Bourges redécouvre
ce grand peintre, un des meilleurs de son temps : Jean Boucher.
Les musées de la ville commencent à sortir de leurs
réserves des oeuvres de cet artiste afin de les présenter
au public.
JEAN BOUCHER:
UN AUTHENTIQUE BERRUYER,
C'est en pleine période trouble,
due aux guerres de religion, que naît Jean Boucher au mois
d'août 1575, il est d'une famille aisée, dans laquelle
le milieu de la peinture n'est pas étranger, un "
Pierre Bouchier, maître peinte" est signalé
dans les Archives du Cher à la date de 1598.
Bourges à cette époque est encore resplendissante,
c'est le lieu de rencontre des artistes, même si le souvenir
des fastes du Duc de Berry appartiennent alors à un passé
révolu.
Nul ne sait comment le jeune homme a fait son apprentissage de
peintre, il semble toutefois qu'il fera des séjours à
Rome et à Florence. Il y découvrira le milieu des
artistes et sera influencé par le "maniérisme".
Vers 1600, il revient à Bourges et semble se fixer de
manière définitive dans sa ville natale.
Pour vivre de son art, à
cette époque, il fallait obtenir des commandes, lesquelles
n'étaient pas simples à obtenir. C'est ainsi que
la Ville de Bourges lui commande en 1605 une série de
portraits du Roi Henri IV et de ses proches, car Bourges attend
le "Bon Roi Henri". Malheureusement, le roi se décommande
et la fête n'aura pas lieu. Boucher sera payé pour
ces portraits et aussitôt il se met à la décoration
du château de Montrond. Il réalise un décor
aujourd'hui disparu dans plusieurs pièces du château.
Jean Boucher vit bien, il achète
une maison bourgeoise, située à quelques pas de
la Cathédrale: la Maison de la Tournelle. Aujourd'hui,
cette bâtisse, acquise par Noël Cassard, pour en faire
un "bistrot" est toujours aussi exquise.
Cliquer sur la photo
ci-dessous, représentant Jean Boucher pour avoir le tableau
en complet
LA PEINTURE
DE BOUCHER
Les peintures et tableaux de
cette époque sont généralement orientées
sur des sujets à caractère religieux. Hormis les
Princes, les Rois et autres Evêques, il n'y avait que les
gens fortunés pour s'offrir des toiles importantes comme
aimaient à les peindre Jean Boucher.
Ainsi seront commandées des peintures comme "Sainte
Anne avec la Vierge et Saint Joachim", une "adoration
des mages" ou encore une "résurrection du Christ",
ce sont là des thèmes oh combien classiques.
Dans la Nativité, le peintre
s'est représenté, il porte une belle barbe dans
une toile de près de 2 mètres par 1,5 mètres,
avec une bonne douzaine de personnages. C'est sans doute une
des plus belles toiles de Jean Boucher, elle date de 1610, cette
Nativité peut toujours être admirée dans
une des chapelles de la Cathédrale de Bourges, même
si l'on peut regretter qu'elle ne soit pas mise en valeur.....
Pendant plusieurs années,
après avoir réalisée cette peinture, Jean
Boucher disparaît. Certaines personnes pensent qu'il voyageait,
ou qu'il se reposait. En tout état de cause, il n'y a
aucune oeuvre connue de notre berruyer de peintre de cette époque.
A partir de 1616, Boucher reprend
son art, et les tableaux se succèdent. On raconte qu'il
avait installé son atelier dans une pièce de l'arc-boutant
qui soutient la tour Sud de la Cathédrale. Dans une immense
pièce, très lumineuse, il peignait ses toiles,
mais les dimensions ne lui permettaient pas de les sortir ainsi,
en l'état. Alors, Jean Boucher démontait la toile
de son cadre en bois, il la roulait, puis descendait l'étroit
escalier, comme pour une vulgaire moquette. En bas, il remontait
sa toile sur l'entourage et livrait le tout à son client.
C'était astucieux et peu pratique, mais est-ce une légende
?
C'est vers 1624 que Boucher reçoit
un élève d'une douzaine d'années, Pierre
Mignard, il enseignera la peinture à celui qui deviendra
un des plus grands peintres du XVII° siècle.
Jean Boucher, dans les dernières
années de sa vie a une activité débordante,
il enchaîne tableau sur tableau, certains ont des dimensions
impressionnantes, comme ce Christ en Croix, qui mesure 4 mètres
sur 2,5 mètres, il est visible à Mehun sur Yèvre.
