Charles VII roi de Bourges par Roland Narboux - encyclopédie

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CHARLES VII, ROI DE BOURGES
Par Roland NARBOUX

Le roi de Bourges, ce fut Charles VII, et dans notre pays, des villes devenues un jour Capitale, il n'y en a pas beaucoup.

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Version 2012

S'il est un roi de France qui s'identifie à Bourges, ce n'est pas Louis XI, pourtant né dans la capitale du Berry, mais c'est Charles VII, que chacun connaît sous le vocable de "petit roi de Bourges". En fait Charles VII est un berruyer de hasard, à un moment où la politique ne lui laissait pas beaucoup de choix : comme il faut fuir Paris et ses émeutes, alors où aller pour se sentir en sécurité ? Et bien il choisit Bourges, rien de plus simple à atteindre en une chevauchée. Ce roi pourtant est pour le moins contrasté

 

Un début d'existence contrasté

Charles VII est né à Paris, à l'hôtel de Saint Pol le 22 février 1403, c'est à dire trois ans sensiblement après Jacques Cœur. Il se nomme tout d'abord Charles de Valois, conte de Ponthieu et n'a alors aucun rapport avec le Berry. Il est le fils de Charles VI, le roi fou qui a fait tout de même 10 enfants avant ce dernier rejeton? On peut être dément et …. Faire des enfants à moins qu'Isabeau de Bavière sa maman ait "fauté ".

Charles de Valois n'avait pas beaucoup de chance de régner puisque deux de ses frères étaient plus âgés, alors, il se rongeait le sang dans une ambiance dans laquelle son père était couvert de vermine et hurlait comme un loup.

La chance lui sourit à 10 ans lorsque la reine de Sicile Yolande d'Anjou, par pitié ou par calcul le prit en charge, avec pour intention de le marier à sa fille Marie d'Anjou.
Charles quitta Paris qu'il n'aimait pas, et n'a jamais aimé, et s'en alla auprès de Yolande en Anjou. En fait, il passa en Anjou de merveilleuses années, jouant avec sa future épouse, et comme il n'avait pas une grande santé, il étudia beaucoup et certains affirment qu'il fut un des hommes les plus lettrés du royaume.
Et c'est alors que le destin frappe en 1415, avec la mort de son frère, le dauphin Louis, suivi un an plus tard par la mort de Jean, l'autre fils….. et c'est ainsi que Charles devint héritier du trône de France en 1417, recevant alors le duché de Berry.

Si l'Anjou était sensiblement calme, il n'en était pas de même du reste du royaume et la guerre complexe entre les Bourguignons et les Armagnacs, avec en plus la présence des anglais faisait un joli bourbier, avec les rapines, assassinats, et autres chevauchées sanglantes. Charles avant d'être prisonnier par les Bourguignons s'enfuit de Paris en 1418 pour se réfugier à Bourges, dans son duché.

Le "petit roi de Bourges"

Charles se proclama alors régent, et à cette époque, il n'a que 15 ans, on dit de lui qu'il n'a pas de caractère et qu'il a horreur de la violence, dans ces temps troublés, c'est presque une faute. Par contre il est qualifié de gentil et il est très modeste, bref, rien d'un futur roi .
D'ailleurs, il sera malade après l'assassinat de Jean sans peur au pont de Montereau en 1419.
Et puis la rumeur, toujours cette rumeur. Elle n'avait jamais cessé : pour beaucoup, ce Charles n'était qu'un bâtard, et il ne pourrait pas être reconnu comme roi de France. Sa mère, de plus en plus garce, déclarait que le roi de France devrait être Henri V d'Angleterre, et que "Charles, soi-disant dauphin" devrait être condamné et banni du royaume". Charmante famille !

Dans ces périodes difficiles, Charles devenu "de Berry", vit au palais ducal de Bourges mais aussi à Mehun sur Yèvre, dans le château de feu son oncle.

La vie continue et il n'a pas 20 ans quant il épouse au printemps à Bourges dans la cathédrale Saint Etienne, le 22 avril 1422, sa copine de jeu, Marie d'Anjou, qui sera une reine aimante et fidèle, d'où son mérite, d'autant qu'elle n'était pas très belle, les chroniqueurs de l'époque assurant qu'elle avait "un visage à faire peur aux Anglais même".
Marie d'Anjou, nous dit Suzanne Portier aura une vie monotone, elle file le rouet, récite des prières et…. fait des enfants, elle en mettra 14 au monde, dont le futur Louis XI.

