De Pierre Potier Président du théâtre municipal
en 1959 puis de la Comédie de Bourges en 1961.
De Madeleine Surnom avec Notre Berry
LES MUSEES
DE LA VILLE
Le Musée du Berry fut restructuré
en 1950 par Jean Favière
Les expositions sont intéressantes
avec
Les techniques agraires anciennes (1954)
Les Vignes et le vin du Berry (1955)
C'est aussi le temps des guinguettes avec
les bals dans les Marais de Bourges. Les vieux Berruyers se souviennent
avec une larme de nostalgie la belle époque où
chacun allait le dimanche après-midi au coeur de Bourges
dans ces marais mystérieux. Les guinguettes refusaient
du monde, la Courcillière, le Caraqui ou le Moulin-Bastard,
c'était le lieu rêvé pour la jeunesse berruyère
de "s'éclater" comme on le dirait aujourd'hui.
Les orchestres simples, comme "Caks'ton Jazz" ou plus
complexes tel "The Hot Boy's Orchestra and P'tit Louy's
Jazz" jouaient rue de Babylone ou au "Bon Accueil"
de Fenestrelay.
En 1906, fut créé par Monsieur Renard un lieu original
: Robinson. Entre l'Auron et le canal, au milieu des arbres et
de la pelouse, furent édifiées des tonnelles, où
chacun pouvait consommer et aussi danser. Mais le propriétaire
était imaginatif. Il fit construire un bassin, et l'emplit
de poissons, ainsi, ceux qui ne voulaient pas danser pouvaient...
pêcher, et même consommer sur place la friture.
La danse est une des grandes activités
de cette époque, il n'y avait pas de télévision,
et les Berruyers "sortaient" de chez eux. Les bals,
à la mauvaise saison se déroulaient au Palmarium,
qui était véritablement la salle "à
tout faire", alors que "Le Salon de la Victoire",
près de la place de la Nation, très récemment
rénové, attirait les danseurs qui s'en allaient
"chez Lesage" comme chacun se le disait.....
Les loisirs, c'est aussi le cinéma,
et parmi les grands films qu'il est possible de voir en Berry
figure "Pêcheur d'Islande", d'après l'oeuvre
de Pierre Loti. Le Grand Palais à Bourges donne aussi
dans les soirées de gala avec en mai 1925, "La Course
Infernale" interprétée par Réginald
Denny, alors que l'entracte est occupée par une attraction
: les "Edouard's" qui sont des acrobates. Les Berruyers
reçoivent aussi les tournées, et le premier comique
du théâtre de Cluny, à Paris se nomme Léo-Rivière,
il est en terre berrichonne dans une pièce intitulée
"Nous avons tous fait ça...". Le public se bouscule
à ces spectacles.
Vers 1920
Le spectacle à Bourges peut être grandiose. C'est
ainsi que le 2 octobre 1928, le plus grand cirque du monde ouvre
ses portes au public : il s'agit du cirque Buffalo-Bill. Compte
tenu de ses trois pistes et de ses quatre mâts, il doit
s'installer sur l'Ancien Champ-de-Foire. Plus d'une cinquantaine
d'attractions sont présentées, c'est à dire
trois spectacles à la fois.et la présence "du
Capitaine Buffalo-Bill, qui invite le public à visiter
son village de toile composé de cinq établissements,
une véritable armée cosmopolite et une organisation
impeccable".
Plus modestement, le Théâtre
de Bourges présente une pièce dans le cadre ....
des tournées Baret. En 1929, le plus grand succès
du Théâtre parisien de l'Athénée est
en terre berruyère pour l'interprétation de "Ma
soeur et moi", du théâtre de boulevard, interprété
par Mlle Maryse de Brandt, "dont on se rappelle le succès
dans Nicole et sa vertu".
Au cinéma de l'Alhambra, c'est l'oeuvre de Zola qui fait
fureur. On joue Thérèse Raquin de Gina Manès,
et la publicité indique que le film est joué "au
Prix ordinaire des places".
A Bourges, en ce milieu de l'année
1948, les loisirs s'organisent, avec le cinéma qui fait
fureur, il n'y a pas moins de 7 cinémas dans la ville,
et le programme du 9 juin alterne les films historiques et les
films comiques
l'Alhambra : "Les
enchaînés" d'Hitchckock
l'Eden, "les chouans"
Au Royal, c'est "la loi de la pampa"
le Rex propose la célèbre "famille Duraton"
Au Familia se joue "l'ami Fritz"
Le Grand Palais propose "Miroir"
Et Jean de Berry déroule "Maria Christine"
Outre le cinéma, on se presse au
cirque que présente les frères Amar, il est dans
la capitale du Berry le 30 juin. Et puis, le super gala de Music-hall
se déroule le 4 juillet, c'est aux Prés-Fichaux.