Boucher a beaucoup peint, et
pourtant nous ne connaissons qu'une cinquantaine de ses peintures,
il a essentiellement travaillé sur des tableaux à
caractère religieux, on pourrait penser à un certain
conformisme, il n'en est rien, dans les visages, dans les attitudes,
on retrouve un réalisme intéressant. Enfin, dans
ses dessins, Boucher ne néglige pas le nu, mais à
cette époque, ce n'était guère rémunérateur.
Boucher meurt en 1632, sans doute
de maladie, sa dernière année est pauvre en toile,
on note "un amour vainqueur", une petite oeuvre actuellement
au Musée de Bourges.
- La Ville de Bourges conserve diverses
peintures de Jean Boucher :
- - à léglise Saint-Bonnet,
- - deux à la cathédrale
(deux Adorations des Mages, dont lune déposée
par le musée)
- et au musée du Berry : deux
panneaux (lAmour ; Saint Sébastien),
- une peinture sur toile (Nathanaël présenté
au Christ par Saint Philippe)
- le triptyque (deux volets bois, un centre peint sur toile :
Saint Jean-Baptiste entre Jean Boucher et sa mère).
Jean Boucher a fait
lobjet dune importante exposition en 1988 au musée
du Berry et au musée des Beaux-Arts dAngers. Ce
peintre, qui signait le plus souvent ses uvres, a été
actif pendant le premier tiers du XVIIe siècle à
Bourges ; il est surtout connu par ses peintures religieuses,
car il a reçu de nombreuses commandes des communautés
ecclésiastiques de lépoque.
-
Le triptyque
de Bourges
En 2007, l'adjoint au maire de
Bourges, Philippe Gitton voulant montrer les oeuvres des musées
de Bourges enfouies dans les caves et autres sous-sols, découvrit
que la ville possédait de nombreuses oeuvres du peintre
Jean Boucher.
Dans un premier temps, plusieurs
dessins et peintures furent présentées dans une
salle du musée du Berry. De plus, deux battants d'un triptyque
de ce peintre, après avoir séjourné à
l'Eglise Saint Bonnet furent mis en valeur et présentés
dans une salle basse de l'Hôtel Lallemant.
Ces deux battants représentaient
sur l'un le peintre qui s'était, comme souvent mis "en
peinture et en scène", et sur l'autre battant, sa
mère puisque Boucher n'était pas marié.
mais il manquait le milieu, pour faire un triptyque. Et ce milieu
était un tableau représentant Saint Jean Baptiste
et un agneau, c'était une toile, mais sans doute une réplique
de la même oeuvre sur bois.
Ce Saint Jean Baptiste était
sur un des murs d'une chapelle de la cathédrale Saint
Etienne de Bourges. Après un an d'âpres négociations
avec l'Etat, propriétaire et le clergé, affectataire,
finalement le troisième morceau fut remis en prêt
à la ville qui fit des restaurations et le 4 juillet 2008,
M Serge Lepeltier, maire de Bourges accompagné de M Philippe
Gitton, adjoint et de M Yves Jonchère président
des Amis des musées de Bourges découvrirent dans
une des salles du Musée du Berry ce triptyque.
Il semble que ce triptyque avait
été peint par Jean Boucher pour sa chapelle funéraire
et il avait obtenu d'être enterré dans l'Eglise
Saint Bonnet.
Il a sans doute été
démembré à la Révolution de 1789.
- Quelques éléments
du triptyque :
- sur le volet gauche extérieur,
dans une superbe peinture un peu abîmée par les
ans, c'est Salomé qui tient le plat du supplice de Saint
Jean Baptiste.
- Toujours à l'extérieur,
volet droit, on voit Saint Jean Baptiste qui va être tué,
la tête tranchée.
- Les dimensions sont de 1,83
m par 0,68 m pour chaque volet
- la partie centrale faisant 1,68
m par 1,23.
- En bas une inscription et de
même des quatrains au bas des volets.
- Il a été restauré
à Versailles.
-
- Chronologie
de la vie de Jean BOUCHER (1575-1632)
- 20 août 1575 : en pleine période
trouble, due aux guerres de religion, naît Jean Boucher.
Il est issu d'une famille aisée, dans laquelle le milieu
de la peinture n'est pas étranger.
1596 : Jean Boucher est à Rome, il va chercher dans la
Ville Éternelle le modèle de lantiquité
et le contact avec les maîtres italiens. Il fera plusieurs
séjours à Rome.
