-
Depuis
les Gaulois, et surtout avec la construction des nombreux monuments
gallo-romains, puis des premiers remparts, il a fallu de la pierre
de taille ou de remplissage. Si l'exemple le plus typique est
la cathédrale, avec ses pierres de provenance locale différentes,
tous les monuments et immeubles ont nécessité des
extractions dans les carrières. Bourges et son promontoire
ont-il été une carrière? C'est une question
importante à se poser.
l'auteur dans les carrières
de Bourges
Les carrières
de la région de Bourges :
Les carrières dans la première
zone proche de Bourges comprennent La Chapelle Saint-Ursin et
Saint-Florent. L'extraction est basée sur une pierre relativement
dure et massive utilisée pour les murs, façades
et piliers. Elle est de couleur ocre rosée et se trouvait
alors dans des carrières à ciel ouvert. Il s'agit
de calcaire lacustre tertiaire, c'est la pierre de base qui supporte
les édifices. On en fait des blocs en forme de parallélépipèdes
pour les murs et de grosses pierres taillées pour les
piliers.
Plus loin de Bourges, à Vallenay,
Bruère, et La Celle, les tailleurs extrayaient des pierres
faciles à travailler pour réaliser des moulures.
La pierre possède une belle couleur blanche, et là
encore les carrières sont à ciel ouvert. C'est
du calcaire provenant du Jurassique moyen utilisé généralement
pour les fondations ou pour ciseler la façade occidentale
de la cathédrale, dite du "grand Housteau".
Par la suite, les maçons ont utilisé la pierre
de Bruère, plus résistante.
Enfin la pierre de Charly, qui n'est ni
trop dure, ni trop tendre, c'est avec ce type de matériaux
que sont exécutées les sculptures. La couleur est
" pierre ", mais les carrières sont souterraines.
Cette pierre devenue très célèbre en Berry
date du Jurassique moyen (Bathonien) et les carrières
sont situées à 44 kilomètres au Sud-Est
de Bourges. Une telle pierre permet de réaliser des sculptures
fines comme celles situées sur la façade occidentale
de la cathédrale ou encore pour des colonnes sculptées,
des moulures et des encorbellements.
Selon Robert Billiot, c'est ce nom de "Charly"
qui a donné le nom de Charlet, correspondant à
un quartier et à une rue de Bourges qui longe l'Yévrette.
Sur cette rivière, aujourd'hui un petit filet d'eau, était
transportée par bateau, bloc par bloc, cette pierre de
Charly.
Les tailleurs de pierres du Moyen Age allaient
donc chercher les pierres assez loin de Bourges et compte tenu
des moyens de transport, c'était une opération
difficile à mettre en uvre et fort coûteuse.
Il était donc naturel que ces bâtisseurs recherchent
sur place des pierres faciles à extraire, si possible
à Bourges même.
Ce sera le cas dans des carrières
souterraines dont les couches datent du Jurassique supérieur.
Elles sont situées à la sortie sud de la ville.
L'inconvénient majeur résidait dans la qualité
médiocre de certaines veines, la pierre résistant
mal au gel et aux intempéries.
Jean Louis Boistel, tailleur de pierres,
a évoqué les blocs qui, une fois extraits doivent
être séchés à cur pour perdre
leur eau. Il est indispensable que la pierre évacue son
eau de carrière. Pour cela le temps compte beaucoup et
il faut entre 2 à 4 ans de séchage à l'abri
des rayons du soleil et de la lune.
Les carrières
de Bourges
Il existe trois zones géographiques
comportant des carrières sur la commune de Bourges, toutes
situées au Sud de la ville. Ces carrières sont
désaffectées et leur accès est aujourd'hui
interdit.
On distingue :
- la carrière du Vallon
- la carrière des Talleries
- la carrière du Château
La carrière du Vallon est située au Sud-Ouest de l'aéroport
de Bourges. Elle comprend une partie purement souterraine et
une autre sous forme d'un front de taille.
Dans sa partie souterraine, les carrières sont formées
par une calcarénite plus ou moins crayeuse. Elle a une
belle couleur blanche. Les spécialistes détectent
parmi la macrophaune, de nombreux brachiopodes. "Dans une
salle apparaît un littage régulier à intervalles
centimétriques, à priori difficile à interpréter"
nous dit Serge Debrand-Passard dans un livre sur Le Jurassique
supérieur du Berry.