Le programme est alléchant, avec Edith Piaf et Les Compagnons
de la Chanson, en deux séances, une à 16 h 45 et
l'autre en soirée à 21 heures.
Mais dans cet après-guerre, les
sujets ne manquent pas, et le tourisme une fois encore fait la
première page des journaux locaux. Le titre est intéressant
: " A Bourges, le tourisme va-t-il mourir ?"
Un article complet parle des Suisses et des Belges qui passent
à Bourges mais ne s'arrêtent pas, ils n'y font que
dormir. Suivent des considérations sur le fait que les
Français n'ont plus d'argent, ils n'ont pas les moyens
de voyager, et le Syndicat d'Initiative n'est pas assez performant.
Il faudrait "faire des affiches", intensifier la publicité,
la ville doit se faire connaître, et chacun doit agir en
conséquence.
Enfin, beaucoup de commerçants considèrent les
clients comme "bons à plumer", il faut revoir
les tarifs, et l'article conclut que "Bourges vivote".
Sur le plan culturel, des hommes apparaissent
dans le Berry et à Bourges. C'est Charles Brown, directeur
de l'école de musique, Henri Malvaux pour les Beaux-Arts
et Jean Favière conservateur des musées de Bourges.
Ces trois personnages marqueront l'époque, car ils auront
la durée, restant plusieurs décennies à
Bourges.
Le patrimoine de Bourges comprend aussi des milliers de livres
et de manuscrits. Monsieur Jenny prend en charge la bibliothèque
municipale et réalise un remarquable travail de recherche
et de conservation, en attendant le début des années
1960 et l'utilisation de l'hôtel Témoin, place des
Quatre Piliers.
C'est aussi la présence d'artistes
comme Gili qui réalise de nombreuses sculptures ou encore
François Cacheux qui devient professeur de dessin à
Saint-Amand à partir de 1949. La ville de Bourges lui
commandera le nu de femme, en pierre qui est situé à
l'entrée du parc Saint-Paul.
Dans un domaine assez voisin, les Lerat vont faire renaître
l'art de la poterie, en grès de la Borne, qui s'essoufflait.
Jean et Jacqueline Lerat réaliseront les 40 sculptures
de têtes de femmes célèbres pour le nouvel
établissement scolaire de Vauvert.
Cette même année, au mois
de février, le grand Tino Rossi vient présenter
son dernier tour de chant aux Berruyers. Il apparaît, en
photo, dans sa Cadillac, devant la cathédrale de Bourges.
Dans les années 1950, la télévision
n'est pas encore dans les foyers berruyers, mais chacun se passionne
pour le média de l'époque, la radio dont l'émission
phare se nomme : "la reine d'un jour". Ce 11 décembre
1951, Jean Nohain, le célèbre "Jaboune",
présente à Bourges l'émission de Radio-Luxembourg,
avec une première partie de music-hall animée par
Roger Lanzac, au cours de laquelle les spectateurs admirent les
prestations des acrobates, chanteurs et humoristes. Puis vient
le grand moment, l'élection de la "reine d'un jour",
elles sont 29 candidates en présence, et c'est un "applaudimètre"
qui va les départager, il faut trouver celle qui est la
"plus méritante".
Sur les 5 dernières candidates restant en lice, c'est
Paulette Carré, veuve de trois enfants, qui l'emporte.
Elle avait demandé une machine à coudre.... afin
de confectionner des vêtements pour ses enfants..... On
pleure dans les chaumières de France et le public berruyer
est ravi, la Reine d'un jour est bien méritante.
LE
TEMPS DES GRANDS : MALVAUX, BROWN, FAVIERE
Comme me le rappelait Philippe Goldman,
Bourges dans ces années, possédait de fortes personnalités
dans les milieux de la culture. Ainsi, dans le domaine de la
peinture, de la musique et du patrimoine, des hommes comme Henri
Malvaux, Charles Brown et Jean Favière ont fortement marqué
la ville de Bourges, ayant une audience dépassant largement
le Berry.