Quelques mois plus tard, le roi Charles VI meurt et la France se retrouve avec deux rois. L'un est anglais, c'est Henri VI, il est à Paris et règne sur une grande partie de la France. L'autre, c'est "notre petit roi de Bourges". Il règne sur le Berry et quelques autres provinces, entouré d'une poignée de fidèles. De 1422 à 1437, Charles VII fera de Bourges sa capitale, et surtout un havre de paix et de sécurité. Il devint un roi berrichon et tourangeau, avec une cour qui n'était pas celle des miracles, mais qui était très pauvre. Pendant plusieurs années, sans finances, c'est le chapitre de la cathédrale qui payera les factures du poisson de la cour et du roi pendant le carême !

Et puis, le "petit roi de Bourges", avec ses fidèles comme le duc d'Alençon ou Jouvenel des Ursins ainsi qu'un grand guerrier, le connétable de Richemont se mit à reconquérir son royaume aux mains des anglais et de leurs alliés. L'étincelle, ce fut semble-t-il Jeanne d'Arc. Dotée d'un pouvoir de persuasion certain, la pucelle rencontra le roi et le convainquit qu'il était bien le … fils de son père et non pas le fruit des aventures extra conjugales de sa mère Ysabeau de Bavière avec un proche parent de la cour. Ce fut sans doute la révélation.

La reconquête de son royaume

On connaît bien la suite, une armée est confiée à Jeanne d'Arc qui délivre Orléans et emmène le roi se faire couronner "pour de vrai" à Reims le 17 juillet 1429, comme le voulait la tradition. A noter que l'armée qui escorte le roi a été formée à Bourges, sans doute dans les rues dites de "la Grosse armée et de la Petite armée".

Et puis peu à peu, après cette forte impulsion donnée par Jeanne d'Arc, et même une fois son emprisonnement puis sa mort, la France de Charles VII prend forme et le roi "boute les Anglais hors de son royaume".

Entre les combats, plutôt saisonniers, le roi passe la plupart de son temps à Bourges dans son palais et dans la région, à Mehun, Bois sir Amé, et au château de Dame…..

En 1437, finalement Charles VII se résout à retourner à Paris, qui redevint capitale du royaume, mais Bourges restera dans la mémoire du roi, il rendra hommage à "la grande et ferme loyauté de la ville de Bourges". Au mois de mai de cette même année, il avait accordé à ses habitants le privilège d'acquérir des biens nobles sans aucune indemnité envers l'Etat. Et il y eut toujours entre les habitants de Bourges et donc "les bourgeois", et leur souverain, une grande fidélité. Ce qui ne sera pas le cas, plus tard, avec le fils.

Lequel fils, futur Louis XI lui en faisait voir de toutes les couleurs, il voulait simplement prendre le pouvoir à la place de son papa et ne reculait devant rien. Ainsi, Louis le dauphin se révolta alors qu'il était à Bourges et prit les armes. Ce complot armé prendra le nom de "Praguerie" et Charles VII eut toutes les peines du monde à reprendre la main et à vaincre son fils lequel était aidé par Jean de Salazar, un des grands chefs de cette rébellion.

C'était en 1440, il n'avait que 37 ans mais après cet épisode de vraie guerre entre père et fils, Charles VII séjourna de plus en plus à Bourges et en Berry.

Après une trêve conclut à Tours en 1444, avec les Anglais, la situation commença à devenir plus paisible, et tout en comptant fleurette avec une jeune beauté appelée Agnès Sorel, il lui cueillait des fleurs et "les offraient à sa belle amie", le roi reconstituait une puissante armée, et comme il changeait beaucoup, il participait même à des tournois, rompant la lance avec les meilleurs.
Bref le roi s'épanouissait enfin, luttant toutefois contre quelques soulèvements, fomentés par son fils qu'il finit par exiler en Dauphiné, pour avoir la paix, au moins de ce côté là.