Sur le front de taille, on distingue selon les épaisseurs
de la roche, différents éléments. A moins
de 3 mètres, la calcarénite est riche en bivalves
et autres brachiopodes avec de temps à autre quelques
fossiles. En remontant, on trouve du calcaire " bioturbé
à débit rognoneux" et plus bas du calcaire
graveleux.
la carrière des Talleries se situe en bordure de la RN 140 sur la commune
de Trouy. La carrière souterraine, abandonnée,
appartient aujourd'hui au domaine privé, après
avoir été la propriété de M Ferry.
Comme souvent, il n'en reste pas grand chose dans certains secteurs.
Une partie de la carrière a été détruite
lors de l'explosion d'un dépôt de munitions. Dans
la partie sud, il n'y a pas eu d'explosion mais plusieurs piliers
sont aux limites de la rupture et l'ensemble n'est pas d'une
grande solidité. C'est une zone dangereuse.
La teneur en carbonate de calcium est très forte, 98%
et les 2% restant sont de l'argile, avec même du kaolin.
Les carrières du Château
sont situées en bordure
de la RN 143, la route qui va de Bourges à Dun, à
la sortie de Bourges. La superficie exploitée des Grandes
Carrières était d'environ 8 hectares et demi et
celle des Petites Carrières de 3 hectares. La surface
totale avoisinait 12 hectares, avec parfois, au cours du temps
des zones totalement abandonnées.
Cet ensemble de carrières a assez mal vieilli. Il reste
quelques chemins de terre, avec de temps à autre, un élément
de béton en ruine ou des entrées importantes de
grottes, comportant des mots qui feraient assez vite fuir les
plus aventureux, c'est du type " porte piégée
", ou " danger " . Il faut savoir que nous sommes
dans un domaine privé pour la plus grande partie de la
zone.
L'exploitation comme carrières semble
s'être arrêtée au début de la seconde
guerre mondiale. En effet, la qualité médiocre
de la pierre et la facilité nouvelle, due à l'amélioration
des moyens de transport permettant d'aller chercher la "bonne
pierre" assez loin, a sonné le glas de ces carrières
comme lieu d'extraction.
Le calcaire crayeux de Bourges est de l'Oxfordien
supérieur. L'épaisseur des calcaires crayeux de
Bourges n'est pas très bien connue, on pense à
12 mètres. Avec les calcaires dits de " Mazières
", on atteint la hauteur de 20 mètres. Par contre
sur le seul domaine du Château, la hauteur est de 33 mètres.
Ce calcaire a été décrit dès 1874
par Douville et Jourdy. La base de la formation de ce calcaire
crayeux est oolithique. Cette roche est relativement tendre,
elle se prête facilement à la taille et fut très
exploitée même si les pierres sont un peu gélives.
Lorsqu'il reste à l'air, le calcaire crayeux de Bourges
prend une teinte noirâtre, alors que la coupe reste parfaitement
blanche. Il est aussi très riche en fossiles, on y trouve
facilement des lamellibranches et des brachiopodes. Ce calcaire
comporte peu d'ammonites.
L'étude des carrières
du Château, appelées encore carrières des
Averdines, a été traitée de manière
fort complète par André Bernon et Pierre Trotignon
dans le numéro 106 des Cahiers d'Archéologie et
d'Histoire du Berry (CAHB) de juin 1991.
Pour pénétrer dans ces carrières,
différentes entrées étaient autrefois accessibles
:
- l'entrée du "Pot à Beurre", date du
XVe siècle.
- l'entrée des Allemands, date de la dernière guerre
- l'entrée du XIXe siècle
- les entrées multiples de l'Ouest, au nombre de cinq.
Les différentes carrières
appartenaient jusqu'à la Révolution au clergé.
Elles étaient propriétés du Chapitre ou
encore de Notre Dame de Montermoyen. Il y a même une zone
qui appartenait au Grand Séminaire.
A la Révolution, elles sont vendues comme Biens Nationaux,
généralement à des carriers qui reprirent
les exploitations de pierres.
Ainsi depuis leur existence, ces carrières
de Bourges auront des destinations successives comme :
- carrières d'extraction de pierres
- champignonnières
- dépôt ou stockage d'armements
- refuge de chauves-souris
Ces quatre phases se superposent parfois
dans le temps, c'est ainsi que les chauves-souris ont vu
.
des tailleurs de pierres, des ramasseurs de champignons et des
artificiers militaires !