Premier grand personnage du milieu culturel
berruyer, Henri Malvaux est à Bourges en décembre
de 1942. Il affirmera alors : "En arrivant à Bourges,
j'ai pleuré". Il était nommé directeur
de l'Ecole nationale des Beaux Arts et arts appliqués
à l'industrie. Il constate que tout doit être reconstruit,
il n'y a que 6 élèves et les locaux sont particulièrement
vétustes.
C'est Malvaux qui reconstruit et remet en état de marche
l'école.
Né dans la Meuse en 1908, il est diplômé
de l'école supérieure des arts décoratifs
de Paris et commence une carrière d'enseignant au lycée
Alain-Fournier de Bourges en 1932, comme professeur de dessin.
Il rejoint Mâcon, toujours comme professeur de dessin,
et reste au bord de la Saône une dizaine d'années.
Après avoir tout reconstruit à
Bourges, il voyagera beaucoup, ambassadeur de l'art contemporain
en Europe, mais aussi en Amérique latine et au Canada.
Il donne alors de nombreuses conférences.
C'est en 1962 qu'Henri Malvaux prend la direction du Centre d'arts
et de techniques, ce qui donnera l'école Camondo dont
il assure la présidence de 1962 à 1983.
Artiste, il exposa beaucoup, à Bourges comme dans le midi,
et ne quitta la direction de l'Ecole des Beaux-Arts de Bourges
qu'en 1973, il en était resté le patron plus de
30 années.
Il meurt en juillet 1994, comme le titrait
un journal local :
Henri Malvaux
l'ambassadeur de l'art, s'est éteint
Charles Brown fut directeur de l'école
nationale de musique à Bourges où il était
arrivé en 1948. Ce compositeur était né
le 9 avril 1898 à Boulogne-sur-Mer, et il fit des études
dans sa ville natale avant de s'en aller travailler la composition
à Paris à partir de 1936, avec des maîtres
comme G. de Lioncourt. Pendant une dizaine d'années, il
est violoniste au prestigieux orchestre Lamoureux, sous la direction
d'E. Bigot.
Lorsqu'il arrive à Bourges, Brown est déjà
connu comme compositeur, on lui doit des pièces pour piano,
un trio d'anches datant de 1946, et, la même année,
une symphonie concertante pour violon et orchestre.
Son oeuvre sera considérable, il compose des mélodies,
des choeurs, une messe, et à son arrivée à
Bourges, il compose une Cantate d'Avaric, et, deux ans plus tard
une Cantate de Sainte Jeanne de France.
Cette cantate fait la "une" des journaux locaux, les
Berruyers sont très fiers d'avoir des oeuvres musicales
qui sont consacrées à leur histoire. C'est au théâtre
municipal de Bourges qu'est donnée pour la première
fois cette cantate de Sainte Jeanne de France, dont le texte
est de Léonard Saint-Michel. Ce dernier écrira
que "Monsieur Brown a sublimé la spiritualité
vivante de l'Annonciade".
Autre personnage ayant lui aussi marqué
son époque à Bourges : Jean Favière, conservateur
des musées de Bourges qui prend ses fonctions en 1949.
Avec l'appui des musées de France, M. Favière remet
en état l'hôtel Cujas avec une nouvelle salle consacrée
aux antiquités pré-romaines.
Jean Favière est à l'origine
de ce renouvellement, il écrira en 1953 :
"Les vitrines-pupitre ont été
calculées pour réduire la fatigue des visiteurs
et leur permettre une vision globale de chaque série exposée.
Pour les âges du fer, des supports en Plexiglas ont été
étudiés afin de présenter les fibules, les
pendeloques et les anses des vases de bronze. Tous ces objets
dont l'aspect rebute généralement le public et
qui sont souvent bien à tort, l'objet du mépris
des amateurs d'art, ont été volontairement traités
comme des pièces précieuses."
Ainsi Jean Favière présente
les maquettes reconstitutives des travaux de César au
siège d'Avaricum d'après les études de M.
Du Mesnil du Buisson.
Il propose de nombreuses expositions comme "les techniques
agraires anciennes" en 1954 et l'année suivante,
les "vignes et vins de Berry".
Plus tard, en octobre 1972, Jean Favière
présentera au musée du Berry, une exposition intitulée
"120 ans de chroniques berruyères", qui préfigure
un musée de l'histoire de Bourges qui s'installera à
l'ancien Hôtel des Echevins.