Avec des capitaines comme Dunois, Brézé et Richemont, Charles VII poursuivit lentement mais sûrement la reconquête de son royaume, et après avoir repris le Maine, ce fut la campagne de Normandie où il gagna véritablement la guerre de 100 ans, et "Charles le Victorieux" entra en novembre 1449 dans Rouen libéré. A ses côtés, un berruyer l'accompagnait : Jacques Cœur, qualifié alors de "noble homme de Bourges".

En moins de 3 ans, il avait reconquit sensiblement toutes ses provinces, le frêle souverain qui avait fuit Paris pour le Berry en 1418 était devenu un souverain puissant, le Doge de Venise parlait de lui comme "du roi des rois" et les poètes chantaient ses louanges. Il prit alors le goût du luxe, des jolies filles et de la bonne chère, ce qui surpris son entourage.

Fin de vie à Mehun sur Yèvre

La fin de sa vie fut assez triste. Il mourut à Mehun à l'âge de 58 ans, le 22 juillet 1461, après un règne de 43 ans, ce qui représente tout de même 6 septennats !
Il vécut en reclus dans son château de Mehun sur Yèvre, se méfiant de tout et particulièrement de son fils, même éloigné, ce dernier continuait à comploter. Charles VII soufrait de gangrène à la jambe et pensait que le dauphin voulait l'empoisonner en enfin prendre sa place.

A sa mort, il fut comparé à Charlemagne et à César, et Suzanne Portier écrit "que ses contemporains ne tarirent pas d'éloges sur lui, le peuple se souvenait de sa simplicité et le pleura". Son corps est embaumé puis transporté à Saint Denis, accompagné, ironie de l'Histoire par Jean Cœur, archevêque de Bourges.

Charles VII était un souverain de son temps, avec toute la cruauté de l'époque. Il n'a pas fait grand chose pour sauver Jeanne d'Arc qui l'avait "fait roi et commencé la reconquête". Il avait manqué de beaucoup de gratitude envers Jacques Cœur l'arrêtant et l'emprisonnant, alors que ce dernier avec son argent lui avait permis de lever les troupes qui libérèrent la France.
Un roi "de Bourges" qui a plutôt "mauvaise presse à Bourges et en Berry" même 600 ans après sa naissance.
Dernier élément, et non des moindre, ce fut le premier souverain à imposer à la cour, officiellement sa maîtresse, Agnès Sorel. Jusqu'alors, les rois n'étaient pas plus que Charles VII des exemples de fidélité conjugale, mais ils trompaient leur reine discrètement. Le "roi de Bourges" le fit ouvertement, et imposa sa maîtresse à la cour…. Ce sera le premier à le faire, et pas le dernier……

Exposition aux Archives départementales du Cher


Complément sur Agnès Sorel :

De ce que nous savons, les restes d'Agnès Sorel étaient conservés dans un tombeau du château de Loches. Le Conseil Municipal, pour des raisons que j'ignore, peut être pour des raisons simplement de travaux dans le château, a décidé de déplacer le tombeau.
Un historien, ayant appris cela, a demandé au Conseil Municipal de pouvoir ouvrir le tombeau afin de prélever des ossements et de faire deux séries de recherches :
d'une part de rechercher par des tests, si la "Dame de Beauté " a été ou non empoisonnée.
d'autre part de reconstituer en trois dimensions le visage de la belle Agnès et sans doute voir si elle était aussi belle que le dit la légende.

Donc, cela s'est fait au mois de septembre dernier,
On a retrouvé seulement un crâne en bon état, car le tombeau a été profané à la Révolution, comme cela s'est fait souvent. Le crâne a été effectivement confié au CHU de Lille qui va étudier si Agnès Sorel a été ou non empoisonnée.
Quant au visage, c'est l'Institut de recherche criminelle de la gendarmerie qui va s'en charger.
Les résultats du docteur Philippe Charlier, c'est un empoisonnement par le mercure. Est-ce une erreur de posologie ou un acte criminel, nous ne le savons pas.

Une simple remarque, les restes du crâne de Louis XI ont été analysés, il y a un ou 2 ans, ils venaient de la crypte de Cléry près d'Orléans, où ils étaient vénérés. Le résultat des recherches a montré qu'en fait, le crâne était en trois morceaux, qui appartenaient à 3 personnes différentes, dont une femme !

Pour Agnès Sorel, il reste encore des éléments à trouver.

affaire à suivre.

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