Carrières de pierres
Cette zone est connue depuis la nuit des
temps puisque les gallo-romains vont faire passer l'aqueduc de
Traslay dans cette partie sud de Bourges.
L'exploitation de ces pierres est aussi fort ancienne puisque
des éléments ont été retrouvés
lors des fouilles de Lazenay, elles constituaient certaines partie
de villas ou monuments antiques.
Plus tard, des sarcophages mérovingiens seront en pierre
de Bourges.
Enfin, la cathédrale possède certaines de ses parties
en pierre de la carrière des Averdines. C'est généralement
sous forme de remplissage.
C'est sans doute au XV ième siècle que l'on situe
l'âge d'or de ces carrières du Château.
La superficie des Grandes Carrières fut d'environ 8 hectares
et demi et celle des Petites Carrières de 3 hectares.
Le total fut donc d'environ 12 hectares, avec parfois, au cours
du temps des zones totalement abandonnées.
Ces carrières furent très
intéressantes, avec des bancs de plus de 2 mètres
d'épaisseur.
Elles sont nombreuses et portent le nom
de leur propriétaire.
La carrière Rollin dite aussi " carrière à
Garsault " fut ouverte en 1870, et Rollin était architecte
en chef de la ville de Bourges. Elle sera exploitée jusque
vers 1914, les chutes de pierres devenant trop dangereuses. La
pierre extraite de cette carrière fut utilisée
pour la construction à Bourges des Dames de France et
des Nouvelles Galeries.
La carrière Soumard du nom de Soumard
de Villeneuve, maire de Bourges, devient propriétée
de cette famille locale fort connue vers 1834. Elle sera successivement
utilisée pour l'extraction des pierres mais aussi pour
les champignons de 1877 à 1887.
En 1939, la carrière Soumard est réquisitionnée
par l'usine d'aviation SNCAC pour abriter des ateliers ou permettre
de stocker des éléments de moteurs d'avions en
toute sécurité. Le lieu sera réquisitionné
par les Allemands en 1940.
Après guerre, c'est à nouveau une champignonnière.
Elle appartient depuis 1986 à l'Equipement.
Les champignonnières
Il semble que l'origine de l'utilisation
des carrières comme lieu de culture des champignons remonte
à la fin du siècle dernier, même si quelques
galeries de la carrière Hugault sont vendues à
Pinon un champignonniste en 1876. En 1896, Jean Baptiste Parnajon
vend des anciennes galeries à Hippolytte Watrin, c'est
le lieu-dit du " pot au beurre ". Puis quelques années
plus tard, le 31 octobre 1911, une vente est faite à Jules-Frumence
Lefol, qui est lui aussi champignonniste.
C'est ainsi que se développe en lieu en place des extracteurs
de pierre, la culture du champignon, avec un intermède
pendant la guerre, où les Allemands utilisent le lieu
comme dépôt de munitions.
Après guerre, de 1952 à une
période récente, ce sont les champignonnières
d'Elie Lefol. Ce dernier est le neveu de Frumence Lefol, il dirigeait
la " Société des champignonnières du
Berry ".
Dans un article paru dans l'Information du Cher, en 1973, M Lefol
explique comment fonctionne ces cultures. Il a une douzaine d'employés
qui travaillent de 5H du matin à 13 heures et sur les
8 hectares des grandes Carrières, la moitié, c'est
à dire 4 hectares sont consacrés aux champignons.
La production était alors de 15 à 20 tonnes par
mois. Aujourd'hui encore on retrouve à l'entrée
des galeries, des paniers abandonnés, utilisés
pour la cueillette de ces champignons.
Pour M Elie Lefol, les carrières sont trop petites ou
trop vastes, mais ce n'est pas l'idéal. De nombreuses
galeries ont alors été agrandies pour permettre
le passage des tracteurs.
Après Elie Lefol, c'est son fils Dominique qui va prendre
la succession, mais la culture durera encore quelques années,
jusqu'en 1991, pour cesser définitivement. Dominique Lefol
s'est reconverti depuis dans le pommier et la production des
pommes.
Dépôt de munitions
Les Allemands avaient entreposé
pendant la guerre de 1939 / 40 , de nombreuses munitions qui
étaient utilisées par leurs escadrilles de bombardement.
Une des tâches des autorités locales après
la Libération fut de procéder à leur neutralisation.
Ce n'était pas simple d'autant plus que les Allemands,
au moment de leur départ procédèrent à
plusieurs destructions.