Au cours de l'inauguration de cette exposition,
Raymond Boisdé parlera ainsi de Jean Favière :
"Homme discret, doublé d'un érudit qui sait
faire part de son savoir, écrivain qui a des visions poétiques
sur le passé, mais aussi le présent et l'avenir".
En fait, le conservateur des musées
de Bourges est un humaniste et un homme qui sait tout faire comme
le relève la presse locale. Dans sa réponse aux
personnalités présentes, Jean Favière rendra
hommage à André Cothenet qui a beaucoup fait pour
les musées de Bourges, et il conclura par ces mots :
"Profession prenante, car on est sollicité
de toute part, mais profession passionnante car il y a toujours
une présence humaine derrière les choses qu'il
faut savoir découvrir".
C'est encore Jean Favière qui va
créer pour la première fois, un poste d'enseignant
au musée de Bourges, son objectif étant de rendre
accessible à un public non averti, des thèmes aussi
délicats que l'archéologie en Berry.
En 1974, il innove en présentant à Tokyo et Osaka,
une grande exposition intitulée "Arts et Traditions
d'une province de France, le Berry". Une partie de la presse
nationale en parle longuement.
Jean Favière va aussi beaucoup travailler
avec Jean Goldman qui était responsable des Arts Plastiques
à la Maison de la Culture. Cet artiste qui avait de nombreux
liens avec des peintres et des sculpteurs étrangers permettra
aux Berruyers d'admirer des oeuvres de Gontcharova ou Messagier.
Sur le plan théâtral, Goldman tracera les bases
d'un Festival International du Théâtre "qui,
malheureusement, ne verra jamais le jour". De nombreuses
expositions itinérantes passeront par Bourges, avec une
volonté de promouvoir l'art contemporain. Le plus bel
exemple sera la programmation de "Stabiles, mobiles, gouaches
et sculptures de Calder".
LA
MAISON DE LA CULTURE
DE
LA SALLE DES FETES A LA MAISON DE LA CULTURE
L'idée d'une salle des fêtes
remonte à l'avant-guerre, alors que Laudier mettait en
chantier un grand complexe polyvalent à l'emplacement
du Palmarium, juste en face de la place Séraucourt.
Les travaux commenceront en 1937, sous
l'impulsion de l'architecte Marcel Pinon, avec un style architectural
très massif, "stalinien" diront les Berruyers,
bien que recouvert de briques de Saint-Palais, et les plus critiques
écriront sur "l'inesthétique extérieure,
marquée au fer rouge du mauvais goût modern-style".
Boisdé en parlera plus tard en ces termes :
"... Notre éminent prédécesseur Laudier,
dont on dit qu'il avait, lui aussi, l'esprit d'entreprise, mais
avec le goût et la mesure de son époque, avait commencé
une construction que certains mauvais esprits avaient fini par
appeler un tas de briques...."
La guerre va interrompre la construction, alors que le gros oeuvre
est à peine achevé.
Après la guerre, il manquait l'argent pour mener à
bien le projet, et il y avait d'autres priorités. Les
maires vont se désintéresser de cette affaire.
Cette "monstrueuse ruine neuve était bien embarrassante
pour les municipalités successives. C'est Raymond Boisdé,
un an après son élection comme maire, qui va reprendre
le projet initial qui était assez "grandiose"
pour l'époque. Il confiera à Pierre Sonrel, architecte,
et à Camille Demangeat, scénographe, le soin de
concevoir l'intérieur de l'édifice. Cette Maison
sera inscrite trente ans plus tard, en 1994, à l'Inventaire
Supplémentaire des Monuments Historiques en raison m'a
dit Philippe Goldman "de sa qualité architecturale".
En 1960, l'immeuble est peu utilisé,
car "seul le gros oeuvre est terminé" dira M.
Boisdé. En fait, la grande salle comprend des gradins
et au rez-de-chaussée, une autre grande salle où
s'est tenue l'exposition des "Nouvelles Techniques".
De son côté, Alfred Depège me confiera qu'hormis
quelques réunions politiques et autres matchs de boxe,
cette salle était peu utilisée, "on ne savait
pas quoi en faire". Le premier adjoint de Boisdé
ajoutera que Malraux avait lancé des idées sur
les Maisons de la Culture, et, à cette époque,
Boisdé avait d'excellentes relations avec le célèbre
et fougueux ministre. Un jour Boisdé rentrera de Paris
avec le sourire et une phrase énigmatique du genre "j'ai
peut-être trouvé une solution, au Ministère,
ils étaient très contents".