1602 : A Fontainebleau, il dessine daprès Raphaël.
1604 : il est installé dans sa ville natale, Bourges.
1605 : la Ville lui commande des décors à loccasion
de lentrée solennelle dHenri IV. De même,
il réalise des projets dessinés pour les entrées
du Prince de Condé en 1621 et celle du jeune Louis XIII
en 1622.
1606 : il reçoit sa première grande commande, le
décor de sept pièces du château de Montrond,
aujourdhui disparu. Il recevra les années suivantes,
de nombreuses autres commandes lamenant à travailler
pour des établissements religieux.
1617 : jouissant dune grande renommée, il vend ses
uvres 300 livres, ce qui est une somme considérable.
Lexistence dun atelier est avérée en
1621. Tout laisse à croire quil a des élèves,
parmi lesquels Pierre Mignard, futur peintre de Louis XIV, qui
laident dans ses réalisations.
1628 : lartiste acquiert une concession à lÉglise
St Bonnet pour y installer sa chapelle funéraire.
1632 : il rédige son testament et décède
quelques temps après.
Histoire dune
restauration, celle de "La Madeleine"
- LHôtel Lallemant présente
en septembre 2009 une exposition "la Madeleine" de
Jean Boucher, histoire dune restauration. Visible jusquau
10 janvier 2010, cette exposition met en lumière le tableau
du peintre berruyer Jean Boucher « la Madeleine en extase
» restauré entre mars 2007 et mars 2009, au centre
de conservation et de restauration des musées de France,
à Versailles.
Cette huile sur toile d1,29 mètre x 1,01 mètre
a été achetée au couvent des Bénédictines
de Saint-Laurent de Bourges, par le musée, en 1894.
-
-
- Ce tableau de Jean Boucher, daté
de 1604, présente Sainte Madeleine agenouillée
qui regarde vers le ciel. Elle est lune des plus anciennes
uvres connues de Jean Boucher. A cette époque, la
dévotion à la Madeleine est très forte,
le sujet est courant. Par contre, lartiste prend le thème
plus rare de lillumination (et non celui de la méditation
ou la pénitence).
Le tableau avait déjà été restauré
après son acquisition par la Ville de Bourges, par Alfred
Deballe, professeur à lEcole des Beaux-Arts de Bourges,
qui faisait office de restaurateur pour les uvres du musée
jusquà sa mort en 1904. Dans une note adressée
à Daniel Mater, Président de la commission du musée,
il décrit minutieusement létat du tableau,
mentionnant les larges repeints recouvrant la couche picturale
dorigine et le cerne noir autour du corps de la Sainte,
qui détruisait la perspective.
En novembre 2006, le Centre de Recherche et de Restauration des
Musées Nationaux a dressé un nouveau constat détat.
Le tableau est peint sur une toile assez fine ; la couche picturale
est peu épaisse et présente des zones dusure
importantes, ainsi que des repeints anciens, désaccordés
et visibles. Ladhérence de la couche picturale au
support est mauvaise, avec de nombreux soulèvements. Le
vernis est encrassé et partiellement opacifié.
Il convient donc de procéder à une nouvelle restauration.
Lintervention a consisté à traiter le support
et la couche picturale, avec deux restaurateurs différents,
Virginie Trotignon pour la couche picturale et Emmanuel Joyerot
pour le support.
Dans un premier temps, le restaurateur de couche picturale procède
au refixage des surfaces en cours de soulèvement. Après
quelques tests pour connaître létat de la
couche picturale, les repeints ont été enlevés.
Puis, le restaurateur de support la décloue du châssis,
dépoussière le revers, pose un vernis de protection
et colle un cartonnage papier de chanvre sur la surface de la
peinture de façon à lui assurer cohésion
et solidité. Alors, il enlève la toile collée
au dos de la toile originelle et élimine la colle. Le
restaurateur de couche picturale intervient à nouveau
pour éliminer les repeints avant que son collègue
colle une nouvelle toile, après avoir intercalé
entre les deux toiles une feuille dintissé autorisant
la réversibilité de la restauration. Après
le rentoilage et la remise sur un châssis à clefs,
la réintégration a eu lieu : un vernis est passé
sur la surface du tableau, puis intervient le masticage des lacunes,
puis la retouche elle-même, qui remet en couleurs les zones
lacunaires. Enfin, après lharmonisation densemble,
luvre est revernie.
Le coût de cette opération minutieuse est de 11
504 TTC.
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