Au cours de l'opération de désamorçage
des bombes, dans une des nombreuses carrières situées
avenue de Dun, va se produire un accident terrible.
Ils étaient 10 employés des Etablissements Gaschet,
lesquels avaient obtenu le marché de désamorçage
de 3000 bombes incendiaires et explosives, de la dernière
guerre, stockées par les Allemands et les Français.
Le mardi 20 août 1946, route de Dun, dans une ancienne
champignonnière, au lieu-dit "Les Justices",
ces employés devaient désamorcer les bombes et
récupérer le métal. Depuis le début
de ce travail, 2000 bombes avaient déjà été
désamorcées. Les artificiers, dont un seul était
un professionnel, devaient couper les fils des fusées
électriques, prélever la poudre noire, puis la
noyer dans un trou d'eau. Ce n'était pas un travail compliqué,
et les risques ne semblaient pas énormes, même si,
le matin même, un sergent aviateur leur avait dit d'être
prudents.
C'était l'après-midi, vers
16 h 50, une formidable explosion se fit entendre, un nuage de
fumée de 500 mètres de hauteur était visible
à des kilomètres à la ronde. A l'arrivée
des pompiers, rapidement sur les lieux, un cratère de
100 mètres de long, 35 mètres de large et profond
de 16 mètres dégageait une poussière noirâtre.
A un demi-kilomètre de là, des graviers gris et
noirs jonchaient le sol.
Avec les pompiers, c'est l'arrivée
du Préfet, Maxime Roux, puis du Maire de Bourges, Charles
Cochet. On a placé un cordon de policiers pour empêcher
les curieux de s'approcher, et on a cherché à retrouver
les 10 malheureux. A proximité, des femmes pleurent, les
dix hommes étaient de Bourges, ils avaient été
embauchés pour ce travail, et dans ces années de
fort chômage, la qualification par rapport au travail n'était
pas le point le plus important.
Pendant toute la journée du lendemain, les pompiers, conduits
par le Commandant Hemery, vont explorer les galeries. Ils parcourent
400 mètres, mais les éboulis sont nombreux et surtout,
des explosions se font entendre. Il est décidé
de suspendre les recherches tant qu'il y aura des explosions
et des incendies, il reste encore au moins 50 tonnes de bombes
dans les galeries. Par contre, les sauveteurs ne signalent aucun
cri : pour tous, il n'y aura pas de survivant.
Les jours passent, toutes les tentatives
de retrouver les corps ont échoué. Les curieux
viennent toujours sur les lieux, et l'on recherche les causes
de l'accident. Prévalent deux théories, la première,
c'est la panne d'électricité, qui se serait produite
en fin d'après midi, et l'un des "artificiers"
aurait allumé son briquet pour voir clair, faisant exploser
la poudre présente. La seconde hypothèse, c'est
l'erreur humaine de manipulation.
Devant les risques encourus par les sauveteurs,
les autorités vont utiliser des prisonniers allemands
qui vont petit à petit dégager les galeries. On
les voit en photo, faire la chaîne avec des seaux remplis
de terre et de gravats.
Le premier cadavre ne sera dégagé que le mardi
28 août, soit 8 jours après l'explosion meurtrière.
Progressivement, au fil des jours, des cadavres sont découverts.
Le 2 septembre, on entend toujours des explosions et à
la date du 11 septembre, on n'a retrouvé les corps que
de 4 artificiers sur les 10 ensevelis.
Le bilan de cette explosion de Bourges sera de 10 morts parmi
les ouvriers français.
Aujourd'hui le lieu est bien entouré
et grillagé, et des pancartes en interdisent l'accès.
Le trou est encore bien visible, montrant l'importance de l'explosion.
Il est question aujourd'hui de combler l'ensemble, avec de la
terre et du béton, car il y a encore sous les gravas,
50 ans après, des obus ou autres instruments explosifs.
Les carrières ne sont pas un lieu de villégiature.
Les chauves souris
La température des carrières
est sensiblement de 8 degré, à peut près
constante. C'est Fabre qui l'affirme en 1838 et il ajoute "
que c'est la valeur relevée par Lemonier et Cassini lorsqu'ils
firent la triangulation de la méridienne de France "
c'était sous la Révolution.