La future Maison de la Culture est en route.
Le maire propose alors de réaliser
une première tranche de travaux en extrême urgence
destinés à recevoir le Centre National d'Art Dramatique.
Il s'agit donc de construire :
- Trois ou quatre bureaux au rez-de-chaussée
- Une salle de spectacle de 950 à 1000 places
- Une salle de confection de décors
Ces deux dernières salles furent
obtenues en sectionnant horizontalement la grande salle de concerts
prévue à l'origine pour 1250 spectateurs.
Enfin, une grande salle de travail, ou
de répétition pour les futurs acteurs du Centre,
pourrait être utilisée pour des réunions
et autres conférences.
Ultérieurement, le plan de Raymond
Boisdé prévoyait des salles dites "de congrès"
ainsi que d'autres pour la lecture, la discothèque, ainsi
qu'une cuisine et un restaurant.
Ensuite, les principes étant acquis,
on parle "gros sous", et le projet d'achèvement
comprend une dépense prévisionnelle de 200 millions
de nouveaux francs."C'est énorme bien sûr,
si nous devons en supporter seuls la charge", dira Boisdé,
mais il rassure ses collègues en affirmant "qu'il
y a eu plus d'un demi-milliard de francs dépensé
par les contribuables berruyers pour ces constructions qui sont
inutilisables dans l'état actuel". Et le maire d'ajouter
: "Faut-il les laisser se dégrader davantage ou faut-il
au contraire les terminer, à condition bien entendu qu'elles
puissent servir à quelque chose ?"
Sur les 200 millions nécessaires aux travaux, pour Boisdé,
il y a environ 50 millions qui sont disponibles, ce sont des
fonds libres antérieurs empruntés. En étant
raisonnable, les subventions seraient d'une centaine de millions
de francs, "peut-être plus", alors il reste 30
à 50 millions à la charge de la municipalité.
A l'issue de la présentation de
ce grand projet, il n'y aura pas véritablement de débat,
chacun sent bien que cette bâtisse qui ne sert qu'épisodiquement
doit être achevée. Seul André Cothenet s'exprime,
signalant que dans le plan primitif de Laudier, une salle de
bal était prévue et qu'aujourd'hui, elle ne figure
plus dans le projet. Catholique assez traditionaliste, Cothenet
surprend ses collègues par cette demande. Gêné,
il se justifie :
" On peut discuter à perte
de vue sur la moralité du bal mais il est un fait que
c'est la jeunesse qui s'y intéresse, et puis en plein
centre ville, une telle salle donnerait une certaine garantie
aux parents.... A Bourges on est assez défavorisé
dans ce domaine".
On va discourir sur l'opportunité
d'une salle de bal, Boisdé faisant remarquer qu'il existe
un local dans le Parc Saint-Paul, avec une belle piste, un parquet
neuf..... et c'est ainsi que le conseil municipal approuve le
programme présenté par son maire. La culture à
Bourges va avoir sa maison.
Bulletin Municipal Officiel
de Bourges Septembre 1960
Une maison pour mémoire (Oct 1983), texte de Pascal Ory
GABRIEL
MONNET
A partir de cet "édifice Laudier-Boisdé",
la ville de Bourges va mener, avec des hauts et des bas, une
vie culturelle intense, et un des hommes symbole de cette période
est sans aucun doute Gabriel Monnet. Cet homme est né
à Montmédy dans la Meuse, le 23 février
1923, et c'est en Ardèche qu'il passe toute son enfance.
Par son père il se familiarise avec le théâtre,
il dira :
"J'ai été
mis très jeune dans le coup du théâtre. En
même temps, j'avais un peu honte du caractère artiste
de mon père. Un reste sans doute de l'excommunication
des comédiens, je préférais la musique....
j'ai joué dans les bals".
Avec la guerre, il se retrouve à
l'Ecole Normale de Privas puis rejoint le Vercors. Il monte des
spectacles et compose le chant des "pionniers du Vercors".
Il devient animateur en s'éloignant de l'enseignement.
C'est alors le temps des rencontres. A Grenoble où sont
jetées les bases d'une maison de la culture avec Jean
Dasté, puis Annecy qui l'appelle, il devient secrétaire
départemental de la Jeunesse et des Sports. Il fréquente
Jouvet et Ludmilla Pitoeff. En 1951, Monnet réalise sa
première mise en scène, "Noces de sang"
de Lorca, puis, l'année suivante "Sainte Jeanne"
de Shaw à Sarlat.
En 1953, il anime les Nuits théâtrales d'Annecy,
et l'année suivante, un Hamlet de Shakespeare, dans une
mise en scène originale sous forme de soucoupe. Un important
virage se situe de 1957 à 1961, car il rejoint Jean Dasté
à Saint-Etienne. Il met en scène Tchekov et des
auteurs modernes.
En 1959, à Bourges, la directrice du Théâtre
Municipal, madame Niel, démissionne de son poste pour
"des raisons impérieuses de santé". Le
conseil municipal est bien embarrassé. Pour préparer
la saison 1959-60, un comité de trois membres est constitué,
il comprend Mrs. Rouzé, Potier et Billot. Ils doivent
suppléer à une situation imprévue. Pierre
Potier est bien connu des milieux culturels berruyers. A la fin
de 1948, c'est lui qui avait créé le CRAD, Centre
Régional d'Art Dramatique de Bourges. Pierre Potier est
avocat-avoué à Sancerre, c'est un passionné
de théâtre et il s'installe à Bourges en
1951. Pendant 10 ans, il incarnera, avec sa femme, le théâtre
local, et jouera à Annecy "Hamlet", dans une
mise en scène de Gabriel Monnet dont il avait fait la
connaissance dès 1952 ! Un moment, il avait été
question de créer un Centre Professionnel d'Art Dramatique,
conformément aux promesses faites par Monsieur Jaujard,
Secrétaire Général aux Affaires Culturelles,
mais le manque de crédits avait fait avorté le
projet.
Monsieur Billot, en août 1959, déclare à
ses collègues du conseil municipal de Bourges : "....
Nous avons tenu à nous entourer de l'avis particulièrement
autorisé d'un ancien instructeur national bien connu à
Bourges, M. Gabriel Monnet, collaborateur de Jean d'Asté
(sic) à la Comédie de Saint-Etienne. Plusieurs
conversations avec ce dernier, en présence de M. le Maire,
nous ont amenés à penser que si le Centre Dramatique
Professionnel est créé à Bourges en 1960,
il importe pour cette année de transition de trouver une
solution provisoire capable de satisfaire les amateurs de bon
théâtre".
Gabriel Monnet est donc contacté pour la première
fois par des Berruyers, dont Potier, afin de s'occuper du Théâtre
Municipal de Bourges, mais il ne donnera pas de suite, n'ayant
sans doute pas assez d'assurance sur son rôle et la réalité
du Centre Dramatique, dont la date de création ne cesse
d'être repoussée. C'est deux ans plus tard, qu'il
accepte de se lancer dans l'aventure de la troupe permanente
de la Comédie de Bourges.
Le 6 février 1961, c'est le baptême
de la Comédie de Bourges, la cérémonie se
passe à 17 heures dans les locaux à peine terminés
de la Salle des Fêtes, et Monnet est le premier directeur
de cette nouvelle Comédie.
Sont présents, le Maire Raymond Boisdé, M. Rolland,
le préfet, ainsi que Pierre Aimé Touchard, Inspecteur
des Théâtres, qui est descendu de Paris pour l'événement.
Jean Dasté est là aussi.
A l'issue du vin d'honneur, le théâtre reprend ses
droits, et "Oncle Vania" de Tchekov est joué
à Bourges avec Hélène Vannier. La séance
est jouée à guichets fermés, aussi une représentation
supplémentaire est-elle proposée le dimanche.
Le prix des places varie entre 2 et 6 nouveaux francs.
Ce baptême lance officiellement la Comédie de Bourges
qui commence à travailler en Berry et prépare son
premier spectacle qui date en effet du 5 avril 1961. La première
pièce est une oeuvre de Molière, "L'école
des femmes", lors de la première séance, elle
réunit 80 spectateurs, mais trois jours après,
la salle est pleine. Ce premier spectacle sera joué 62
fois. En une saison, la jeune troupe aura monté 5 spectacles,
et donné 262 représentations devant 60 000 spectateurs.
C'est le début d'une grande aventure qui fera de Bourges
une des capitales du théâtre français, au
même titre que Planchon à Villeurbanne ou Dasté
à Saint-Etienne. Deux années plus tard, la comédie
de Bourges, "sous l'impulsion de Gabriel Monnet, nouveau
roi de Bourges", comme l'écrit André Camp
devient Centre Dramatique National pour prendre la forme en 1964
d'une Maison de la Culture..