Sur les voûtes se sont accrochées
des milliers de chauves souris. Butet, en 1829 dira :
" rien n'est plus singulier que de voir, dans l'hiver, les
voûtes de ces carrières tapissées d'une multitude
de chauves souris qui y sont collées et qui attendent
que le printemps.... "
Ce texte ne serait pas renié par Laurent Arthur et Michèle
Lemaire qui se consacrent depuis près de 15 ans à
l'étude et à la sauvegarde de ces chiroptères.
Lorsque au début des années
1990, on décida de construire la rocade Est reliant la
route de Dun à celle de La Charité, le tracé
prévu passait tout simplement au milieu des carrières....
et allait détruire les grottes des chauves-souris.
On a trouvé jusqu'à 1500 animaux dans les grottes
du Château. Les chauves souris sont des espèces
protégées, et finalement, le tracé sera
un peu " tordu " afin de sauver ce lieu hautement écologique
et symbolique.
La présence de ces animaux en nombre a toujours une signification
importante, c'est le signe d'une bonne qualité de l'environnement.
Pour ne plus ennuyer ces petites bêtes,
il a été décidé de ne les déranger
pour les compter qu'une fois pas an. Elles sont en effet très
susceptibles, et l'accroissement des visites à certaines
époques ou des récents travaux avec des moyens
considérables ont effrayées ces chiropractères
et un essaim de plusieurs centaines d'éléments
sont parties à une vingtaine de kilomètres de Bourges,
elles ne supportaient plus les bruits et vibrations......
Visites guidées
dans les carrières de Bourges
En prenant un chemin sur la droite, à
proximité des nombreux lotissements du Val d'Auron, on
pénètre dans une caverne en ouvrant une grille.
C'est une premier trajet de quelques dizaines de mètres
la pierre est blanche, mais sur les murs on observe de nombreux
graffitis et autres dessins très curieux comme des dinosaures
d'un joli vert ou des inscriptions à caractère
plus osés.
Puis c'est l'arrivée dans les salles
très vastes de la carrière. Avec mon guide, Michèle
Lemaire, nous avançons avec les lampes torches de forte
puissance, et nous observons les chauves-souris.
Il faut éviter de laisser la lampe
sur elles, car cela les réveille et elles sont dérangées.
Une fois dérangées, par des problèmes d'énergie
et de stress elles peuvent mourir. De même il faut parler
à voix basse, et marcher avec précaution.
Les salles se poursuivent, elles sont immenses,
une dizaine de mètres de hauteur, et une longueur de plusieurs
centaines de mètres. La roche est très belle, c'est
un calcaire blanc, très lisse, et on observe aussi les
lignes de coupe. Les carriers sont passés par là,
et il ne manque que leurs outils.
Dans une zone, des sculptures apparaissent
sous les formes de bas relief, c'est parfois très beau,
mais cela date de quelques mois ou années. Un Rodin en
herbe doit sans doute s'entraîner les nuits de pleine lune.
Lorsque que l'on évolue ainsi sous
terre, à quelques encablures de la cathédrale de
Bourges, il faut toujours aller à gauche pour être
certain de sortir. Il est en effet tout à fait possible
de se perdre dans ces carrières.
Ces carrières d'extraction ont été
utilisés très récemment et elles appartiennent
à la Ville de Bourges puisque le sol est sur une propriété
communale. Il n'y a aucun risque particulier à circuler
dans ce type de carrière d'autant que régulièrement,
des piliers subsistent, les carriers ont "tourné"
autour de ce pilier qui supporte la voûte.
Les chiroptères sont peu nombreux,
de temps à autre, un grand murcin, ou plus loin une pipistrelle
plus petite. Ils sont souvent solitaire, à plusieurs mètres
les uns des autres. Parfois, ils sont à auteur d'homme,
on pourrait les toucher et les prendre. D'autre fois, ils sont
très haut suspendus au plafond et se regroupent. Mais
ces regroupements sont de faible quantité, deux à
quatre ou cinq éléments. Il n'y a pas ces essaims
des plusieurs centaines de chauves-souris comme on le dit parfois.
Mais après une simple visite, ce sont plusieurs dizaines
d'éléments qui ont été observés.
Les carrières sont à une bonne température,
sans humidité, le sol est sec malgré les pluies
importantes des derniers jours. L'air est sain, sans courant
d'air.
Dans un autre secteur de cette région
des carrières, appartenant cette fois à la DDE
(Direction Départementale de l'Equipement) l'entrée
de la grotte n'est pas très accueillante. Une voiture
entièrement calcinée trône à l'entrée.
C'est en effet un lieu fréquenté par des jeunes
qui utilisent ces lieux pour des jeux de rôle ou d'autre
chose
..
Ces cavernes sont aussi des zone d'extraction.
Elles sont plus anciennes et la roche calcaire est jaunâtre,
le beau blanc "cathédrale" a disparu. On marche
sur un sol humide, la hauteur du toit est faible, trois à
quatre mètres.
On sent un peu d'air. Et il n'y a aucune chauve-souris de visible.
Michèle Lemaire affirme que les chiroptères n'aiment
pas les courants d'air, et qu'il n'y a aucune bête dans
toute cette zone.
Il faut aller beaucoup plus loin pour trouver
des salles immenses, et cette fois protégées, et
il y a de nombreuses chauves-souris dans ces lieux. Des grands
murcins et des plus petits. Une chauve-souris est accrochée
avec seulement un doigt
. Si elle reste ainsi plus de sis
mois, elle mériterait de figurer au livre des records
!
A un moment donné, on aperçoit
d'immenses piliers de bétons au milieu de certaines salles
et à espace régulier. Ce sont des piliers très
récents, ils supportent la route nationale de Dun et la
rocade. C'est un ouvrage de la DDE, et ces éléments
contribuent à maintenir en état les carrières
et les chauves souris.
Au fond d'une zone après une longue
marche, le ciel apparaît, c'est un effondrement du plafond.
On a le long des parois des fougères et des plantes qui
rappellent davantage l'amazonie et les aventuriers de l'Arche
perdue que le Berry.
Dans les carrières de monsieur Dominique
Lefol, les champignonières sont encore visibles, ce sont
des petits cônes au sol qui servaient à placer le
fumier et produire ainsi les champignons de Paris.
Dans une de ces zones, mon guide indique
au plafond une forme circulaire de la roche. C'est un phénomène
très rare et que les géologues n'expliquent pas.
Ils viennent d'ailleurs de fort loin pour étudier à
Bourges ce phénomène. Il y a des ressources scientifiques
et touristiques.
Au fond d'une carrière, des barreaux
empêchent de pénétrer plus en avant. Ils
ont été placés en ce lieu pour éviter
que des curieux s'aventurent plus loin. C'est un lieu comprenant
beaucoup de chauves-souris. Mais ces barreaux sont d'un diamètre
de 10 centimètres, en alliage particulier, totalement
infranchissables. C'est aussi difficile à franchir cette
zone que de pénétrer dans la salle des coffres
de la Banque de France rue Eugène Brisson.
L'avenir des carrières
de Bourges
C'est un lieu magique, mais dangereux.
Outre le fait qu'il y a encore des munitions, c'est l'état
des galeries qui pose problème. Bien sûr, comme
le dit Dominique Lefol, il y a une dizaine de mètres entre
la surface et la voûte de la galerie qui est dessous, mais
c'est à l'intérieur qu'il y a danger.
De plus, c'est souvent une propriété privée,
mais hormis le lieu de l'explosion de 1946 et quelques entrées
de galeries bien protégées, il n'y a pas de clôture
et par le chemin de Blet, il est possible d'entrer assez facilement
dans les zones de carrière. A l'intérieur, si les
gosses et adolescents peuvent jouer, c'est un lieu dangereux.
Du côté du Chemin de la Rotée, vers le centre
municipal de loisir, il y a des grottes importantes, et comme
le signalait Laurent Arthur, des jeunes faisaient des "
parties ", qui allaient de fêtes bien arrosées
à des actions plus répréhensibles, comme
brûler des voitures ou d'autres encore moins avouables.
" Il y a des jours à éviter, ce sont ceux
de pleine lune ou de rencontres multiples ", tel est l'avis
de Laurent Arthur.
Mais si l'on veut positiver, il est possible
d'utiliser certaines de ces carrières pour des visites
guidées. On pourrait faire visiter ces grottes en toute
sécurité à partir du mois de juin, afin
de ne pas déranger les chauves-souris. Mais il serait
possible de placer certaines figurines afin de montrer comment
sont ces bêtes. La visite permettrait de voir le travail
des tailleurs de pierres ainsi que les champignonnières.
- Cet article
est issu de l'ouvrage intitulé "Bourges Mystérieux",
qui étudie les souterrains de Bourges et toutes les carrières
de Bourges et de sa région.
- Cet ouvrage a été
réédité en octobre 2005 est à nouveau épuisé.