En avril 1961, la Comédie de Bourges
rassemble des comédiens venus pour la plupart de Paris.
Ils venaient en Berry, car "il y avait du travail à
faire, défricher pour un public régional, c'était
passionnant". Ils avaient l'enthousiasme des précurseurs,
d'autant qu'en 1962, ils furent en congés forcés,
par manque d'argent pour une durée de 5 mois! Au début
de la saison 1965 par exemple, il y avait 9 comédiens
permanents, dont un Berruyer formé sur place. Ils étaient
rejoints par d'autres titulaires sur des contrats d'un an. Ils
seront les "comédiens dans la cité" et
vont monter des pièces de Samuel Beckett, Pirandello,
Courteline, ou Eugène Labiche.
Parmi les nombreuses pièces qui
seront proposées au public berrichon, on trouve la comédie
de Molière : "l'Ecole des femmes" et "la
critique de l'école des femmes", pour lequel un critique
écrira : "C'est un enchantement, grâce à
Monnet, l'Ecole des femmes redevient la pièce du printemps,
de la jeunesse contre l'âge des précautions, la
pièce de l'amour triomphant".
Et puis ce sera la tragédie de Pierre Halet, "La
Provocation", que Monnet met en scène avec des décors
et costumes d'Alexandre Calder, sur une musique de Jean Ferrat,
le "spectacle fut mis en scène de manière
remarquable, le spectacle est à la fois grotesque, terrible
et suave"
De 1961 à 1966, Gabriel Monnet
va proposer 14 pièces dont 7 créations, pour 546
représentations et devant 246 418 spectateurs.
Morvan Lebesque, le grand journaliste du
Canard Enchaîné, écrira :
"Je débarquais
sans prévenir; Monnet n'était pas là. J'entrais
dans une maison vide, accueilli par Caliban, le stabile de Calder.
Le hall, la salle de lecture, la salle d'expositions, le restaurant,
je m'y promenais timidement, retenant presque mon souffle. En
tâtonnant, je grimpais sur le plateau de l'admirable théâtre
et, de ses profondeurs endormies, un projecteur s'alluma, me
cernant comme un voleur ou un fantôme. Je partis ; je n'étais
pas chez moi.
Et je songeais aux habitants de Bourges qui eux, avaient le droit
d'être ici et qui recevaient peut-être cet immense
cadeau comme une chose toute naturelle. Ils ont raison, c'est
naturel".
Morvan Lebesque écrit en guise de
conclusion :
"Monnet ne voulait
pas un public de badauds ou de clients, mais de témoins,
une maison de la culture se doit de tout se permettre, sauf de
rassurer. Il s'agit de susciter des questions et d'y répondre
ensemble",
Monnet écrira :
"Les bilans chiffrés ne m'obsèdent pas,
ne me renseignent pas..... Si une transformation s'opère
dans la profondeur des mentalités et des attitudes, il
est très prématuré d'en indiquer le sens.....
Je tiens pour infinitésimaux les résultats que
nous avons acquis, en proportion des intentions qui nous fondent".
En avril 1968, Gabriel Monnet écrira
à propos de ce Festival du Théâtre des Provinces
:
" ... Si le festival constitue un moment fort de la
vie culturelle à Bourges, c'est qu'il réunit et
condense des forces dont cette vie s'entretient à longueur
d'année."
Il poursuit : " au plan artistique, le programme du
Festival est le fruit des circonstances, c'est-à-dire
du libre jeu de la décentralisation... A quelques mois
du Festival d'Avignon, qui demeure notre plus haute fête,
il se présente comme une étape dans la vie courante
: une fête ouvrière".
Les comédiens permanents de la Comédie
de Bourges :
Henri Barbier Gaston Joli
Bruno Castan Henri Massadau
Charles Caunant Gabriel Monnet
Paul Chevalier Jacques Roux
Jean-Claude Giraudon Rose Thiery
Marcel Guignard François Voisin
Le succès en chiffre sera important,
de 1964 à 1968, en 5 festivals, le programme proposé
comptera :
- 36 spectacles dramatiques et 1 opéra
- 20 compagnies décentralisées et 29 391 spectateurs.
Monnet fait alors rayonner la Maison de
la Culture à l'étranger avec des conférences.
Il est à Manchester, Londres, Moscou, Léningrad,
Varsovie, Prague ou Bratislava. Il y a chez les intellectuels
français, et Monnet n'échappe pas à la règle,
une fascination pour les pays de l'Est et les régimes
"socialistes". Localement, par des systèmes
de relais, ou des accords avec les comités d'entreprises,
Monnet cherche à s'ouvrir vers un monde peu familier avec
la culture. Il publie régulièrement un almanach
sur "sa" maison !
LE
PRINTEMPS DE BOURGES
LA
HALLE EN FETE, PREMICES DU PRINTEMPS
Alain Meilland, avec son équipe
dite "des Lyonnais", faisait les beaux jours de la
chanson à Bourges. Il avait créé un secteur
chanson à la maison de la Culture et proposait de nombreux
spectacles dans le genre "cabaret". Ainsi, il y avait
eu "Mon Pote le Gitan", "Les copains d'abord",
"V... comme Vian" ou encore "Le temps des crises"
. Il participait aussi avec ses amis Michel Pobeau, Serge Beaujard
ou Jean-Jacques Dupont à des spectacles de poésie.
Une rencontre chez Maurice Frot, en 1976, avec un autre passionné
de chanson, Daniel Colling, et c'est le début d'une grande
aventure. Colling cherche à créer des spectacles
de chansons, en marge du show-business parisien habituel. Il
vient de Nancy et dans les conversations entre Meilland et Colling,
on parle beaucoup d'autogestion, de marginalité, de vie
associative. Pour Meilland, "Colling est un agent de spectacle
qui essaie de faire du culturel", alors que pour Colling,
"Meilland bénéficie d'une structure qui peut
servir de lieu de rencontre". Quelques semaines plus tard,
une société civile, baptisée curieusement
"Ecoute s'il pleut", organise en mai 1976 à
Bourges, les premières rencontres des organisateurs de
spectacles qui ne veulent plus du sytème actuel. Cette
société va s'occuper d'artistes comme Bernard Lavilliers,
alors inconnu, Ange, Catherine Sauvage, Font et Val, Higelin
ou Henri Tachan, la belle et bonne chanson à textes.
"Ecoute s'il pleut" s'est donnée
Meilland pour Président et Colling pour Directeur, et
c'est en septembre 1976, pendant trois jours, une grande fête
dans la Halle au Blé qui servait habituellement pour le
marché du samedi matin, mais cette fois, les chanteurs
ont remplacé les volatiles.... des artistes comme Lavilliers,
Béranger ou le groupe Malicorne vont faire un spectacle
pendant trois jours. C'est un mini-festival baptisé "La
Halle en Fête" qui est suivi par environ 3000 spectateurs,
et l'idée de monter un vrai festival commence à
faire son petit bout de chemin.
Jean-François Dechico, le patron de la Maison de la Culture
apporte sa logistique à l'opération, et à
la fin d'un repas, il lance aux deux protagonistes de la Halle
en Fête, "Allez, Faites-moi un projet de vrai festival".
Ainsi l'entreprise commence. Il ne reste
que trois mois à Meilland-Colling pour mettre sur pied
un festival de la chanson, au printemps 1977. Alors que les élections
municipales se profilent, le premier Printemps de Bourges allume
ses lumières et fait donner ses décibels.Une belle
aventure vient de s'engager.
A suivre à
l'aticle Printemps de Bourges
- La culture
aujourd'hui à Bourges en chiffres :
-
- - La Maison de la Culture : 40 spectacles
par an avec du théâtre, de la danse, des expositions
et ... du cirque. En prime une salle de cinéma d'art et
essais.
-
- - Le Printemps de Bourges, créé
en 1977 et qui vient de fêter ses 30 ans, avec à
sa tête comme au début, Daniel Colling. C'est un
grand moment de la vie culturelle de Bourges.
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- - Un été à Bourges
: un festival qui fonctionne depuis 1996, avec l'agence culturelle
de Michel Pobeau. Chaque soir un spectacle du 21 juin au 21 septembre,
la plupart gratuits.
-
- - Un réseau de bibliothèques
avec 4 équipements qui reçoivent chaque année
près de 250 000 visiteurs.
-
- - Une biennale d'Art contemporain qui
en est à sa 4 ième édition (2008) et qui
accueille 20 000 visiteurs.
-
- - Les 5 musées de Bourges, celui
du Berry, puis Estève, les Arts décoratifs à
Lallemant, Le musée de l'école et celui des MOF,
Meilleurs Ouvriers de France.
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-
- - à suivre